Cette année, Gomet’ organise les Rencontres du Vélo et des Mobilités Douces. Ces dernières se veulent être un temps pour découvrir ou redécouvrir les bienfaits prometteurs de ces mobilités pour l’avenir. Elles prendront leurs quartiers ce vendredi 14 octobre 2022 au Mucem, à Marseille, de 9h à 19h. Afin de présenter les activités de la journée et les intervenants, une conférence de presse s’est tenue vendredi 7 octobre. Nous avons pu nous entretenir à cette occasion avec Stéphane Demaegdt, directeur général d’Agilenville, une entreprise de logistique urbaine spécialisée dans les livraisons fraîches et responsables qui travaille avec les commerces de centre-ville. La start-up d’origine marseillaise s’inscrit dans la longue liste des partenaires de l’événement qui souhaitent mettre en lumière les enjeux environnementaux et sociaux de l’usage du vélo et des mobilités douces.
Stéphane Demaegdt interviendra ce vendredi 14 octobre à 15h30 sur la table-ronde « Quels enjeux pour la boucle hyper locale ? Comment adapter la ville pour favoriser la cyclo-logistique ? Quels sont les enjeux spécifiques liés à la ZFE ? » aux côtés d’Hervé Pernot, directeur du développement Veolia Région Sud, Maxime Ducoulombier, co-fondateur de Synchronicity ainsi qu’Amauric Guinard, co-fondateur de SOFUB et porteur du programme Colisactiv’ pour la FUB.
Gomet’ : Dans un premier temps, pouvez-vous nous dire pourquoi Agilenville contribue aux premières Rencontres du vélo et des mobilités douces à Marseille ?
Stéphane Demaegdt : Cela nous paraissait être une évidence. Lorsque l’on parle de mobilités douces, on pense à celles et ceux qui se déplacent à vélo en ville. Notre cœur de métier, ce sont les déplacements à vélo : nous sommes donc les premiers concernés par ce sujet, d’où notre participation à un tel événement.
Selon vous, quels sont les enjeux de la cyclo-logistique à Marseille ?
S. D : Marseille est une des villes les plus congestionnées, avec une voirie peu adaptée aux flux de marchandises. De plus, il faut faire face à une demande croissante de livraisons de colis. La cyclo-logistique a toute sa place dans le projet : pour limiter l’accès en ville aux camions et aux camionnettes et ainsi fluidifier la circulation.
Qu’est-ce que vous attendez des Rencontres du vélo ? Pensez-vous que cela pourrait modifier à l’échelle de la ville la gestion de ces dossiers ?
S.D : Agilenville n’attend pas pour agir. Depuis quatre ans, nous essayons de prendre le « taureau par les cornes » et de faire les choses par nous-même. Ce qui est important pour nous aujourd’hui est de faire savoir, de faire connaître, de changer les mentalités autour de la question du vélo et des mobilités douces. Mais aussi d’initier aux bons réflexes les acteurs économiques de la ville afin qu’ils se tournent vers des cyclo-logisticiens plutôt que vers des modes de transports classiques.
Le 20 septembre dernier, le gouvernement annonçait qu’il débloquait un « budget vélo » à hauteur de 250 millions d’euros pour l’année 2023. Du jamais vu depuis l’ouverture du Plan Vélo, cela représente la multiplication par cinq du budget de 2022. Qu’en pensez-vous ?
S.D : Tout d’abord, bien entendu que tout ce qui va dans le sens du vélo est porteur. Cependant nous nous posons la question de la destination de ces investissements. Si ce budget se tourne vers le financement d’infrastructures, bien sûr que nous serons heureux de pouvoir y avoir accès, par exemple à de meilleures pistes cyclables. Si ces fonds permettent une aide au financement de matériels spécifiques, nous serons ravis de pouvoir agrandir notre équipe. Ces investissements sont très lourds à porter pour les entreprises privées. Il faut souligner que ce budget représente un vrai marqueur. Il montre un changement d’échelle dans la prise en compte du vélo. En effet, nous sommes très attentifs à modifier l’image du vélo encore considéré comme un loisir « bobo ». Aujourd’hui, il faut le considérer comme une vraie alternative, une vraie solution.
L’uberisation des livraisons est entachée d’une image péjorative, liée notamment aux mauvaises conditions de travail des livreurs. Ne craignez-vous pas que votre projet ne subisse les mêmes critiques ? Comment cela est-il vécu par votre équipe ?
S.D : La particularité d’Agilenville tient dans le fait que nous réalisons des livraisons pondéreuses. Celles et ceux qui candidatent chez nous cherchent à lier travail et sport. Le vélo, c’est la santé et, pour notre entreprise, c’est aussi le travail. A mon sens, c’est un véritable argument. Nos livreurs ont amélioré leur condition physique depuis que nous les avons embauchés. Pour Agilenville, la contrainte physique réside davantage dans la livraison en étage car, pour ce qui est de la partie transport, l’assistance électrique permet à nos livreurs de tracter jusqu’à 150 kilos de marchandises.
De plus, la prise en compte du risque d’accident est essentielle. A ce jour, nous sommes agréablement surpris de constater que notre taux d’accident est très faible. La plupart du temps, ce sont de petits accrochages, souvent liés à des refus de priorité. Par rapport au secteur du transport, notre taux d’accidentologie au travail est bien inférieur. Cela est dû à la vitesse modérée de nos livreurs, limitée à 25km/h. De plus, nos vélos cargos sont volumineux et donc très visibles. Concernant le phénomène d’uberisation, si les conditions de travail des employés de certaines structures sont si mauvaises, c’est parce que cela est dû à un travail rémunéré à la tâche. Chez Agilenville, nos livreurs signent des CDI de 35h, ce qui leur garantit un revenu, sans devoir travailler sept jours sur sept. Ils sont payés à l’heure. Il ne faut pas oublier que le plus grand risque pour un livreur à vélo est la fatigue. Avec un tel contrat de travail, le livreur n’a pas à accélérer et à prendre des risques inutiles. En cas d’accident, nos livreurs sont indemnisés et pris en charge comme tout autre salarié.
Agilenville possède des équipes sur Lyon, Marseille et Nice, des villes où le climat n’est pas identique. Comment arrivez-vous à gérer ces différences de climat, mais aussi les différentes intempéries qui affectent plus directement les cyclistes que les camions ?
S. D : Nous savons faire en fonction des intempéries, et de la situation de la ville dans laquelle nous nous trouvons. Même pendant les épisodes de canicule cet été, il n’y a pas eu un jour où nous n’avons pas livré. Des aménagements ont été mis en place, comme des temps d’hydratation et des pauses, des ralentissements de rythme organisés, notamment pour éviter les risques liés aux écarts de température entre les magasins climatisés et l’extérieur. C’est la même chose en période de neige à Lyon. Nous essayons de limiter les risques. Par exemple, en cas d’orages, nous suspendons les livraisons le temps qu’il faut.
Liens utiles :
> Inscrivez-vous aux Rencontres sur le site de l’événement : https://lesrencontresduvelo.com/
> Les Rencontres du vélo sur Radiocyclo : les explications de Jean-François Eyraud, directeur de Gomet’ Media
> La ville de Marseille veut encourager les mobilités douces face à la voiture sur BFM Marseille Provence
L’actualité des mobilités à retrouver dans notre rubrique Transports
> Rencontres du vélo et des mobilités douces : imaginer la ville apaisée