D’ici 2035, la vente de voitures thermiques neuves sera interdite dans l’Union européenne. Mais ces véhicules à essence ou diesel ne sont pas obligatoirement destinés à la casse : il est possible de les transformer en véhicules électriques, grâce au rétrofit. Depuis 2020, le Gouvernement, conscient de l’intérêt de cette pratique, a commencé à mettre en place des aides financières pour les particuliers et entreprises. A Venelles, l’entreprise Qinomic en a fait son fonds de commerce et souhaite accélérer le développement du rétrofit.
Fondée en 2020 par Frédéric Strady et Jean-Pierre Labroue, l’entreprise travaille depuis à la mise au point de technologie permettant d’égaler quasiment la performance d’un véhicule électrique neuf. Pour cela, elle a noué un partenariat avec des constructeurs comme Stellantis (ex-PSA), soucieux de transformer leur flotte thermique en amont de 2035, mais aussi avec d’autres acteurs locaux comme le Méhari club de Cassis. En juillet 2023, l’entreprise a effectué sa première levée de fonds auprès du concessionnaire marseillais De Willermin, dont le montant n’est pour l’heure pas précisé. Une deuxième phase de la levée de fonds doit avoir lieu au premier trimestre 2024 pour atteindre, en tout, les six millions d’euros. D’autres opérateurs pourraient se joindre à De Willermin. « En fonction des participants à la levée de fonds, nous espérons peut-être aller au delà des six millions d’euros » confie Frédéric Strady, aujourd’hui directeur général de Qinomic.
Une nouvelle branche de Qinomic pour lancer la commercialisation
Avec ce montant, Qinomic prévoit en tout cas de lancer la commercialisation de son offre rétrofit, au travers de la nouvelle branche Qinomic mobilities – Qinomic devenant une holding. Dans un premier temps, à l’horizon de la fin 2024, Qinomic se concentrera non pas sur la vente de véhicules entiers mais sur la commercialisation des composantes permettant le rétrofit tels que les packs batteries ou les calculateurs.
« La mobilité vit une révolution dans ses usages. Nos enfants ne consommeront pas la mobilité comme nous » projette Frédéric Strady. Pour ce qui est de la demande « on observe que les parts de marché des véhicules électriques et hydrogène augmentent considérablement, alors que sur le plan technique nous n’en sommes qu’à la Préhistoire » poursuit-il.
La technique du rétrofit est en effet complexe, dans la mesure où un véhicule thermique n’a pas vocation, initialement, à devenir électrique. Le directeur général de Qinomic file la métaphore anatomique : « On ne se contente pas de changer le cœur, c’est-à-dire la batterie. Il faut aussi revoir tout le système neuronale en changeant la chaîne de traction et le système électronique, pour redonner de l’intelligence au véhicule. »
A terme, Qinomic espère accélérer l’évolution vers l’électrique et se projette déjà dans l’étape d’après : le rétrofit hydrogène … Pour l’heure, l’entreprise, qui lance tout juste sa commercialisation, poursuit son développement et prévoit de recruter pour atteindre une trentaine de salariés à la fin 203, répartis sur ses trois sites de Venelles, Dieppe et Paris.
Lever les freins au rétrofit
En juillet dernier, l’entreprise recevait au sein de son siège à Venelles le député Renaissance de la huitième circonscription des Bouches-du-Rhône et président de la commission développement durable à l’Assemblée nationale Jean-Marc Zulesi, venu apporter son soutien. « [Il] promet de nous inclure dans le projet de loi finances de 2024 » relate Frédéric Strady. Selon le co-fondateur de Qinomic, la règlementation, qui date de mars 2020, commence déjà à être dépassée : « Le rétrofit pour le rétrofit, ça n’a pas de sens. Il faut être capable de massifier », estime ainsi Frédéric Strady.
Alors que la Chine part à l’assaut du marché de la mobilité électrique neuve, le rétrofit peut être une solution pour la France afin de se démarquer. En outre, si le passage à l’électrique via le rétrofit permet d’améliorer la qualité de l’air, son intérêt est également économique : selon Frédéric Strady, un véhicule upcyclé coûterait ainsi « moitié moins cher » qu’un véhicule électrique neuf, en comptabilisant notamment les primes à la conversion.
« Le gouvernement a la volonté d’avancer sur la mobilité décarbonée, c’est pourquoi nous nous intéressons aux entreprises comme Qinomic ou encore Solution F, sur le même territoire. C’est une priorité du ministère de l’Industrie comme de celui de la Transition écologique » explique le député Jean-Marc Zulesi, contacté par Gomet’. Il reconnaît une nécessaire évolution de la règlementation : « On doit pouvoir simplifier et fluidifier l’homologation des véhicules. Il y a des exigences de sécurité que nous ne pouvons pas occulter. » Des arbitrages seraient également en cours pour inclure le rétrofit dans le prochain projet de loi de finances, ajoute le président de la commission du développement durable : « Il faut aussi que nous soyons en capacité d’accompagner davantage financièrement les particuliers comme les entreprises. » Le projet de loi finances sera présenté début octobre 2023.
Liens utiles :
> Tout savoir sur le rétrofit électrique | Ministères Écologie Énergie Territoires (ecologie.gouv.fr)
> Le site de Qinomic
> Notre rubrique économie
> Emmanuel Macron à Marseille : Jean-Marc Zulesi espère des annonces sur Aix-Rognac