Gomet’ : Comment envisagez-vous votre rôle pour les cinq ans à venir comme président de la CCI Paca ?
Alain Lacroix : A l’instar du président de la République qui est le président de tous les Français, je me dois d’être le président de toutes les CCI. Je ne renie pas mon ancrage marseillais, je suis d’ailleurs toujours élu à la CCI Marseille Provence, mais je ne peux pas me permettre de favoriser un territoire sous peine de créer la division comme c’était le cas sous la précédente mandature. Je conçois la CCI régionale comme une holding et elle n’a pas vocation à se substituer à ses petites sœurs locales. Elles ont une vision terrain que nous n’aurons jamais. Par contre, nous pouvons apporter une expertise globale qu’elles n’ont pas les moyens de mettre en place.
Dans le cadre de la loi Notre, les CCI ont vu leurs recettes fiscales largement amputées. Comment faire face à cette baisse des revenus ?
A.L : La création de la CCI régionale permet également de mutualiser les ressources et ainsi de dégager des économies. Nous pouvons regrouper certaines fonctions supports telles que les services comptables et informatiques. Il va falloir uniformiser certaines offres. Par exemple, chaque chambre propose ses propres formations pour les commerçants alors que, qu’ils soient à Gap, Nice ou Marseille, les besoins sont les mêmes ! Nous devons choisir la meilleure offre et la dupliquer sur toute la région pour simplifier les choses.
Vous devez rendre votre schéma d’orientation stratégique le 30 juin. Où en est l’élaboration du texte ?
A.L : Nous travaillons actuellement sur ce texte qui doit être validé lors de notre assemblée générale du 29 juin. Pour coller à la révolution sociétale que nous vivons, il va falloir mettre de grands chantiers en place. Le premier d’entre eux est de relever le défi du digital. Ce n’est pas un effet de mode, c’est désormais incontournable et nous avons pour mission d’accompagner nos entreprises dans cette mutation. Si les supermarchés ont tué l’épicerie de proximité, le e-commerce risque bien d’avoir la peau des boutiques de centre-ville. Il faut anticiper ce changement. Ensuite, notre territoire n’est pas au centre du pays mais bien sur les rives de la Méditerranée avec sur l’autre rive, un continent qui offre de belles promesses de développement. Les pays africains vont avoir besoin de nous, il ne faut pas louper cette occasion. Enfin, la transition industrielle est un autre défi majeur. Nous ne pouvons plus ni fabriquer, ni consommer l’énergie comme auparavant. Il va falloir changer notre conception de la production et nos habitudes de consommation.
Comment faire pour trouver des solutions adaptées à l’ensemble des territoires de la région qui ont parfois des enjeux différents ?
A.L : Nous devons nous appuyer sur les équipes de terrain pour faire remonter les problématiques locales mais surtout, il faut travailler en équipe. Le Conseil régional a, par exemple, élaboré un schéma directeur sur lequel il faut s’aligner. Les politiques et les acteurs économiques doivent avancer main dans la main désormais. Le temps béni où le robinet public coulait à flots est révolu, nous devons maintenant créer l’argent que nous dépensons et nous unir pour faire des économies. A mes yeux, le chantier prioritaire de la région est la mobilité. Tout le monde est concerné et les entreprises en premier lieu. Il est aberrant de mettre presque autant de temps pour aller à Paris qu’à Nice depuis Marseille. Nous devons donner tout notre soutien à la ligne nouvelle Provence Côte d’Azur pour relier les deux grandes métropoles de la région. Ensuite, il faut changer l’image du territoire. Actuellement, nous sommes la Floride, qui accueille tous les retraités grâce à sa douceur de vivre. Je veux que l’on devienne la Californie qui attire les touristes mais surtout soit à la source de l’innovation en attirant les activités les plus en pointe.
Vous allez certainement vivre la privatisation de l’aéroport de Marseille-Provence sous votre présidence. Comment l’envisagez-vous ?
A.L : L’aéroport de Marignane est un superbe outil du développement économique local mais il est très en retard sur ses homologues européens. Par exemple, l’espace consacré à l’embarquement est bien trop important comparé à celui du shopping où les passagers passent la plus grande partie de leur temps. La privatisation va inévitablement apporter des innovations et améliorer la gestion de cet équipement. Nous resterons toujours associés aux orientations prises par le futur repreneur mais nous avons vu comment ça s’est passé à Nice… Ça va dans le sens de l’histoire et je pense que notre nouveau président de la République encouragera ce processus.