Déjà reliée à deux corridors de transports européens, Marseille veut inscrire un nouveau tronçon jusquʼà Gênes dans la carte stratégique des axes de lʼUnion pour faire financer ses grands projets notamment ferroviaires.
En 2013, la Commission Européenne a dessiné la carte des neuf principaux corridors qui formeront la charpente des transports au sein du marché de lʼunion. Aux portes de lʼEurope du Sud et de lʼAfrique, Marseille est reliée à deux de ses axes stratégiques : le corridor Mer du Nord-Méditerranée et le corridor Méditerranéen. Le premier sʼétend du nord du Royaume-Uni jusquʼà Marseille en passant par le Benelux et Lyon. Le second relie la péninsule ibérique à la frontière entre la Hongrie et lʼUkraine en passant également par Marseille et Lyon. A lʼoccasion de la conférence organisée par la Ferrrmed (lʼassociation de promotion du grand axe ferroviaire de marchandises Scandinavie-Rhin-Rhône-Méditerranée occidentale) à lʼhôtel de Région mardi 12 décembre, le Grand Port Maritime de Marseille-Fos et le Conseil régional Paca ont demandé une extension du corridor Méditerranéen entre Marseille et Gênes qui permettrait de relier Marseille à un troisième axe prioritaire, le corridor Rhin-Alpes.
Une manne financière pour les grands projets ferroviaires
Cet appel commun des acteurs locaux intervient à quelques mois dʼun ajustement prévu par Bruxelles de la carte de son réseau transeuropéen de transport (RTE-T). Si les fameux corridors nʼexistent pour certains que sur le papier, ils ont vocation à capter les investissements de lʼUnion. Ces corridors sont la référence pour la sélection des projets qui sont cofinancés par lʼEurope. Les fonds destinés à lʼinfrastructure de transport sur la période 2014-2020 atteignent les 26 milliards dʼeuros. Les enjeux financiers sont donc très importants pour Marseille et la région Paca. « Il est urgent de moderniser nos infrastructures de transports comme la gare Saint-Charles qui est saturée et la participation de lʼEurope est indispensable », insiste Philippe Tabarot, le vice-président délégué aux transports de la région Paca. Il espère capter de nouvelles aides européennes pour des grands projets comme la Ligne Nouvelle. Cette dernière, dont le coût est estimé à 7,5 milliards dʼeuros, pourrait grâce à lʼextension du corridor entre Marseille et Gênes recevoir plus dʼun milliard dʼeuros dʼaide. A noter que la Ligne Nouvelle Paca a déjà obtenu un soutien de 5,7 millions dʼeuros de Bruxelles pour le financement des études.
Le report de la route sur le rail, un enjeu économique et écologique
Le report modal de la route vers le ferroviaire est au cœur des enjeux exprimés par les professionnels du transport à lʼHôtel de Région. Ce sont 100 000 camions chaque jour qui circulent sur les routes de Paca et lʼimpact écologique est dramatique. « La commission a dʼailleurs engagé un contentieux contre la France pour le respect des normes de qualité de lʼair et quatre des métropoles pointées du doigt sont en Paca, rappelle Raphaëlle Simeoni, directrice générale transports, mobilité, grands projets à la Région. Nous pensons que le report sur le ferroviaire est une bonne solution pour réduire les émissions de CO2 mais il faut que lʼUnion nous aide », ajoute-t-elle.
Pour le Grand Port Maritime de Marseille, lʼinscription du barreau manquant entre Marseille et Gênes au corridor permettrait de développer le ferroutage pour le fret vers lʼItalie. A l’heure actuelle, la solution ferroviaire représente 10 % du transport de conteneurs à partir du port de Marseille « et nous pourrions aujourdʼhui faire trois fois plus », estime Christine Cabau-Woehrel, la directrice du GPMM. Le port a dʼailleurs lancé une vaste opération de modernisation de son réseau. Il sʼapprête à lancer le volet concernant les bassins ouest en 2018 pour un investissement de plus de 15 millions dʼeuros. « Maintenant, il faut réfléchir à de nouvelles solutions dʼamorçage pour des projets dʼexploitation au niveau de lʼUnion Européenne. Pour les opérateurs, lʼamorçage est une étape délicate, ils doivent être soutenus. Avant il y avait le dispositif Marco Polo qui a disparu. Jʼattends de nouvelles solutions de soutien de lʼUnion », lance la directrice du port.
Les négociations sont officiellement lancées avec Bruxelles pour obtenir un soutien plus important pour les transports de Provence-Alpes-Côte dʼAzur. Si la région et le port multiplient les opérations de lobbying auprès de Bruxelles, « cʼest le gouvernement qui viendra au final donner ses priorités à la commission, rappelle Frédéric Versini, responsable du projet RTE-T à la direction générale mobilité et transport de la commission européenne. Les acteurs locaux doivent donc dʼabord convaincre Paris de les soutenir. Ensuite, viendra le temps démocratique européen avec une proposition au parlement de la nouvelle carte des corridors prévue en mai prochain.