Labellisé en juillet dernier par les investissements dʼavenir, le programme de recherche Epinov va utiliser le cerveau virtuel développé par des chercheurs marseillais pour mieux détecter les zones responsables de l’épilepsie chez les patients et cibler de façon plus précise les opérations chirurgicales sur le cerveau.
Lʼépilepsie touche aujourdʼhui 1% de la population mondiale et ce chiffre dépasse les 3% au-delà de 65 ans. « Cʼest une maladie encore méconnue du grand public et des médecins non spécialistes », affirme Fabrice Bartolomeï, chef de service neurophysiologie et épileptologie à lʼhôpital de la Timone. Pour traiter cette pathologie, des traitements médicamenteux existent mais ils restent inefficaces dans un tiers des cas. Les médecins doivent alors recourir à la chirurgie, mais ici encore le taux de réussite nʼexcède pas les 50 %. « Avec nos méthodes actuelles, nous avons du mal à identifier les zones qui provoquent les crise », explique le professeur. Grâce au projet Epinov, il espère obtenir une modélisation virtuelle du cerveau qui permettra dʼaméliorer les interventions chirurgicales sur l’encéphale des patients épileptiques.
Des essais thérapeutiques sur plus de 350 personnes épileptiques
Actuellement, des électrodes sont installées sur le cerveau du patient avant lʼopération, afin dʼenregistrer les crises. Les médecins interprètent ensuite les données pour tenter de repérer les zones où il y existe un dysfonctionnement électrique. « Cʼest une méthode exploratoire assez invasive. Avec le cerveau virtuel, on éviterait ce désagrément au patient », espère le Pr Bartolomeï. En 2016, des chercheurs du CNRS, de lʼInserm, dʼAix-Marseille Université et de lʼAP-HM ont créé pour la première fois un cerveau virtuel permettant de reconstituer l’organe dʼune personne atteinte dʼépilepsie. Dans la droite ligne de cette découverte, le projet Epinov prévoit de tester cette technologie neuroinformatique sur plus de 350 patients dans 11 centres de chirurgie en France. « Lʼassociation dʼune modélisation virtuelle du cerveau et dʼessais thérapeutiques est une première mondiale », se félicite le Pr Bartolomeï, coordinateur du projet. Le programme a reçu un financement de 5,8 millions dʼeuros en juillet dernier dans le cadre de lʼappel à projets recherche hospitalo-universitaire en santé lancé à lʼoccasion de la troisième vague des Investissements dʼavenir. Cette labellisation va lui permettre de mener des travaux pendant cinq ans pour obtenir les premiers résultats dans la chirurgie des patients épileptiques. Les données personnalisées générées par le cerveau virtuel amélioreront la localisation de la zone épileptogène. Un rapport sera ensuite fourni à chaque investigateur avant la prise de décision sur la stratégie chirurgicale à adopter. « Notre premier objectif est dʼobtenir les mêmes résultats sans utiliser dʼélectrodes », avance Fabrice Bartolomeï. Après ce premier succès, lʼéquipe de recherche s’attellera au développement dʼun outil de simulation chirurgicale pour accompagner les médecins lors des opérations.
Dassault Systèmes veut apporter la technologie sur le marché
Le projet Epinov implique cinq partenaires : Aix-Marseille Université, Inserm, AP-HM, Hospices civils de Lyon et Dassault Systèmes comme partenaire industriel. Lʼentreprise, qui sʼest lancée dans le secteur médical depuis dix ans, va travailler sur le développement du cerveau virtuel afin de donner naissance à un produit plus facile dʼutilisation. « A terme, nous espérons sortir une technologie applicable en dehors du cadre très strict des essais cliniques », annonce William Saurin, responsable de la recherche biologique chez Dassault Systèmes. Le programme Epinov vise la création dʼun prototype de logiciel stabilisé à lʼissue de ces travaux et souhaite apporter ces technologies sur le marché et dans la pratique courante afin dʼaméliorer le pronostic chirurgical des patients épileptiques. Aucune date précise nʼest envisagée pour le lancement de ce produit prometteur mais il devrait être porté par une société associant Dassault Systèmes, la Satt Sud-Est (Société d’Accélération de Transfert Technologique Sud-Est) et dʼautres partenaires publics.