La parenthèse fait du bien. Dans le théâtre des Bernardines, au coeur de la ville et de son animation bruyante, entre cours Lieutaud, Canebière et le cours Julien, la pièce offerte par Marie Ndiaye (écrivaine française, prix Femina en 2001 pour son roman Rosie Carpe, puis le prix Goncourt en 2009 pour Trois femmes puissantes) aux spectateurs de la cité phocéenne nous évade loin.
Le récit incarné par un huis clos à deux têtes (Nathalie Dessay et Anne-Laure Régla) puise en effet ses racines à Cuba où est née la chanteuse Maria Martinez. Ce personnage est devenu l’obsession de l’universitaire jouée par Nathalie Dessay qui souhaite écrire une biographie mais qui peine à avancer dans son travail. Un mail envoyé par une certaine Marie Sachs lui demandant où en est l’écriture de son ouvrage va ajouter à son trouble. D’autant que Marie Sachs a de quoi intriguer.
La rencontre entre les deux femmes se joue au spectacle. Les monologues successifs, ponctués par les performances de l’artiste, sorte de réincarnation de Maria Martinez, sont autant de divagation et de questionnements sur la différence, la distance dans le temps et l’espace. Faut-il y voir les propres difficultés de l’auteur de la pièce Marie Ndiaye née en France et d’origine africaine par son père. « Je regrette depuis toujours de ne pas avoir de double culture alors que j’étais dans une situation idéale pour l’avoir», expliquait-elle à l’hebdomadaire Jeune Afrique en 2009. « Je n’ai pas eu une enfance africaine, je ne l’aurai jamais. À 42 ans, il est trop tard pour acquérir une double culture. Aujourd’hui, j’ai plutôt conscience de ce que c’est de ne pas en avoir, de ce que représente un métissage tronqué dont on n’a que les apparences. ».
Malgré ces identités et parcours si différents, incarnés par le jeu très juste des deux comédiennes, on finit par croire à un possible rapprochement, chacun conservant son identité propre. Un beau spectacle onirique, avec décor, musique et mise en scène (Blandine Savetier) choisis, qui nous ramène bien concrètement aux difficultés du dialogue dans nos sociétés contemporaines. Et à la puissance du récit comme créateur de liens.
Informations pratiques
Théâtre Les Bernardines. 17 Bd Garibaldi, 13001 Marseille
Jusqu’au samedi 22 mars à 20h sauf le 20 mars à 19h
Samedi 16 mars à 15h et 20h.
Réservation