Marc Aubergy, ancien président de l’association Latinissimo, est un compagnon de route de Bernard Aubert avec qui il a vécu toute l’aventure de la Fiesta des suds depuis ses débuts. Il rend ici hommage à son ami dans un texte publié sur Facebook qu’il nous a autorisé à reproduire. Le début d’une série d’hommage à Bernard Aubert, directeur artistique emblématique du grand festival musical de l’automne marseillais, décédé dimanche à l’âge de 72 ans.
Bernard Aubert : « je reviens » et.. tu revenais
Bernard, hier, dimanche 13 août tu es parti. Où ? On va le savoir… plus tard. Durant les 30 et plus éditions de la Fiesta des Suds, nous avions fréquemment ces échanges dans une conversation j’entendais d’un coup … « je reviens. » Et puis, plus tard tu revenais et on reprenait notre conversation et on trinquait. On échangeait nos inquiétudes pour la réussite de la soirée en cours et on évaluait le public, l’ambiance, la météo pour le lendemain. Après on dérivait sur un chanteur, une musique, un pays …et puis attend : « je reviens » et tu revenais.
Parcourant la foule ensemble, on saluait les têtes connues ou pas, on répondait aux questions, quelquefois aux sollicitations que tu ne savais pas refuser. Puis arrivait l’heure de la faim qui se traduisait par la sempiternelle formule « pour tenir toute la nuit faut manger. » Alors on commençait rituellement par les huitres, on les adorait tous les deux. Ensuite on débattait du menu de la soirée et des différentes cuisines du monde présentes sur le lieu, on goutait à tout. Quelquefois, on prenait le temps de s’asseoir à une table du restaurant éphémère avec l’espoir de parvenir à diner un moment dans le calme mais j’entendais : « commande comme toi et…je reviens. » Et …tu revenais… et on accélérait le repas parce que le concert allait commencer sur la grande scène et moi j’allais animer la Bodega.
Je me souviens la première fois où je mis de la musique à la Fiesta, c’était l’édition organisée à la Belle de Mai. On se croise et me propose de m’installer à des platines dans un coin sur le passage du public (la première mini-bodega) et de mettre la musique que je voulais en me disant : « je reviens. » Vers 2h du matin, tu es revenu tout satisfait de voir le monde danser devant une paillote.
Par la suite, dans longue liste des éditions suivantes j’ai eu le plaisir, le privilège de jouer chaque soir dans le lieu désormais Bodega devenu connue au fil des ans. Ce lieu de moins de 70 m2 a accueilli beaucoup de monde et parait-il du beau monde que tu amenais comme un passage obligatoire dans la Bodega. C’est d’ailleurs dans ce même lieu que tu m’as présenté le regretté Bernard Chérèze, directeur de la programmation musicale de Radio France qui adorait notre évènement. Nous avons trinqué et commencer à parler musiques avec lui et tu t’es excusé en nous disant : « je reviens. »
Trois décennies de souvenirs, d’amitiés, qui me resteront gravés à jamais
Deux heures plus tard, on échangeait encore avec Bernard et tu nous a séparé afin que notre passion soit déplacée sur d’autres sujets et nous avons trinqué. À propos de cette mythique Bodega, je me souviens de nous être retrouvés il y a trois ou quatre ans devant les décombres lors de sa démolition à coups de pelleteuse et on se regardait en pleurant intérieurement.
Voilà ces quelques exemples retenus à tes côtés mais bien plus que ceux-là, c’est trois décennies de souvenirs, d’amitiés, qui me resteront gravés à jamais. Alors, puisque depuis hier tu es parti sans me dire « je reviens » sache que je ne t’en veux pas et ne t’en voudrais jamais car je pense que tu vas revenir ou que l’on se retrouvera quelque part avec de la musique. Bernard, je te remercie de ce beau cadeau dans ma vie pour avoir connu et vécu de si grands et beaux moments et surtout de te compter parmi mes amis les plus proches et fidèles.
Marc Aubergy
Président de l’association Latinissimo
de 2015 à 2020