Orange Business Service a regroupé début octobre l’ensemble de son activité santé au sein de sa filiale marseillaise Enovacom. Laurent Frigara, son directeur général délégué, explique à Gomet’ les nouvelles ambitions de la société.
Pouvez-vous nous présenter Enovacom ?
Laurent Frigara : Enovacom est parti en 2002 sur une idée : améliorer les échanges numériques entre les établissements de santé et leurs partenaires. Par exemple, nous avons commencé par développer une solution de traçabilité des produits sanguins entre l’établissement français du sang et les hôpitaux. Ce fut l’un de nos premiers succès et cela nous a ouvert les portes vers d’autres clients comme les mutuelles, l’assurance maladie et les laboratoires de villes. Aujourd’hui, nous sommes leader sur les échanges digitaux dans les établissements de santé français avec plus de 1 600 établissements équipés.
Quelles solutions proposez-vous aujourd’hui aux hôpitaux ?
Laurent Frigara Notre solution a bien évolué depuis le démarrage. Nous apportons la couche logiciel entre les différents outils qui permet le partage des données le plus efficace et le plus sécurisé possible. Par exemple, nous faisons communiquer les données entre les hôpitaux et les médecins de ville pour le suivi des patients avant et après une hospitalisation. Notre logiciel permet également de faire circuler les données entre les différentes machines de l’hôpital lui-même. Par exemple, les tensiomètres, électrocardiogrammes et autres pompes à insulines sont reliés au système d’information de l’hôpital. Enovacom a créé une couche logiciel qui permet de transmettre les relevés d’information directement au dossier patient. C’est un gain de temps phénoménal pour le personnel soignant. Pour cela, nous avons signé des partenariats avec les plus gros constructeurs de machines de santé afin que nos solutions soient compatibles avec 95% du parc de machines.
En 2018, Enovacom est racheté par Orange Business Services. Qu’est-ce que cela a changé pour l’entreprise ?
Laurent Frigara : Tout d’abord, ça nous a donné une assise financière des plus confortable même si nous étions en forte croissance avec une bonne rentabilité. Ils nous ont laissé nous développer comme nous le faisons auparavant sans jamais nous imposer leur vision. L’intégration a été très progressive, ce que nous avons grandement apprécié. Depuis 2018, nous avons appris à mieux connaître le groupe.
Quelles sont les compétences apportées par Orange Business Services ?
Laurent Frigara : Orange Business Services est positionné sur des métiers très liés aux télécom. Enovacom est plus un éditeur de logiciel qui propose des briques installées au-dessus de la couche réseau. Par exemple, ils nous ont apporté leur expertise sur l’hébergement et le cloud. Orange Business Service dispose d’une filiale, Business & Decision, spécialisé dans le big data qui nous a permis d’accélérer sur le sujet. Sur la sécurité, Orange Cyberdéfense est également un acteur de premier plan qui travaille avec de très grands groupes et nous apportent également l’ouverture vers une nouvelle échelle de projet. Même si nous travaillons avec de gros acteurs de santé, nous ne sommes pas Cap Gemini, Steria ou Altran. Avec l’appui d’Orange, on acquiert une expérience sur la gestion de projets d’une autre dimension. Par exemple, Orange Business Service a travaillé sur la mise en réseau de tous les Samu de France, ce que nous n’aurions pas pu faire seul.
Début octobre, Orange Business Service a regroupé l’ensemble de ses activités santé au sein d’Enovacom. Concrètement, quel va être l’impact sur votre offre ?
Laurent Frigara : Désormais, nous appuyons notre offre sur quatre piliers stratégiques. La protection des données de santé avec l’hébergement, la gestion des accès et des rôles de chacun des utilisateurs. Sur cette partie, Orange Healthcare nous apporte son expertise notamment avec la certification de l’hébergement des données de santé qui constitue la majeure partie de son activité. Ensuite, nous continuons sur les échanges des données entre les différents acteurs, le métier historique d’Enovacom. L’un des sujets que nous allons un peu plus développé est la digitalisation du parcours patients. Orange Healthcare travaillait déjà un peu sur la question avec quelques petites solutions d’accueil dans les établissements, des chatbot, de la géolocalisation des biens et personnes dans les hôpitaux… Enovacom va renforcer cette offre pour améliorer le séjour des patients à l’hôpital. On travaille sur un tout nouveau logiciel dédié au parcours patient pour faciliter les pré-admissions, les sorties, l’accès aux services complémentaires pour le patient lors d’une hospitalisation… On aura des choses à vous montrer au printemps prochain.
Au niveau business, cette nouvelle dimension revoit vos objectifs à la hausse ?
Laurent Frigara : Jusqu’ici, nous avons signé une très belle croissance de 15% par an en moyenne. L’an dernier, nous avons réalisé environ 16 millions d’euros de chiffre d’affaires et avec Orange Healthcare, on devrait atteindre les 30 millions d’euros. On atteint une taille plus importante mais la croissance devrait rester à deux chiffres. Sur les hôpitaux français, on couvre désormais 90% du marché. On a encore quelques parts de marché à conquérir sur des fonctions complémentaires comme la digitalisation du parcours patients. Par contre, on peut encore bien progresser auprès de nouveaux acteurs comme les medtech et les entreprises de pharmaceutiques.
Et à l’international, vous avez des projets ?
Laurent Frigara : Oui, la part de l’export doit augmenter, notamment sur l’échange de données dans les pays européens où Orange est bien installée. Orange Business Services est présent dans 220 pays, ça élargit considérablement notre terrain de jeu. On espère notamment progresser au Canada. Nous avons déjà des bureaux au Québec où on a équipé l’ensemble des hôpitaux.
Vous assurez l’échange des données et leur hébergement. Les établissements souhaiteraient maintenant pouvoir les exploiter. Comment leur apporter une solution ?
Laurent Frigara : L’exploitation et la gestion des données de santé est l’un des gros défi de demain pour le monde de la santé. Ce sera notre quatrième marché prioritaire à développer dans les années à venir. Nous travaillons déjà sur de nouveaux logiciels pour aider les gouvernement et les hôpitaux à exploiter ces données afin de faire progresser la recherche, la médecine prédictive ou encore la gestion des épidémies comme la Covid-19. Cette crise a démontré que la gestion de la donnée est essentielle et elle a été incomplète. Notre travail est de traiter la donnée pour qu’elle soit de qualité. C’est essentiel pour avoir une intelligence artificielle efficace. Nous avons déjà démarré un projet intéressant avec le CHU de Rennes. Baptisé E-hop, il s’agit d’un entrepôt de données médicales pour les chercheurs qui peuvent lancer des recherches multicritères pour établir une cohorte de patients en fonction de leurs besoins sur des études cliniques.
Vous comptez garder le siège à Marseille ?
Laurent Frigara : Plus que jamais. C’est une marque de confiance pour Orange d’installer le siège de sa division santé à Marseille. Nous comptons aujourd’hui 200 personnes à Marseille, une trentaine à Paris et une dizaine sur nos bureaux de Québec et de Londres. Cette année, on devrait recruter une trentaine de personnes essentiellement sur Marseille et grader un rythme de croissance de 10% par an des équipes.
Lien utile :
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