Emerging Valley a réussi le pari fou d’avancer dans le dialogue eurafricain, en version numérique. Au fil des 90 débats, keynotes, workshops et pitchs, plus de 2 300 participants ont ainsi entrevu le bouillonnement créatif et résilient des grands acteurs et décideurs qui font la tech sur l’axe Afrique-Méditerranée-Europe en 2021. Le débat « Territoires résilients et villes durables Afrique Europe » a permis le 8 avril 2021 dernier de poser les enjeux du développement urbain en Afrique, mais aussi en Europe. Denis Bergé, délégué général d’Africalink, a notamment délivré en introduction deux chiffres : en 2030, l’Afrique comptera sept villes de plus d’un million d’habitants et aujourd’hui 13% des innovations dans le monde sont issues du continent africain. La smart city, la ville intelligente contre le chaos urbain s’impose. Mais, souligne d’emblée Hugues Parant, directeur général de l’établissement public d’aménagement Euroméditerranée, et fin connaisseur du continent, il faut lever un « gros malentendu. La smart city ? Oui mais, pas sur le modèle asiatique de la tech à tout prix, pas le modèle singapourien. Où est l’intelligence dans cette course ? En Europe, la smart city est souvent portée par des opérateurs publics qui intègrent la tech au service des habitants, qui l’adaptent selon les cultures : Hambourg n’est pas Marseille. Il faut inventer un troisième modèle, un modèle agile avec l’inventivité de l’Afrique et la nécessité de coûts accessibles ».
Il faut inventer un troisième modèle de smart city
Pour Cécile Maisonneuve, présidente de la Fabrique de la Cité, la smart city doit permettre d’anticiper les chocs par « une concordance des temps, par un alignement des perspectives de l’aménageur public et de l’écosystème des start-up ».
Ilhame Maaroufi qui œuvre à la construction de la ville nouvelle de Zenata au Maroc, une ville écoresponsable est en phase. Il faut dit-elle « à la fois planifier dès le départ, mais en sachant qu’il n’y a pas de modèle. Nous devons être capables de créer un écosystème en PPP, mais ouvert au start-uper ». « Il n’y a pas de modèle sur étagère, enchérit Hugues Parant. La smart city n’est pas un objectif en soi, il faut répondre aux attentes, aux questions des habitants, au contexte. En Afrique 90 % des habitants n’auraient pas accès au modèle singapourien, mais l’Afrique est surdotée en terminaux avec une pratique quotidienne et souvent innovante des smartphones par exemple. »
Sami Agli, président de la Confédération algérienne du patronat citoyen (CAPC) confirme que le développement urbain doit mobiliser le monde économique sans quoi, dit-il, « il n’y aura pas de création de richesse ». Il souhaite « un partenariat public privé qui ne peut s’instaurer que dans la confiance et surtout dans la transparence, dans la clarification des règles de la commande publique avec un accès clair des acteurs économiques aux marchés publics. »
Pour une ville smart et humaine
Face au développement souvent incontrôlé des villes et métropoles africaines, les acteurs doivent valoriser les avancées pratiques et leur bénéfice comme le mobile money qui a réduit la délinquance en limitant les flux monétiques, comme la capacité à trouver dans l’informel des solutions au travail et à l’habitat. S’il y a « tout à faire », Hugues Parant conclut en invitant à faire la ville différemment, « en utilisant la tech pour une ville smart, mais low-cost et surtout humaine ».