Le premier conseil municipal de Marseille post-élections nationales s’est réuni ce mercredi 29 juin. Au menu, plus de 200 rapports, dont le compte administratif et la résiliation du bail avec le promoteur de la Villa Valmer. Après deux ans de mandature du Printemps marseillais, l’union de la gauche et des écologistes s’effrite. Dans le même temps, l’opposition LR pointe du doigt le manque d’investissements de la mairie, et refuse de tout mettre sur le dos de la crise sanitaire.
À la suite de l’élection présidentielle et des législatives, Benoît Payan espère que le nouveau gouvernement sera « attentif à la ville de Marseille, aux Marseillaises et aux Marseillais, et qu’il continuera sur (sa) trajectoire ». L’édile socialiste annonce, avant d’entamer la lecture des textes, que le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, sera en visite à Marseille vendredi 1er juillet. L’occasion d’accueillir Lionel Mathieu, le nouveau contre-amiral à la tête du bataillon des marins-pompiers de Marseille. Il remplace le vice-amiral Patrick Augier.
Le groupe écologiste poursuit son émancipation, non sans quelques remous
La séance du conseil est rythmée par quelques dissensions entre les élus du Printemps marseillais et les désormais neuf membres du groupe “écologiste et pluriel-s”. La structure présidée par Fabien Perez (EELV) s’est d’ailleurs abstenue à plusieurs reprises, plutôt que de suivre sa majorité. C’est le cas pour le rapport n°5 – une convention de partenariat entre la mairie et le ministère de l’Intérieur sur le développement de l’intelligence artificielle « Quand il y a un flou, c’est qu’il y a un loup », signale l’élu écologiste et adjoint marseillais Théo Challande-Névoret, agaçant au passage le commissaire rapporteur Yannick Ohanessian (PS). Et ce n’est pas le seul texte à générer des tensions internes au bloc majoritaire.
Le vote du rapport 119, sur le lancement d’une assistance à maîtrise d’ouvrage pour les projets structurants de Marseille, créé lui aussi son lot de crispations à gauche. Par la voix d’Aïcha Sif (EELV), le groupe écologiste s’abstient de voter, redoutant « une privatisation » de certains équipements publics. Un nouveau pas de côté qui fait sortir Samia Ghali de ses gonds.
Je veux bien qu’on parle des graines et des arbres toute la journée, mais ce qui compte aussi à un moment, c’est qu’on s’occupe de la réalité des enfants.
Samia Ghali
La première adjointe, et cheffe de fil du deuxième groupe de la majorité marseillaise, est en charge de présenter ce rapport qui autorise notamment la réfection de plusieurs piscines municipales. « Je veux bien qu’on parle des graines et des arbres toute la journée, mais ce qui compte aussi à un moment, c’est qu’on s’occupe de la réalité que vivent les enfants ». Le ton monte. Benoît Payan intervient. « Revenons au calme (…) il est hors de question pour nous de privatiser des petits équipements de proximité », clarifie l’édile marseillais.
Fait politique notable dans ce conseil municipal de Marseille, et symbole d’une fracture naissante, le groupe écologiste a même voté contre une subvention de 10 000 euros destinée à un congrès de radiologie pédiatrique. D’après l’élue écologiste Nouriati Djambae, l’évènement serait « déjà largement financé par des laboratoires pharmaceutiques » dont Sanofi, et n’aurait pas besoin d’être renforcé par des deniers publics – surtout au regard du contexte économique. Elle souligne également le bilan carbone de ce genre de congrès. Surpris par l’intervention de la conseillère EELV, le maire Benoît Payan s’abstient de tout commentaire sur cette opposition interne à la majorité, et soumet aux voix le rapport. La subvention est finalement adoptée. Mais les fissures sont de plus en plus visibles au sein du bloc majoritaire marseillais.
L’opposition LR ironise sur ces dissensions. Dans un communiqué, le groupe Une volonté pour Marseille estime que « les Marseillais méritent mieux que ces querelles internes alors que leur quotidien se complique chaque jour (…) L’illusion électorale de l’union des gauches ne tient plus : ses différents courants ne sont plus que l’addition de leurs divisions.»
La majorité Printemps marseillais et l’opposition LR s’écharpent sur le budget
Six mois après la clôture de l’exercice 2021, l’heure du compte administratif a sonné. L’an passé, la Ville de Marseille a largement moins dépensé que prévu. On remarque en effet un écart significatif entre le niveau des investissements programmés – hors remboursements d’emprunts – soit 283 millions d’euros, et ceux réellement effectués, soit 189 millions d’euros. « Certains chantiers ont du subir des décalages, le Covid est un aléa indépendant de notre volonté, justifie l’adjoint aux finances, Joël Canicave, et de préciser que ce taux de réalisation ne nous satisfait pas ». Un propos partagé par Pierre Robin, élu d’opposition LR, qui se jette sur l’occasion, et passe au crible le compte administratif 2021 de la Ville de Marseille.
S’il reconnaît « des points positifs », Pierre Robin se montre effectivement très critique sur le taux de réalisation de la nouvelle municipalité – qui correspond en 2021 à la moyenne des dernières années Gaudin. « L’arbre du Covid ne doit pas cacher la forêt de vos tergiversations », lance-t-il. Pierre Robin revient également sur la hausse de la taxe foncière, entre « incompréhension » et « mécontentement ». L’élu d’opposition estime qu’en additionnant les marges de mutations et les excédents non consommés, « soit un total de 32 millions d’euros » dit-il, « il y avait largement de quoi compenser ces hausses (…) du coût de l’énergie notamment ». La nouvelle taxe foncière de Marseille sera pour la première fois prise en compte dans le compte administratif 2022.
Côté dette, la municipalité marseillaise annonce pour 2021 un allègement à hauteur de 49 millions d’euros, et souhaite poursuivre cette baisse en 2022. « C’est un défi important », estime Joël Canicave, mais au regard de l’inflation, et de l’augmentation constante du coût de l’énergie, « je ne vous cache pas que nous avons quelques inquiétudes (…) pour l’avenir ». D’autant que cette diminution de la dette est indirectement liée à une hausse de 50% des aides du Département en 2021 – ce que ne manque pas de souligner Pierre Robin. Dans le contexte actuel, « tant que le taux d’usure n’est pas revu par le gouvernement », poursuit Joël Canicave, les banques refuseront de prêter de l’argent aux collectivités territoriales à taux fixe.
Par rapport au budget primitif, la mairie annonce des dépenses supplémentaires : 23 millions d’euros. Un surplus principalement causé par la hausse du coût de l’énergie, assure Joël Canicave. Et au regard de l’inflation actuelle, l’adjoint aux finances prévient que des frais supplémentaires pourraient encore saler la note municipale avant la fin de l’année.
Villa Valmer : malgré les menaces du promoteur, la mairie de Marseille vote la rupture du bail
La Villa Valmer ne deviendra pas un hôtel de luxe. La ville de Marseille acte la résiliation pour faute du bail emphytéotique administratif signé sur le tard par la municipalité Gaudin avec la SAS Valmer. Malgré l’abstention RN, et le vote contre du groupe LR, le rapport est adopté. En juin 2021, Benoît Payan lançait la procédure contradictoire après que la SCI Fimo – la société de Pierre Mozziconacci – a détruit sans autorisation les terrasses arrières de l’édifice, et endommagé une parties des espaces verts. De son côté, le promoteur ne compte pas en rester là. Selon nos confrères de Marsactu, il pourrait réclamer un dédommagement de 45 millions d’euros… à moins que le mairie ne réussisse à défendre l’existence d’une faute grave. « Pas du tout inquiète » sur ce point, l’adjointe marseillaise à l’urbanisme Mathilde Chaboche entend récupérer les clés de la villa « d’ici quelques semaines ou quelques mois », et compte « réfléchir à un meilleur avenir pour ce site historique » du XIXe siècle.
Lien utile :
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