Alors que les Etats membres de l’Union européenne discutent du plan d’action pour une énergie abordable (Affordable energy action plan) et que la Commission européenne travaille à l’évolution des règles sur l’Ecodesign des équipements de chauffage au bois domestique, le Syndicat des énergies renouvelables (SER) insiste sur le rôle essentiel de cette énergie dans la transition énergétique de l’Europe et de la France. « Le chauffage au bois domestique est une source d’énergie renouvelable incontournable, populaire et économique, pour l’ensemble des territoires. Aujourd’hui, environ 50 millions de ménages européens dont 8 millions de foyers français se chauffent au bois énergie domestique. En France, il est la première source de chaleur renouvelable et représente 25 % de la chaleur consommée du secteur résidentiel » observe le SER.
Pour Jules Nyssen, le président du SER « le chauffage au bois domestique restera indispensable à la politique de décarbonation de notre pays. J’entends ici ou là que cette solution de chauffage pourrait être interdite à partir de 2027. C’est faux. Le SER travaille avec les instances européennes et françaises pour définir les critères retenus dans les futurs règlements sur l’écoconception des produits, dit « Ecodesign ». Ces règlements n’impliqueront aucune restriction pour les consommateurs et s’appliqueront uniquement aux fabricants des équipements. Les travaux sont en cours et les industriels sauront s’adapter et proposer des équipements toujours plus performants, comme ils le font depuis des dizaines d’années ».
Dominique Robin, le directeur d’Atmosud, l’organisme régional chargé de la surveillance de la qualité de l’air interrogé par Gomet’ réagit à cette actualité à travers une tribune que nous publions ci-dessous. Pour lui, « dans les zone urbaines, la question de la régulation, voire la limitation du bois-énergie se pose. »
L’air que nous respirons devrait être pris en compte
S’il ne s’agit sans doute pas d’interdire l’utilisation du bois pour se chauffer, la question du bon équilibre dans le mix énergétique se pose aujourd’hui clairement.
Depuis plusieurs années, les organismes de surveillance de la qualité de l’air, dont AtmoSud, pointent la part croissante du bois-énergie et les risques associés en matière de santé publique. Le chauffage au bois constitue aujourd’hui le premier émetteur de particules fines et d’Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques en France.
Plus d’émissions que les transports et l’industrie
En région Sud, la part de ces émissions représente près de 60%, devant les transports et l’industrie. Les stratégies énergétiques devraient donc intégrer pleinement la qualité de l’air dans l’équation, afin d’éviter d’avoir à déconstruire par manque d’intégration, les politiques engagées.
Ce raisonnement s’applique également aux actions d’étanchéification des bâtiments destinés à limiter les déperditions de calories. L’air que nous respirons devrait être pris en compte comme un paramètre essentiel dès la conception. Bien sûr les technologies plus récentes, qui ont d’ailleurs un bien meilleur rendement énergétique, sont généralement plus favorables à la qualité de l’air.
Le dispositif soutenu par l’Ademe et mis en place sur les Bouches-du-Rhône par le Conseil Départemental est une bonne mesure. Elle accompagne efficacement les particuliers pour renouveler les vieux poêles à bois et autres cheminées.
Pour autant, dans les zones urbaines, la question de la régulation, voire de la limitation du bois-énergie, se pose. Londres et Québec ont déjà annoncé par exemple des restrictions sur cette utilisation.
Plus d’émissions que les transports et l’industrie
Il convient ensuite de distinguer les solutions collectives qui disposent d’un système de filtration performant, des solutions individuelles. Pour les premières, lorsqu’il s’agit de forêts durablement entretenues et locales, l’activité bien qu’émettrice, peut être considérée comme acceptable. La question résiduelle concerne l’emplacement et pour cela il s’agit d’étudier chaque cas. Concernant les particuliers, dans certaines zones la question de la maîtrise se posera (technologie, qualité du bois, hauteur des cheminées…). La filtration des dispositifs individuels pourrait également se poser à terme pour le législateur.
Dominique Robin
Liens utiles :
[Verbatim] Jules Nyssen : « Les ENR sont des énergies de territoire »
Dominique Robin (AtmoSud), au coeur du triptyque air, climat et énergie