Comme un symbole, Caroline Pozmentier, l’adjointe à la sécurité à la mairie de Marseille, a choisi le vendredi 25 mai, jour de l’entrée en vigueur du règlement général de la protection des données (RGPD), pour présenter sa plateforme « Big data » de protection de la tranquillité publique. Le principe : croiser les données détenues par la municipalité et ses potentiels partenaires (opérateurs téléphoniques, hôpitaux, police nationale…) pour anticiper d’éventuels troubles publics.
Un algorithme pour évaluer les risques et la réponse
Ineo Digital, filiale du groupe Engie, a développé pour la mairie un algorithme qui permet d’évaluer le niveau de risque d’une situation et la bonne adéquation du dispositif de réponse. Lancé en 2015, ce projet prend aujourd’hui une forme concrète avec les premières images dévoilées de l’application qui sera utilisée par les services de la mairie. Elle se présente sous la forme d’un agenda où chaque jour est estampillé d’une couleur verte, orange ou rouge en fonction du niveau de risque. Celle-ci dépend de plusieurs facteurs : nombre d’événements prévus, travaux en cours, météo, accidents… En croisant, l’ensemble de ces données, l’algorithme attribue une note de dangerosité allant de 1 à 10. En face, la mairie enregistre tous les dispositifs déployés pour parer aux éventuels problèmes (déploiements d’agents, de force de l’ordre, déviation des voies de circulation…) et la machine calcule ainsi un pourcentage d’adéquation de la réponse. « Attention, il ne s’agit que d’un outil d’aide à la décision. On ne va pas se laisser phagocyter par un algorithme. Ce n’est pas non plus un outil prédictif du crime. Grâce à l’intelligence artificielle, on pourra simplement mieux encadrer la gestion de l’espace public », prévient Caroline Pozmentier.
Pour le moment, le logiciel n’utilise que les données dont la mairie est propriétaire : emplacement des marchés, police municipale, grands évènements, centre de supervision urbain… Mais très vite, la municipalité espère l’enrichir des données de partenaires. Elle espère ainsi convaincre les opérateurs téléphoniques (Orange et SFR) de participer pour connaître en temps réel le nombre de téléphones connectés sur une zone. L’AP-HM est également ciblé pour avoir des informations sur le nombre d’entrées aux urgences. Enfin, les marins-pompiers et la RTM seraient également intéressés. La mairie espère signer les premières conventions de partenariats dans le courant de l’été pour pouvoir intégrer rapidement ces nouvelles données. Un premier test sera effectué à la rentrée sur trois cas d’usages : la sécurisation de l’espace public, la fluidité de la circulation et l’activité touristique sur le littoral.
Big Data ou Big Brother ?
L’utilisation de ces données pose évidemment un certain nombre de questions relatives aux libertés publiques. « Sur notre plateforme, nous n’utilisons que des données anonymisées », assure Caroline Pozmentier. Elle a choisi de faire cette présentation le même jour que la mise en place du RGPD pour affirmer que la mairie respecter toutes les règles imposées par la loi dans ce domaine. Elle a ainsi désigné un délégué à la protection des données qui devra valider toute nouvelle modification de son application. Elle réalisera également des études d’impact sur la vie privée comme le préconise le nouveau règlement. Enfin, la plateforme sera pilotée par une équipe municipale dédiée qui sera la seule à avoir accès au système.
Aujourd’hui, l’application développée par la mairie s’attaque à la sécurité des espaces publics mais Caroline Pozmentier espère élargir son usage à toute la politique de la Ville : « On peut très bien imaginer demain se servir de cette intelligence artificielle pour améliorer la mobilité, la propreté ou encore l’urbanisme à Marseille », avance-t-elle.
Liens utiles :
> Gomet’ Premium : [Sécurité] Comment Marseille veut donner du sens à ses données
> Caroline Pozmentier : « Marseille a réussi à se tailler une place de ville innovante en matière de sécurité »