Ils sont nombreux à vouloir, depuis que l’opération réussit, à revendiquer la paternité d’Euroméditerrranée. La vraie, la seule, de l’opération d’intérêt national est celle d’Henri Mercier qui est décédé le 29 octobre 2021. Ancien élève de Polytechnique, Henri Mercier intègre l’entreprise OTH, bureau d’études techniques à Paris, en 1954, où il devient rapidement ingénieur en chef chargé du département « Équipement technique », puis directeur général en 1970. Il développe l’entreprise, et le logo OTH flotte sur les grands chantiers de Marseille et sa région comme l’hôtel du Département.
Engagé dans le monde patronal, il est entré à la Chambre de commerce en octobre 1976, rappelle la CCI métropolitaine Aix Marseille Provence et en devint le président de janvier 1983 à juillet 1987, ainsi que président d’honneur de la CCI régionale. Il fut président de l’UPE 13, président du Ceser (Conseil économique, social et environnemental régional) et président de la Ligue contre le cancer, membre actif du conseil d’administration de l’hôpital Saint-Joseph. Son frère était un grand chirurgien angiologue. Henri Mercier fut nommé Chevalier de l’Ordre national du mérite par le ministère de l’Équipement en décembre 1976, et décoré de la Légion d’honneur en 1984.
Stratégies :« Marseille se prend un savon »
Lors de son mandat au Palais de la Bourse (président de 1983 à 1987), Henri Mercier commanda au service prospective et étude de la Chambre, une étude lourde et conséquente sur le redéploiement de Marseille, la centralité de la ville, son rôle possible de capitale régionale et méditerranéenne après la crise de la Navale, du port et la fin du temps des colonies. C’est l’époque où tous les responsables s‘interrogent sur un possible redécollage de la ville. Gaston Defferre a commandé en 1985, à l’institut Démoscopie une étude sur l’image de la ville dont le média Stratégie titrera : « Marseille se prend un savon ».
L’étude CCI traite du positionnement de Marseille, mais surtout de la revitalisation de l’hinterland portuaire phocéen qui est devenu une zone de friche, de parking et de pauvreté. Le tracé de l’étude et la préconisation de la construction d’un quartier d’affaires recoupent le périmètre d’Euroméditerrranée d’aujourd’hui à l’exception de la friche de la Belle de Mai et de la Rue de la République qui ont été incluses tardivement.
L’idée sera évoquée par Jean-François Mattei dans son préprogramme municipal. Mais, c’est Pierre Fiastre, consultant et élu à l’économie en 1989, puis conseiller du maire qui a compris la portée de cette réflexion. C’est dit-il aujourd’hui « la première réflexion stratégique sur Marseille de toute notre histoire ! ».
Il se fera le relais de cette étude auprès du maire, Robert Vigouroux et en 1991, une ZAD (zone d’aménagement différé) est votée, la ZAD Joliette. En juin 1992, une conférence de presse œcuménique avec préfet et élus lance l’opération Euroméditerrranée à l’Hôtel de ville, le nom est adopté dans la nuit qui précède ce rendez-vous médiatique et le maire saura convaincre le gouvernement de lancer une mission de faisabilité confiée à Jean-Pierre Weiss.
Une place Henri Mercier sur Euroméditerranée serait un juste hommage à ce visionnaire, ambitieux pour sa ville, et porte-parole intelligent, cultivé, subtil et fin de l’intérêt du monde économique phocéen.