Chaque année, l’habitant de la métropole aixo-marseillaise jette 613 kilos de déchets. Chaque jour, un long train quitte Marseille, lourd de 1 500 tonnes de détritus ménagers. Au dessus du golfe de Fos, l’atmosphère reçoit à l’année 100 tonnes de particules métalliques invisibles, et 12 000 tonnes d’oxyde de soufre ou autres vapeurs nocives. Le ciel devenant ici le principal dépotoir des usines les plus polluantes.
Tous les ans, sur la planète, cent mille animaux meurent des suites de l’absorption d’ordures. Dès l’entrée de Vies d’ordures, sa nouvelle exposition, le Mucem projette l’image animée d’une vache albanaise broutant goulûment des lambeaux de sacs plastiques usagés. On n’ose imaginer la qualité du lait qu’elle fournira. Quant aux bouteilles du même plastique indestructible, la France, à elle seule, en produit six milliards par an, soit sept cent mille à l’heure.
Trois ans de recherches
Côté véhicules hors d’usage, le pays en recensait un million et demi en 2015. Enquêteurs et collecteurs préparent depuis trois ans cette manifestation, en sillonnant les contours du bassin méditerranéen. De Casablanca à Beyrouth, il n’est pas seulement question de rapporter l’histoire de nos rebuts, ce que d’ordinaire la civilisation préfère dissimuler, ces quelques dix milliards de tonnes d’inutiles, mais de découvrir comment s’invente le réemploi, la seconde vie des objets évacués.
Avec de vieux pneus, l’artisanat marocain fabrique jarres, seaux ou fauteuils. Le Tunisien recycle systématiquement les vêtements périmés. Au Caire, les canettes écrasées deviennent des lingots d’aluminium. De la même capitale égyptienne est venu un rutilant triporteur, motorisé et musical dont le propriétaire de 22 ans, Ramadan Nabi, se veut tout autant ferrailleur – récupérateur qu’animateur de rue ou ardent disciple du prophète.
Huit tonnes à l’heure
Du balai le plus sommaire ou du croc de chiffonnier d’antan, le visiteur passe à la longue machine de tri optique des déchets, conçue par la firme pertuisienne Pellenc ST, qui l’exporte dans une quarantaine de pays. L’engin peut traiter huit tonnes par heure de résidus.
L’époque du tout-jetable succède à une période où l’homme savait réparer, soigner, transformer et reconvertir ses ustensiles. Chacun ne possédait alors que quelques centaines d’objets, ils sont devenus des milliers aujourd’hui. L’ère numérique permettra peut-être de réduire ce gaspillage, – songeons que plus du tiers de la nourriture finit dans la poubelle. En fin de parcours, il faut observer une machine capable de rendre saine l’eau pompée dans les canaux de Venise ou Rotterdam, Paris ou Shanghai.
En marge de cette présentation, se tiendra, lors des Rameaux (samedi 8 et dimanche 9 avril), la fête des plantes dépolluantes. L’agence de l’environnement répète sans cesse que le meilleur déchet, c’est celui qui n’est pas produit. À cet égard et fort logiquement, les exposants de ce printemps promettent qu’une fois démontée (fin août prochain), Vies d’ordures n’en laissera pas. Tout en soulignant que les plus dangereux de nos déchets, les radioactifs, resteront, eux, toxiques un gros millier de siècles : jusqu’en 102 140 !
Pratique :
> Vies d’ordures, de l’économie des déchets, du 22 mars au 14 août 2017
> De 11h à 18h, (20h en juillet et août), tous les jours sauf mardi,
> tarifs : 5 à 12 euros
> www.mucem.org