Après quinze ans de recherche et développement, SP3H passe à l’étape industrielle. Soutenue à hauteur de 600 000 euros par le Plan de relance et l’Ademe, la société aixoise va monter son propre atelier de fabrication de capteurs optiques sur le Technopôle de l’Arbois. Elle investit 1,3 million d’euros pour une installation capable de sortir 5 000 unités par an au départ et 10 000 à terme. « Nous monterons en puissance progressivement en fonction des commandes », explique à Gomet’ le fondateur de SP3H Alain Lunati. La première partie sera opérationnelle au printemps prochain pour répondre à la demande croissante des clients.
Mercedes-Benz et Man équipent leurs camions
Cette décision fait suite aux premiers gros contrats avec des constructeurs de véhicules. Mercedes-Benz Trucks et Man viennent de passer leurs premières commandes. Le premier contrat porte sur 5 000 capteurs par an et le second « sur un nombre conséquent » se contente d’indiquer le patron. Les poids lourds sont particulièrement intéressés par la solution de SP3H qui garantit la composition moléculaire des biocarburants. L’Etat français vient de transposer la directive européenne 2019/1161 qui autorise les poids lourds à rouler avec 100 % de biocarburant en contrepartie d’avantages fiscaux qui peuvent monter jusqu’à un sur-amortissement de 140 %. « Pour bénéficier de ces aides, ils doivent prouver à l’Etat que leurs véhicules utilisent exclusivement des biocarburants et notre capteur peut apporter cette preuve », affirme Alain Lunati.
Un analyseur de carburant miniature
La technologie de SP3H est issue du monde de la pétrochimie. Dans les années 90, les équipes de BP à Martigues ont développé des scanners optiques capables de donner la composition exacte des carburants en quelques minutes. SP3H s’est contenté de les miniaturiser. « A l’époque, c’était des machines de 1m50 de haut pesant 200 kg au moins. Notre boitier ne fait que quelques centimètres et s’intègre facilement aux moteurs », raconte le dirigeant.
Sa Fluidbox, homologuée l’été dernier par l’Union technique de l’automobile et cycle (Utac), se place entre le réservoir et le moteur et envoie à l’ordinateur du véhicules la composition du carburant utilisé. « Si une impureté est détectée, le chauffeur est averti par un voyant sur le tableau de bord puis la puissance du véhicule est carrément diminuée si rien n’est fait. Ce système est déjà utilisé pour l’Adblue qui limite les émissions de Nox », explique Alain Lunati. Le prix a également été divisé par dix pour arriver à un produit d’un peu plus d’un millier d’euros.
Une vingtaine de recrutement d’ici 2024
Pour y parvenir, l’entreprise a investi 20 millions d’euros depuis sa création en 2005 dont 12 millions levés auprès d’investisseurs privés comme le fonds Truffle Capital, son actionnaire historique, et plusieurs business angels. SP3H a également bénéficié de beaucoup d’aides publiques comme le fonds Instrument PME de l’Europe qui lui a octroyé un financement de 1,2 million d’euros en 2018. « C’est ce qui nous a permis de finaliser notre prototype », précise Alain Lunati.
Aujourd’hui, SP3H emploie une dizaine de salariés dans ses locaux de l’Arbois. Pour installer son atelier de fabrication, l’entreprise va prendre 500 mètres carrés supplémentaires sur le Technopôle et prévoit de recruter une vingtaine de personnes dans les trois prochaines années. Ces embauches concernent des techniciens mais aussi des commerciaux pour vendre sa solution sur le marché international.
Des grosses commandes attendues en 2022
Si la filière poids-lourds s’est montrée la première intéressée, elle n’est pas le seul débouché pour SP3H. « On a fait des tests pour les laiteries et les fabricants d’huiles pour l’aéronautique. Notre technologie peut analyser n’importe quel composé liquide carboné », indique le patron. Aussi, sa Fluidbox est actuellement en test chez de grands groupes de l’énergie, des industriels et des fabricants de machines agricoles. « Pour les gros tracteurs, l’électrique ne permet pas d’offrir une alternative écologique suffisamment puissante, note-t-il. Aussi, il faut leur permettre d’utiliser des biocarburants ». Ses prospects les plus chauds sont essentiellement en Europe du Nord : Royaume-Uni, Allemagne et Scandinavie. Mais les Etats-Unis, l’Asie et le Moyen-Orient s’intéresse de plus en plus à sa technologie : « Il faudra peut-être ouvrir des bureaux sur ces continents si le business se développe », avance Alain Lunati.
Si tout se déroule comme prévu, SP3H devrait enregistrer de nouvelles commandes dans le courant de l’année, de l’ordre de plusieurs milliers d’unités. Son objectif est de dépasser le million d’euros de chiffre d’affaires en 2022 et d’atteindre les 8 millions en 2025.
Lien utile :
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