Du 9 au 22 octobre derniers a eu lieu la 34e édition des semaines d’information sur la santé mentale (SISM), dans toute la France, sous la thématique, « à tous les âges de la vie, ma santé mentale est un droit.»
À l’occasion de cet événement, nous sommes partis à la rencontre d’une association qui propose à tous types de public, des séances de médiation animale. Une manière de prendre soin de sa santé mentale autrement. Une méthode pour aider à l’épanouissement personnel parmi d’autres, encore pas totalement approfondie par les chercheurs et psychiatres mais qui se développe et conquis de plus en plus les particuliers et instituts de soin.
Les animaux, ces thérapeutes à quatre pattes
Marine Presti exerce en tant que médiatrice animale depuis 2019 pour son association Anim’O à Peypin. La jeune femme intervient auprès des jeunes enfants, dans les centres pour adultes présentant des troubles mentaux et dans les maisons de retraite autour d’Aix-en-Provence et de Marseille. Elle anime des ateliers de une heure / une heure et demie et ses collègues de travail sont … des lapins, cochons d’inde, poules, chien et lézard ! Des animaux récupérés pour la majorité à la suite d’abandon. Le temps d’un atelier, ses animaux quittent la ferme et partent à la rencontre de leurs patients humains. Marine pratique la médiation animale, elle supervise une relation d’aide à visée préventive ou thérapeutique alliant l’humain et l’animal. Un temps déconnecté du monde qui réveille ce qu’il y a du plus beau en chacun : l’empathie, la bienveillance, l’affection.
« Moi j’appelle ça le pouvoir des animaux, il suffit de prononcer le mot “animal” pour les résidents soient émerveillés » – Ahmed, animateur dans la Résidence EPHAD Les Jonquilles dans le 13e arrondissement de Marseille.
Depuis quelques mois, tous les 15 jours, Marine pose ses cages de transport et fait sortir ses animaux dans la grande pièce à vivre de la maison de retraite, au plus grand plaisir de ses résidents. Le long d’une grande table, les animaux se promènent de personne en personne et viennent apporter lot d’affection et de rires. Pendant ce temps, Marine, leur propriétaire, surveille et échange avec les patients. « Les résidents nouent de véritables liens avec les animaux, c’est assez magique à observer, ils leur donnent des noms et les voient grandir » raconte la médiatrice, déposant un lapin sur les genoux d’une résidente. « Les personnes âgées se retrouvent souvent seules, alors les animaux apportent du confort et de la joie dans leur semaine. J’en surprends parfois certains à parler aux boules de poils et de plumes » surenchère Ahmed. « Il y a une dame dans une maison de retraite qui souffre de dépression et pleure toute la journée, lorsque les animaux viennent à son chevet elle respire à nouveau » raconte Marine.
Les effets positifs de la médiation animale pour les personnes autistes
L’autre public de Marine c’est aussi les enfants et adultes handicapés. Depuis quatre ans, l’établissement Georges Flandre, un foyer d’accueil médicalisé de 42 places destiné à accueillir des personnes handicapées mentales à partir de 40 ans, présentant des signes de vieillissement précoce, a noué un lien fort avec la médiatrice animale.
« L’animal produit un sentiment d’amour inconditionnel et ne juge pas »
Yollande attend de pied ferme l’arrivée de Marine, à peine la voiture de l’animatrice stationnée, la patiente de l’établissement vient prêter main forte pour transporter les animaux, affichant son plus beau sourire, « habituellement elle reste dans son coin, là elle s’ouvre aux animaux et aux autres, elle attend ce rendez-vous qui l’apaise » analyse la psychiatre de l’établissement. « C’est un moment agréable ou les patients se sentent apaisés » affirme une aide-soignante présente à l’atelier. Les résidents sont habitués aux animaux, mais chaque atelier apporte son lot de surprises, aujourd’hui Marine est venue présenter aux patients de la résidence son lézard pogona, « c’est super intéressant parce que cet animal fait vaincre les peurs, l’appréhension, ça intrigue puisque au toucher le lézard a plusieurs textures, tout le sensoriel est stimulé ». Le petit lézard intrigue Michel qui pose alors des tas de questions à Marine sur la spécificité de la bête qu’on lui tend, « c’est une espèce qui vient d’Australie » lui explique Marine. Après avoir caresser, nourrit cochons d’inde et lapins, les résidents coopèrent pour rentrer les animaux dans leurs cages de transport et nettoyer la table, parce qu’au-delà d’aimer les animaux il faut aussi savoir en prendre soin…
Cela ne fait qu’une dizaine d’années que les études sur la médiation animale et ses bienfaits sur les personnes atteintes de troubles mentaux est documentée par la science. Les chercheurs ont posé l’hypothèse que le contact humain-animal permettrait de diminuer le stress, d’améliorer la réponse sociale (conscience sociale, communication et motivation) et de réduire la dépression et l’anxiété surtout chez les personnes autistes. Pourtant les animaux sont utilisés par les médecins dès le 19e siècle. Florence Nightingale, fondatrice des moyens infirmiers modernes accompagnait ses séances thérapeutiques de la présence d’une tortue et observa une diminution du stress chez ses patients en présence de l’animal. À New York, après la Première Guerre mondiale, les soldats traumatisés retrouvaient un sentiment de bien-être grâce aux chiens…
La zoothérapie moderne voit ses racines en 1953 lorsque le psychiatre américain Boris Levinson emmène son chien Jingles lors d’une séance avec un jeune patient autiste. L’enfant, incapable de communiquer avec le monde extérieur jusque là se prit d’affection pour le chien et se mis à s’exprimer . La “Pet Facilitated Psychotherapy” vit le jour.
Un train de vie pas comme les autres
Marine travaille depuis plus de quatre ans dans la médiation animale, c’est sa vocation. Cette vie professionnelle particulière, au contact tous les jours d’animaux fait qu’aujourd’hui près de 60 animaux vivent au sein de sa mini-ferme. De quoi permettre aux animaux d’avoir des temps de repos entres les ateliers de médiation.
La jeune femme n’est pas thérapeute mais a pu apprendre grâce à sa formation et son expérience à accueillir tous types de public et d’handicap dans presque n’importe quel lieu, faisant d’elle une bienfaitrice dans la vie de ses clients. « Du moment où les animaux sont là les personnes font plus attention, à ce qu’ils font, aux animaux mais aussi entre eux, les animaux réveillent tout ce qu’il y a de plus humain en nous » explique la jeune femme, riche de ses quatre ans de méditation animale. Marine nous informe que des séances sont aussi organisés avec des poneys, “l’équithérapie”, « un moment de partage incroyable ou on fait monter l’animal dans les chambres, au contact direct des personnes alitées ». Une aventure humaine que la jeune femme compte bien poursuivre et développer…