En propulsant l’ancienne locataire de Gérard Collomb place Beauvau à la tête d’un grand ministère des territoires (ministre de la Cohésion des Territoires et des Relations avec les Collectivités Territoriales), Emmanuel Macron et Edouard Philippe semblent montrer qu’ils ont entendu l’appel lancé par les collectivités locales. La nomination de Jacqueline Gourault intervient à un moment où les relations sont particulièrement distendues entre les élus locaux et le gouvernement. Le 26 septembre à Marseille, à la veille du congrès des Régions de France, les associations des maires, des départements et des régions avaient lancé un appel solennel à l’Etat. En juillet dernier, les trois grandes associations d’élus locaux (AMF, ADF et ARF) avaient claqué la porte de la conférence nationale des territoires. Parallèlement, depuis des mois, les représentants des élus locaux demandaient également à l’exécutif de simplifier son organisation avec les collectivités, pour s’adresser à un seul et unique interlocuteur. C’est chose faite.
La “Madame des collectivités”
La centriste, proche de François Bayrou (MoDem) était présentée comme « le couteau suisse du ministère de l’Intérieur » et « fait l’unanimité », selon les observateurs de tous bords. La « Madame des collectivités locales » travaillera avec l’ancien président du Conseil départemental de l’Eure et ex-secrétaire d’Etat auprès de Nicolas Hulot, Sebastien Lecornu, nommé ministre chargé des Collectivités territoriales. Julien Denormandie, secrétaire d’Etat auprès de Jacques Mézard, qui a quitté le gouvernement, devient ministre chargé de la Ville et du Logement.
Pour le député marseillais LREM Saïd Ahamada, à l’initiative d’un groupe de travail parlementaire sur la politique de la ville, « c’est l’une des plus belles surprises de ce remaniement. Le périmètre a également été remanié. Désormais le logement est clairement identifié et on reste aussi dans la continuité, on ne repart pas à zéro, puisque Julien Denormandie reste aussi sur ces thématiques. Il peut poursuivre le travail sur les copropriétés dégradées. Avant c’était plus flou, aujourd’hui, les ministres savent ce qu’ils doivent faire, de cette manière nous aurons peut-être une chance de réduire les inégalités sur certains territoires ».
Très honorée d’assumer, aux côtés de @SebLecornu et @J_Denormandie, un ministère au service même de l’amélioration du cadre de vie des Français. La tâche est exigeante mais passionnante. À pied d’œuvre, dès aujourd’hui, pour incarner la réconciliation des #territoires. pic.twitter.com/VOT0UcnMCj
— Jacqueline Gourault (@j_gourault) 16 octobre 2018
L’un des objectifs de Jacqueline Gourault sera de « faire de la pédagogie » et éviter que le dialogue de sourd ne perdure entre les élus de terrain et l’exécutif. Celle qui a gagné le surnom « d’agent traitant » du gouvernement auprès des élus semble faire consensus. « C’est une femme très ancrée dans les territoires de manière générale, affirme Saïd Ahamada. Une femme ouverte à la discussion, constructive, apaisante, elle connaît bien les élus et dispose d’une vraie expérience politique. C’est un atout pour les collectivités locales » estime-t-il. C’est d’ailleurs ce que semble penser Martine Vassal. En marge de la présentation de l’agenda environnemental, mardi 16 octobre, la présidente LR du Département des Bouches-du-Rhône et de la Métropole Aix-Marseille Provence place de grands espoirs en la ministre. « Je la connais car je suis allée la voir plusieurs fois, c’est une élue de terrain et elle a conscience du rôle des élu(es) locaux, et c’est une bonne chose », nous confiait-elle (lire par ailleurs), soulagée également qu’il ne faille pas tout reprendre à zéro. Renaud Muselier, président de la Région Sud, espère également que l’appel lancé par les collectivités territoriales a été entendu. Il sera « particulièrement attentif à ce que ce remaniement marque aussi la fin du processus de recentralisation en cours », écrit-il dans un communiqué.
Les Régions à la rencontre d’Edouard Philippe
Le gouvernement a envoyé mardi d’autres signes d’apaisement. Emmanuel Macron a reçu à l’Elysée Dominique Bussereau, président de l’Assemblée des départements de France, Hervé Morin, représentant de l’association Régions de France (RF) et Gérard Larcher, président du Sénat. Vendredi 19 octobre, les présidents des Régions doivent également rencontrer Edouard Philippe. Les discussions devraient porter sur le déblocage d’une disposition très technique sur la TVA intégrée dans la loi de Finances 2019 qui menace les recettes de l’année prochaine. Dominique Bussereau espère par ailleurs la reprise des négociations autour du financement des aides sociales.
Autre signe vers les territoires, dans son allocution télévisée; dans la soirée, Emmanuel Macron a également insisté sur le fait que « les maires sont porteurs de la République du quotidien.», demandant au gouvernement « de prendre des décisions vigoureuses afin que notre pays conserve cette maîtrise de son destin. Cela exige de ma part (…) comme de la part du gouvernement de l’écoute, du dialogue ».
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