Exploitation du Parc Chanot : CMA CGM a-t-il déjà plié le match ?

C’est la sensation de l’été. Le groupe de transports et de logistique basé à Marseille, CMA CGM, de plus en plus diversifié (investissements dans les médias, le numérique,…) veut ajouter une corde à son arc : celle de l’événementiel. Cette fois le groupe dirigé par la famille Saadé s’intéresse au Parc Chanot, le site d’activités événementielles qui jouxte l’Orange Vélodrome, dans le 8e arrondissement de Marseille. La délégation de service public détenue depuis 1985 par la Safim est remise en jeu à la suite de l’appel d’offres publié par la Ville de Marseille. Le site et ses équipements vieillissants nécessitent des centaines de millions d’investissements pour être adaptés aux standards internationaux des parcs d’exposition et de congrès capables d’accueillir de grands événements.

Parc Marseille Chanot, propriété de la Ville de Marseille

Exploitant et gestionnaire du site Marseille Chanot, propriété de la Ville de Marseille, la Safim exploite un total de 60 000 m2 de surfaces couvertes et 100 000 m2 de surfaces extérieures au sein d’un site de 17 hectares. Cette mission est régie par une convention conclue en 1985 avec la Ville de Marseille.

Chaque année, la Safim accueille près de 250 manifestations au sein de six halls d’exposition du Palais des Congrès et du Palais des Arts. La modularité des surfaces permet d’accueillir plus d’un million de participants chaque année sur tous types d’événements grand public et professionnels : salons, congrès, séminaires, lancements de produits, spectacles, évènements sportifs, road shows… (Source Safim)

Comme à son habitude, le groupe dirigé par Rodolphe Saadé, met toutes les chances de son côté pour réussir son pari. Il s’est allié avec GL Events, le groupe lyonnais dirigé par Olivier Ginon. Le PDG lyonnais aime venir à Marseille. Il a ses entrées et ses habitudes au restaurant la Villa dans le 8e arrondissement depuis lequel il travaille son réseau phocéen. GL Events était déjà en lice lors du premier appel d’offres lancé en 2018 par la précédente mairie. Mais le projet avait avorté, d’abord pour vice de forme avant de s’empêtrer dans la crise du Covid.

Dans ce dossier, GL Events apporte sa compétence de l’événementiel puisqu’il fait partie des leaders mondiaux du secteur. Coté sur l’Eurolist Euronext, l’entreprise a réalisé un chiffre d’affaires de 1,315 milliard d’euros en 2022. La CCI métropolitaine Aix-Marseille Provence, alliée locale de poids, complète le groupement.

La Safim isolée et… démobilisée ?

Face à ce favori, l’exploitant actuel, la Safim – dont l’actionnaire majoritaire est le groupe Veolia eau France – aura du mal, sauf surprise, à remporter la mise d’un appel d’offres qui fixe une durée courte de trois ans pour l’exploitation du site de 17 hectares. L’exploitant semble isolé contrairement à sa précédente candidature en 2018 où il avait comme allié de poids le Crédit Agricole et Fimalac Entertainment. L’actionnaire majoritaire de la Safim, le groupe Veolia, est exclusivement concentré sur ses activités eau et environnement. L’exception marseillaise de l’exploitation d’un parc des expositions et des congrès, fruit de l’histoire du groupe dans la cité phocéenne, semble désormais hors du temps.

En interne, la direction de la Safim, qui n’a pas donné suite à nos appels, semble mettre peu d’entrain à partager son projet qui n’a même pas été présenté aux équipes selon le témoignage d’un représentant des salariés. On peut faire mieux pour galvaniser les troupes… Ces dernières sont d’ailleurs plutôt inquiètes face à la tournure des événements.

Au mois de juillet, les représentants du Comité social et économique (CSE) emmenés par le syndicat Force ouvrière ont fait part de leur inquiétude notamment sur l’avenir des effectifs : aucune garantie de reprise du personnel n’était spécifiée dans l’appel d’offres de la Ville. Une préoccupation alimentée aussi par le désir de la Ville de mettre fin à la Foire de Marseille en l’état. Le grand rendez-vous de la rentrée marseillaise draine chaque année au Parc Chanot plusieurs centaines de milliers de visiteurs et l’essentiel du chiffre d’affaires de l’entreprise.

Parc Chanot : l’Olympique de Marseille s’abstient

Face à ce duel qui semble très déséquilibré, un troisième candidat pourrait-il jouer les troubles-fêtes ? Rien est moins sûr. La candidature de Viparis, mastodonte de l’événementiel (Porte de Versailles, Paris Nord Villepinte, le Bourget notamment), détenu à parts égales par Unibail Rodamco Westfield et la CCI de Paris n’est pas confirmée. À l’heure du bouclage de notre article, la mairie ne nous a pas répondu sur le nombre final de dossiers déposés.

L’Olympique de Marseille, propriété de l’américain de Frank McCourt, qui aime investir dans l’immobilier, n’est pas de la partie cette fois. L’homme d’affaires avait pourtant montrer son intérêt lors du précédent appel d’offres, tout comme d’autres grands noms à l’instar de la Banque des territoires, Vinci, Eiffage ou encore la Caisse d’épargne Cepac.

Les ardeurs des uns et des autres auraient été douchées à la fois par l’entrée du groupement CMA CGM – GL Events – CCIAMP – mais aussi par la spécificité de l’appel d’offres portant sur une durée transitoire et une expression de besoin multiformes (logement y compris social, espaces verts, préservation des activités de congrès). Bref, une quadrature du cercle sur un site limité en potentiel d’exploitation. La mairie devrait sélectionner le lauréat d’ici à la fin novembre. A l’issue des trois ans d’exploitation, un nouvel appel d’offres devrait consacrer un exploitant plus durable. Les gros acteurs du BTP, de l’immobilier, de la finance et de l’événementiel seront-ils alors de retour ?

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