Gomet’ accueille régulièrement des tribunes (*) de personnalités et autres contributeurs extérieurs. Aujourd’hui, nous diffusons le texte de Gérard Blanc. Avocat, citoyen engagé, il est animateur des comités de La République en marche dans les 13e et 14e arrondissements de Marseille. Il livre ici une vision désenchantée des élections municipales à Marseille auxquelles il n’a pas participé après son désaccord sur les choix des têtes de liste de son mouvement. Pour autant, Gérard Blanc ne veut pas baisser les bras. Il livre ici les conditions qui pourraient selon lui éclaircir un peu le débat. Il s’apprête aussi à lancer un think tank baptisé Repensons Marseille.
Tout allait changer, rien ne serait plus jamais pareil à Marseille. On allait voir ce qu’on allait voir ! Une sorte de « monde d’après » d’avant le monde d’aujourd’hui. Et puis, dans une vapeur de gel hydroalcoolique, l’élection municipale la plus bizarre de l’histoire a accouché d’une souris. Ou plutôt
d’une poignée de rongeurs se débattent autour d’un même fromage. Des souris des villes qui aiment le béton et des mulots des champs qui aiment les arbres, des souris de laboratoire prêtes à tout expérimenter et même un spécimen brun -habituellement agressif- qui attend cette fois patiemment
dans l’ombre pour ramasser le fromage.
Sans verser dans la science populaire, une spécialité pourtant très à la mode en ce moment, les rongeurs ne sont pas des animaux particulièrement collaboratifs. Le spectacle de leur danse d’avant second tour n’est donc, logiquement, pas très réjouissant.
Pourtant il est beau notre fromage, Marseille. Il mériterait que les souris collaborent. Pas pour partir chacune de son côté avec un petit morceau, à toi le sud, à moi la croute, mais pour faire vivre enfin une solidarité plus que jamais nécessaire entre tous les Marseillais.
Or, chacun aujourd’hui s’imagine faiseur de roi, chacun y va de sa stratégie, de son alliance de circonstance, de sa tactique de troisième tour ou de sa déclaration de quatrième mi-temps. Tous ont à la bouche le mot rassemblement. Aucun pourtant ne s’accorde sur qui mérite d’y participer, encore
moins sur qui doit en prendre la tête.
Il n’y aura donc pas de majorité naturelle au soir du 28 juin, c’est du reste le résultat logique de vingt cinq années d’une politique de fracturation systématique de la population en clientèles distinctes.
Gérard Blanc
Il n’y aura donc pas de majorité naturelle au soir du 28 juin, c’est du reste le résultat logique de vingt cinq années d’une politique de fracturation systématique de la population en clientèles distinctes.
Si enfin ils décidaient de se saisir des quelques enseignements du premier tour, ils comprendraient qu’il n’y aura pas de roi ou de reine (même née pour ça), car les Marseillais n’en veulent plus. En rendant une copie particulièrement difficile à déchiffrer si l’on s’en tient à la grammaire politique
classique, les Marseillais se sont enfin saisis du royaume pour y imposer la république et cela ne va pas sans chaos, sans débat public, sans citoyens, sans consensus négocié.
Quels candidats encore sauront mettre un terme aux trafics qui endeuillent nos familles et terrorisent les habitants ?
Gérard Blanc
Finalement, peu importe les accords sur les noms, les partis et les courants, c’est sur un projet clair et crédible pour Marseille expliqué ouvertement aux Marseillais que doivent porter les négociations. Quelle alliance de projet proposera un plan détaillé et financé de reconstruction de
nos écoles ? Quelle alliance s’accordera sur les modalités effectives d’une consultation directe et régulière de la population ? Quels candidats sauront ensemble proposer une institution d’égalité du territoire qui fléchera les investissements afin de réduire la fracture béante entre les deux Marseilles ? Quels candidats encore sauront mettre un terme aux trafics qui endeuillent nos familles et terrorisent les habitants ?
Tout roi désigné sans répondre à ces questions et bien d’autres sera par nature un roi fainéant car il ne disposera pas de la majorité ou de la légitimité nécessaires pour faire avancer notre territoire… et son faiseur ne sera qu’un bouffon. Il y aura toujours des bals, du chocolat et des paillettes, des photos aux sourires factices et des soirées de gala au Vélodrome, mais pendant ce temps Marseille continuera de s’effondrer.
Gérard Blanc
(*) Gomet’ Media, attaché à la vitalité du débat local, publie régulièrement des tribunes de contributeurs extérieurs. Ces points de vue n’engagent pas la rédaction.