Annoncé comme plus écologique, le gaz naturel liquéfié séduit les compagnies maritimes et les transporteurs routiers. Cette tendance profite aux terminaux méthaniers dʼElengy à Fos-sur-Mer qui prévoit de se développer pour suivre la hausse de la demande.
Le gaz naturel liquéfié (GNL), présenté comme une alternative aux carburants polluants, pourrait également profiter à lʼessor économique du Grand Port maritime de Marseille-Fos (GPMM). En 2016, les volumes de GNL ont augmenté de 33 % pour atteindre les 5,5 millions de tonnes alors que le brut a baissé de 3 %. « Nous soutenons au maximum cette énergie peu polluante sur nos terminaux », ne cesse de répéter Christine Cabau-Woehrel, la directrice du GPMM.
Elengy premier bénéficiaire de la mode du GNL à Fos-sur-Mer
À Fos-sur-Mer, les terminaux méthaniers qui reçoivent le GNL sont gérés par Elengy, une filiale du groupe Engie. Lʼentreprise détient deux terminaux au Tonkin et à Cavaou (détenu à 27,5 % par Total). Son directeur, Mathieu Storz, confirme le regain du trafic de GNL vers lʼEurope : « LʼAsie drainait jusquʼici la demande mais le ralentissement de la croissance chinoise et la reprise du nucléaire au Japon ont ralenti ce mouvement. Dorénavant, lʼEurope et la France prennent le relais ce qui profite grandement à Fos », affirme-t-il.
L’arrivée à maturité des technologies de liquéfaction du gaz ces dernières années a provoqué une explosion des volumes échangés par ce biais, qui sont passés de 97 millions de tonnes par an en 2000 à 258 millions de tonnes en 2016, selon l’Union internationale du gaz. À Fos, plus de 110 navires sont passés par les terminaux dʼElengy en 2016 et 2017 devrait suivre la même tendance « malgré une défaillance dʼapprovisionnement de lʼAlgérie les deux premiers mois de lʼannée », précise Mathieu Stortz. Les terminaux de Fos fonctionnent cette année à 45 % de leur capacité contre 18 % en moyenne dans le reste de lʼEurope. La hausse des entrées de méthaniers GNL semble donc déjà confirméE et devrait sʼaccélérer dans les années à venir.
Un micro-méthanier pour avitailler les navires
La liquéfaction du gaz réduit son volume de 600 fois et permet donc un transport plus économique mais le GNL est également un carburant très efficace. Dans le secteur maritime, les armateurs multiplient depuis quelques mois les annonces de nouveaux navires utilisant cette énergie annoncée comme plus propre. Il dégage 25 % de moins de CO2 et 80 % de moins de dioxyde dʼazote, comparé au fuel lourd. Résultats, la CMA CGM a commandé neuf porte-conteneurs géants alimentés au GNL livrables à partir de 2019. Les compagnies de croisières sont également séduites par ce carburant plus respectueux de lʼenvironnement. Costa et MSC Croisières ont également lancé la construction de plusieurs paquebots fonctionnant au GNL.
Ce virage des armateurs implique que le port de Marseille puisse les ravitailler. Les différents acteurs du GPMM discutent en ce moment de la création dʼun service dʼavitaillement avec un micro-méthanier : « Reste à savoir qui sʼoccupera de ce service. Nous pourrions y prendre part en créant une société dédiée mais le GPMM pourrait également intégrer cette structure», avance Mathieu Stortz. En plus du maritime, le GNL est de plus en plus utilisé pour le transport routier. Aujourdʼhui, près de 80 % des camions bennes des collectivités roulent au gaz et de plus en plus de cars et de poids lourds suivent la tendance.
Un mouvement qui profite encore une fois pleinement aux terminaux dʼElengy. Cette année, 1 800 camions-citernes ont été chargés à Fos contre seulement 14 en 2014. Face à lʼaugmentation de la demande, lʼopérateur a lancé la réalisation dʼune nouvelle baie de chargement, un investissement de 6 millions dʼeuros pour faire passer sa capacité à 20 camions/jour : « Et nous avons dʼores et déjà prévu la possibilité de monter à 4 ou 5 bais supplémentaires si la demande continue de progresser », annonce Mathieu Storz. Mais la route nʼest pas lʼunique moyen dʼacheminer le GNL vers lʼutilisateur final. Elengy travaille avec le port sur le développement du trafic fluvial et ferroviaire : « Tonkin est proche des rails. Une petite extension des voies suffirait à le raccorder. Il faut maintenant étudier la rentabilité de tels investissements », explique Mathieu Storz. Ces deux alternatives auraient le mérite de réduire un peu plus lʼimpact environnemental du port allant dans le même sens que le GNL annoncé comme lʼalternative écologique la plus crédible par le gouvernement.
Total rachète lʼactivité GNL dʼEngie mais pas les terminaux
Le 8 novembre dernier, Total a annoncé le rachat de toutes les activités amont GNL dʼEngie pour une valeur totale de 2 milliards de dollars. Cet accord porte sur les activités de liquéfaction (notamment la participation dans le gros projet Cameron LNG aux États-Unis), le transport maritime (10 méthaniers), le négoce international de gros de GNL (avec des approvisionnements venant d’Algérie, Nigéria, Russie…) ainsi que des réservations de capacités dans les terminaux de regazéification en Europe, et fera du groupe pétrolier français le numéro 2 mondial sur ce marché. Les terminaux du Tonkin et de Cavaou restent cependant la propriété dʼElengy. « Concrètement, ça ne changera pas grand chose pour nous. Jusquʼici nous travaillions essentiellement avec deux clients principaux que sont Engie et Total. Maintenant, il nʼy aura plus que Total », affirme Mathieu Storz.