L’ancien député (Renaissance) de la 6e circonscription s’est mis en retrait de la vie politique après sa défaite face à l’UDR Olivier Fayssat lors des législatives de juillet 2024. Toujours conseiller municipal d’opposition et élu au sein de la mairie des 9e et 10e arrondissements, fin connaisseur du système politique marseillais, il sort peu à peu de son silence et livre pour Gomet’ son analyse du contexte local, à treize mois des élections municipales de 2026. Pour l’heure éloigné de la stratégie d’union de la droite et du centre menée par Martine Vassal et Renaud Muselier, il dénonce un manque de méthode et presse les protagonistes de trouver leur incarnation.
Vous vous êtes fait discret depuis votre défaite aux législatives anticipées de juillet 2024. Qu’avez-vous fait ces derniers mois ?
Lionel Royer-Perreaut : J’ai pris du recul, ce qui me semble nécessaire lorsqu’on subit un échec. Pendant six mois, je n’ai rien fait d’autre que de m’occuper de moi, ce que je n’avais pas eu l’opportunité de faire en trente-cinq ans de vie politique. J’ai gentiment repris le travail de terrain dans mon secteur (le 9-10, ndlr) dans le courant du mois de décembre, dans les assemblées générales, les comités d’intérêt de quartier… J’ai repris le travail de proximité que je fais depuis plus de trente ans. J’ai écouté les attentes des gens en matière de politique locale et nationale. Le fait d’être un peu en retrait du prisme politique est intéressant car cela laisse une plus grande liberté d’expression.
Les municipales de 2024 sont dans treize mois. A droite, une stratégie d’union a été impulsée par Martine Vassal (DVD) et Renaud Muselier (Renaissance). Comment vous situez-vous dans cette configuration politique ?
L. R-P : J’ai personnellement toujours été favorable à l’unité, qui est nécessaire pour gagner une élection. Simplement, il faut garder à l’esprit qu’unité ne signifie pas qu’il y a uniformité dans les idées. L’unité n’est pas une fin en soi, elle doit s’installer dans la durée, et il faut pour cela accepter les différences des autres.
Sincèrement, on est très loin de ça aujourd’hui. Pour moi, aujourd’hui, il n’y a pas d’alliance. Il y a des négociations, des pourparlers, mais je ne vois aucune concrétisation. Il faut une méthode. Pour l’heure, j’ai surtout l’impression que chacun part de façon dispersée…
Il n’y a pas de méthodologie, ni d’incarnation. Il faut que ceux qui se situent aujourd’hui dans l’arc républicain du centre et de la droite et qui veulent partir au combat se positionnent clairement. Dans un second temps, il faut impérativement que les partis nationaux, à l’échelle des commissions nationales d’investiture, fassent part de leurs intentions.
« Le candidat de la droite et du centre doit être désigné avant l’été »
Nous sommes à treize mois des élections et on voit bien que du côté des autres partis, la campagne a commencé : Franck Allisio fait des propositions, bien qu’iconoclastes, pour le Rassemblement national, La France insoumise s’agite aussi… Le candidat de la droite et du centre doit être désigné avant l’été, afin de lui laisser le temps d’écrire un narratif avec la population. Et puis il y a l’aspect financier : une campagne coûte cher ! Il faut du temps pour réunir les soutiens financiers. Le temps commence à compter…
C’est pourtant la stratégie inverse qui a été choisie par Martine Vassal et Renaud Muselier : d’abord définir les idées et ensuite désigner l’incarnation …
L. R-P : Bien sûr, la ligne programmatique est importante mais qui peut croire que le programme ne soit pas le fruit de ce que voudra la tête de liste ? C’est de cette tête de liste que doit venir l’impulsion. Ce n’est qu’après qu’on agrège les idées des uns et des autres.
Il est clair que le contexte national est incertain et mouvant, avec la réforme de la loi PLM qui revient sur la table. Je peux comprendre qu’on temporise pour savoir quelles seront les règles du jeu. Pour autant, les jours passent. Dans les treize mois, nous aurons le premier tour des élections municipales. Marseille n’est pas une commune lambda, il s’agit de la deuxième ville de France. En 2020, nous étions sortants mais cette fois tout est différent : nous sommes challengers.
« J’ai une idée précise des gens avec qui je ne veux plus travailler »
Néanmoins, ferez-vous partie de l’union de la droite et du centre ? Quel rôle comptez-vous jouer dans cette élection ?
L. R-P : Cela dépendra de mes échanges avec les uns et les autres. Aujourd’hui, j’ai une idée précise des gens avec lesquels je souhaite travailler, ou plutôt de ceux avec qui je ne veux plus travailler … J’échange fréquemment avec Renaud Muselier, la communication est un peu plus compliquée avec Martine Vassal.
Pour le reste, il y a un enjeu dans cette ville : je ne partage pas du tout les orientations de la municipalité actuelle. Mais je ne doute pas que le bilan de Benoît Payan, aussi maigre soit-il, sera mis à son débit. En tant qu’opposants politiques, nous avons l’obligation ardente de redonner l’espoir et de créer des perspectives nouvelles.
La sociologie électorale de la ville a profondément évolué depuis la crise du Covid. Cela déstabilise le système actuel. La population est renouvelée soit par l’arrivée de néo-marseillais, soit par des migrations intra-muros, des Marseillais qui changent de secteur. ll faut être novateurs, se renouveler.
Cela signifie-t-il qu’il faut pousser sur le devant de la scène des néophytes en politique ?
L. R-P : Il faut un mix. On a bien vu avec le Printemps Marseillais ce que ça a donné de mettre en responsabilité des personnes nouvellement arrivées en politique : le temps qu’ils marquent leur empreinte, il a fallu quatre ans, sur un mandat de six ans c’est beaucoup … Une institution municipale est un paquebot très lourd à manœuvrer. Il faut une personne qui a déjà une connaissance fine du fonctionnement de l’institution.
« Il faut faire un sondage pour évaluer les différentes personnalités »
Pourriez-vous être cette personne ?
L. R-P : Il y a beaucoup de personnalités politiques qui pourraient aimer cette fonction et mener le combat. En ce qui me concerne, je ne peux pas répondre à cette question. Je le répète, ce sont les commissions nationales d’investiture qui doivent décider ! Ce qu’il faut d’abord, c’est un cadre, avec des personnes qui se positionnent. Il faut faire un sondage pour évaluer les différentes personnalités politiques qui pourraient y aller. Le dernier sondage en date (en décembre 2024 ndlr) ne prenait en compte que Martine Vassal pour la droite. Il faut d’autres sondages avec d’autres personnalités de la droite et du centre.
Vous avez évoqué la réforme de la loi PLM (qui sera examinée à l’Assemblée nationale le 20 mars prochain). En tant qu’ancien député, qu’en pensez-vous ?
L. R-P : Je trouve que le timing n’est pas des plus heureux… Cette réforme a été évoquée dès le début de la législature, j’ai participé à de nombreux groupes de travail dessus. Je suis favorable au principe « une voix = un électeur » mais à mon sens, il est surtout nécessaire de muscler le pouvoir des maires d’arrondissement.
C’est ce que les Parisiens ne comprennent pas, car leurs mairies d’arrondissement ont déjà beaucoup de pouvoirs qui leur sont délégués. Ce n’est pas le cas à Marseille. Il faut renforcer la politique de proximité, quitte à ce que cela se fasse de façon brutale « à la Trump » : au lendemain de son élection, le maire doit tout de suite transférer des pouvoirs aux mairies d’arrondissement.
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