Ce devait être un « conseil de travail somme toute classique », selon les mots du président du groupe PS Joël Canicave. Effectivement si le début de cette séance du 10 novembre s’est déroulé relativement dans le calme – le groupe RN allant même jusqu’à féliciter la majorité sur la restauration du tableau de la nativité à la Bastide Saint-Joseph ! – les choses n’ont pas tardé à déraper sur certains sujets chauds. Récap.
La prise en compte du quotient familial dans l’attribution des places en crèche fait débat
Jusqu’alors cordial, le ton monte au moment d’aborder les nouveaux critères d’attribution des places en crèche. Une problématique importante à Marseille où plus de 12 000 naissances ont été recensées en 2020, selon l’Insee. L’adjointe à la petite enfance Sophie Guérard a donc égrainé les nouveaux critères qui entreront en vigueur en septembre 2022 : « Nous avons introduit comme critères la possibilité de faire des demandes multiples pour trois, voir quatre enfants ; le renforcement du critère lié au handicap, avec une différenciation si c’est le parent ou un des enfants qui est porteur du handicap ; nous prendrons également en compte les demandes pour une prise en charge à temps partiel en crèche ; le dernier critère est la prise en compte du quotient familial ». Or, c’est justement sur ce critère que le bât blesse pour l’opposition : « Même si la volonté au départ d’introduire le quotient familial est bonne, cela induit un effet pervers : le mode de calcul de ce quotient tient compte du nombre de parents. Quand il y a deux parents, le quotient augmente automatiquement puisqu’il y a deux revenus. On va donc favoriser les familles monoparentales et nombreuses. Nous n’avons rien contre, mais cela va concentrer dans les crèches les familles aux faibles revenus, monoparentales et nombreuses. Toutes les autres seront exclues, il n’y aura plus de mixité sociale », déplore Catherine Chantelot qui était en charge des crèches sous l’ancienne majorité de droite.
« Contrairement à ce que l’opposition laisse entendre, le fait que les parents travaillent est le critère numéro deux pour l’attribution des places en crèches, le critère numéro un étant le fait pour les parents de résider à Marseille », tranche Sophie Guérard pour clore le débat.
Concernant la création de places en crèches, « une réunion aura lieu en décembre pour caler un plan pluriannuel. Nous avons récupéré une situation compliquée, et la création de places a été retardée par le covid et la priorité des écoles. Mais je continue de recevoir des gestionnaires : la Ville de Marseille est prête à accompagner tout gestionnaire qui se positionne sur un quartier tendu », explique Sophie Guérard, interrogé par Gomet’.
La mairie favorable à la LNPCA … avec des réserves
Au cours du conseil, la municipalité a également donné son avis au sujet de la création de la Ligne nouvelle Provence Côte d’Azur (LNPCA) qui reliera Marseille à Menton et comprend la création d’une nouvelle gare souterraine à Saint-Charles. « C’est un projet qui va dans le bon sens. Marseille dispose de douze gares et haltes qui sont inutilisées, il est temps de les mettre en service. Avoir un RER métropolitain, c’est proposer une alternative efficace à la voiture », se réjouit Audrey Gatian, adjointe aux mobilités. Jean-Marc Coppola, adjoint à la culture, souligne pour sa part l’urgence de voir ce projet se concrétiser : « notre ville est thrombosée par l’automotive est les poids lourds. Ce manque de transport ferroviaire est aussi un frein à l’emploi. La LNPCA est urgente, et je dirais même que l’échéance de 2035 pour la voir aboutir est trop éloignée ».
Les élus de la majorité se disent donc globalement favorables, mais tiennent à mettre en garde sur plusieurs points : « nous voulons recoudre la ville et non la fracturer », poursuit Audrey Gatian. « La LNPCA doit se combiner avec le futur tramway, dans une logique d’intermodalité». Elle rappelle en ce sens le projet de prolongation du T3 qui, après concertation avec la Métropole « doit aller jusqu’aux Abattoirs dans sa phase 1, et pourquoi pas jusqu’au Lycée Saint-Exupéry ?». La Ville soutient par ailleurs une extension du T2 jusqu’à l’hôpital Nord et un projet de tramway allant de la Belle de Mai au Merlan.
Mise en place d’une monnaie locale dans les mairies de secteur
Côté économie, l’adjoint Laurent Lhardit a présenté un projet d’instauration d’une monnaie locale appelée la Roue dans les mairies de secteur volontaires. Cette monnaie viendrait en complément de l’euro, dans un but de favoriser le commerce de proximité. « La Roue sera dépensée dans un réseau de commerces, d’entreprises et d’associations du territoire, générant un chiffre d’affaires local qui soutiendra donc l’économie et l’emploi en son au sein », appuie Laurent Lhardit. Concrètement, chaque mairie volontaire cotisera à hauteur de 10 centimes par habitant et par an auprès de l ‘association La Roue marseillaise. Les utilisateurs, quant à eux, doivent adhérer à l’association pour pouvoir se procurer des coupons et les dépenser dans les commerces adhérents. Une annonce qui a fait réagir certains maires de secteur, à l’instar de Sylvain Souvestre, maire LR des 11e et 12e arrondissements qui voit dans cette délibération « une subvention d’association qui ne dit pas son nom ». Il dénonce également le risque d’instaurer « une monnaie fondante, qui verrait sa valeur s’abaisser avec le temps ou, en cas de dissolution de l’association, contraindrait les utilisateurs à se retrouver avec des jetons sans valeur». « La monnaie est déjà mise en place dans plusieurs villes comme Avignon ou Orange et rencontre un franc succès », rétorque Perrine Prigent, conseillère municipale déléguée à la valorisation du patrimoine. D’autres maires de secteurs comme Didier Jau, dans les 4e et 5e, ont d’ores et déjà fait part de leur intention de voir cette monnaie mise en place dans leur pérmètre.
Haro sur la question sécuritaire
Au cours du conseil, l’adjoint à la sécurité Yannick Ohanessian a présenté une délibération visant à instaurer une dérogation à la durée annuelle du temps de travail pour les agents de la brigade de nuit de la Police Municipale. L’opposition a saisi la balle au bond pour revenir à la fois sur les incivilités commises à la Plaine et sur les violences commises au Palais des sports samedi dernier. « Où en est le processus de recrutement des agents supplémentaires ? La tranquillité publique relève de votre compétence : que comptez-vous faire pour protéger cette liberté qu’est la sécurité dans la deuxième ville de France ?» interpelle Yves Moraine (LR), l’ancien président du groupe de la majorité sous l’ancienne municipalité gaudiniste. « C’est l’hiver sécuritaire, avec le Printemps Marseillais !», embraye l’élue RN Eléonore Bez, qui s’inquiète d’un manque d’effectif lié à cette dérogation du temps de travail.
En défense, Yannick Ohanessian a rappelé le bilan de l’ancienne majorité « qui a démultiplié la vidéoprotection sans se demander si cela était effectif, au détriment des policiers municipaux. Lorsque je me retrouve avec si peu de fonctionnaires, c’est un héritage. Notre objectif à la clé est de doubler les effectifs d’officiers municipaux d’ici la fin du mandat. Mais je ne suis pas faiseur de miracle, nous essayons d’avancer, avec la meilleure volonté ». Le maire Benoît Payan rappelle que « l’Etat va déployer ici à sa charge 500 caméras et que la Ville avait obtenu l’arrivée de 150 nouveaux officiers de la Police nationale cette année ».
Et aussi …
La Ville a voté la déclaration d’utilité publique des travaux de la marina Olympique du Roucas (rapport 54)
De même la création d’un marché alimentaire dans la halle Puget au cours Belsunce à partir de février 2022.
Enfin, le conseil a voté le principe de gratuité d’entrée des expositions temporaires des Musées de Marseille et du Museum d’Histoire naturelle le premier jour de leur ouverture au public.
Liens utiles :
>Tous les rapports présentés au conseil municipal du 10 novembre à retrouver dans notre article précédent : De l’école à l’emploi : un conseil municipal studieux pour la mairie de Marseille
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