Lors de notre premier reportage chez Provence Studio, il y a un peu plus de quatre ans, les entrepôts du technopôle de Caronte n’étaient que des murs attendant leur reconversion. Aujourd’hui, les studios de cinéma sont bel et bien installés. « On dispose en tout de 26 000 m². Notre plus grand studio s’étend sur 2 000 m². Pour vous donner une idée de comparaison, les studios dans lesquels est tourné Plus belle la vie font 2 100 m² », met en avant Olivier Marchetti, président et fondateur de Provence Studios.
Le plus grand studio de @ProvenceStudios mesure 2000 m2. Il accueille régulièrement tournages en tout genre (films, séries, clips…). C’est notamment ici que le film #GastonLagaffe, sorti en 2018, a été tourné pic.twitter.com/6cuTUpIBr4
— Gomet’ (@Gometmedia) 30 janvier 2019
Le panel de services que proposent les studios martégaux est large pour les producteurs. Dans ce fameux hangar géant de 2 000 m² se trouve un fond vert XXL de 50 mètres de long par 9 mètres de haut. À l’extérieur, une zone est réservée pour les cascades – et a notamment servi pour réaliser toutes celles du cinquième volet de la saga Taxi. Une autre, grâce à un fond bleu ou vert, permet de reconstituer des rues ou un quartier à ciel ouvert. « C’est de plus en plus demandé par les productions, car aujourd’hui, beaucoup de villes ne souhaitent pas que certaines scènes soient tournées en milieu réel. Ça évite aussi aux équipes de retrouver des moments du film sur internet avant sa diffusion », précise Olivier Marchetti. Pour compléter le tout, les locaux disposent d’un studio de motion capture, de post production et même de salles prêtes à tourner avec décor de prison et de morgue. « On a toute la chaîne présente sur le site pour qu’un producteur ait les clefs en main de A à Z pour réaliser son projet ».
Une productivité qui fait la différence
L’année 2017 a marqué un tournant pour Provence Studios, avec le tournage du film Gaston Lagaffe. « Normalement, il n’y a pas de films français tournés en studio en France. C’est fait à l’étranger car les coûts sont plus intéressants pour les producteurs », reconnaît Olivier Marchetti. C’est pourtant Martigues que la société de production UGC Images (celle de Gaston Lagaffe) a choisi, même si la facture de Provence Studios était un peu plus élevée que les autres. Pour l’occasion, 200 personnes ont travaillé pendant trois mois sur le site. Dans le studio géant, 800 m² de bureaux reconstitués s’y sont installés. Et ont ainsi engendré sept millions d’euros de retombées économiques directes pour le territoire. « Grâce à notre productivité, on arrive à être compétitif par rapport aux structures des autres pays. Ça vient aussi des avantages de la région, qui permet aux productions d’avoir accès à de nombreux sites variés facilement : des vignes, des montagnes, des quartiers… ».
Via le tournage de Gaston Lagaffe, Provence Studios s’est fait connaître bien au-delà des frontières provençales. L’année 2019 devrait notamment voir arriver dans les locaux martégaux les équipes d’Olivier Marchal pour son film Bronx. « Gaumont a annoncé le tournage dans le sud et on est en bonne voie pour en récupérer une partie ». Trois autres films français sont aussi programmés et un américain. Une première. « C’est une filière qui est en train d’exploser », se réjouit Olivier Marchetti. Netflix va par exemple lancer sept nouveaux projets cette année en France pour plusieurs millions d’euros. Provence Studios espère que ses atouts sauront convaincre l’entreprise américaine de venir tourner dans ses locaux. « Pour faire leur choix, les productions américaines nous demandent en premier lieu si on est stable, si on a des équipes formées et des jolis décors ». Provence Studios réunis aujourd’hui tous ces critères.
Accentuer la prise de conscience politique
En quatre ans, Provence Studios a su se tracer un joli chemin. Mais rien n’est acquis, et Olivier Marchetti en a bien conscience. « Il faut avoir une taille critique pour peser sur la scène internationale. On n’a pas envie de partir d’ici, d’autant plus qu’on a tout pour réussir. Mais il faut qu’on en ait tous envie et qu’on pousse tous dans le même sens », souligne-t-il, à l’attention des différents élus martégaux et métropolitains venus dans ses locaux pour une visite, mercredi 30 janvier.
Pour le chef d’entreprise, les sphères politique et entrepreneuriale doivent s’emparer de la filière cinématographique à bras-le-corps. C’est déjà le cas, mais encore trop faiblement selon lui. Il prend pour exemple le fait que deux séries récentes – Demain nous appartient, diffusée sur TF1, et Un si grand soleil, sur France 2 – ont choisi la région Occitanie comme lieu de tournage. « Il n’y a pas eu assez de subventions et de moyens pour les accompagner », pointe Olivier Marchetti.
Gaby Charroux, maire de Martigues, reconnaît que le domaine cinématographique, qu’il qualifie « d’atout du territoire », a « encore besoin d’impulsion ». La présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence, Martine Vassal, a également souligné l’importance de développer cette filière, en complémentarité du travail effectué depuis plusieurs années à Marseille. La cité phocéenne s’est en effet imposée comme une terre prisée des tournages. Elle en a accueilli 480 en 2018 et a été impactée plus faiblement qu’au niveau national par la baisse du nombre de réalisations (-30% de tournages en France entre 2017 et 2018 contre -5% à Marseille).
Didier Parakian, président de la commission économie de la Métropole Aix-Marseille-Provence, a voulu rappeler que l’institution planche actuellement avec la Chambre de Commerce et d’Industrie Marseille Provence (CCIMP) sur la création d’une mission métropolitaine du cinéma, à l’instar de celle de Marseille. Objectif : mettre en place des mesures en corrélation avec les besoin des professionnels de ce secteur. Parmi elles, l’élu note la nécessité d’un centre de logistique pour stocker les décors ou d’un studio à ciel ouvert. « Il faudra aussi faire un gros effort sur l’internationalisation », glisse Olivier Marchetti.