Le groupe fondé par les frères Canavese, René, Jean-Pierre et Gérard en 1976 a demandé la protection du tribunal de commerce le jeudi 2 avril. Une surprise pour cette entreprise familiale engagée sur le territoire et connue pour ses camions à la flèche verte. Gérard Canavese, P.-D.G., explique pour Gomet’, en toute franchise, les causes de cette situation et les perspectives du groupe.
Dans le communiqué que vous avez adressé à la presse vous indiquez que le groupe a été « impacté de plein fouet par la crise sanitaire sans précédent du Coronavirus ». En quoi cela vous impacte-t-il plus que d’autres ?
Gérard Canavese : Nous étions en plein recentrage de notre activité. Nous avions historiquement deux branches d’activité avec la production et la distribution de bananes en Côte d’Ivoire (50 000 tonnes) et d’oranges au Maroc. Nous avions fait le choix de filières intégrées et nous maîtrisions l’aval et l’amont de nos produits. Mais les secousses du marché mondial ont en 2018 et 2019 mis à mal nos activités.
La concurrence d’autres opérateurs ou d’autres pays ?
Gérard Canavese : Nous sommes sur des marchés mondialisés et les producteurs d’Amérique centrale ont eu des surplus qui ont fait chuter les prix. Ce qui a impacté nos résultats.
Pourquoi n’avez-vous pas mobilisé les outils publics de soutien pour passer ce cap ?
Nous n’avons pas eu accès au prêt garanti car nous étions déficitaires les deux années précédentes.
Gérard Canavese
Gérard Canavese : Nous n’avons pas accès au prêt garanti de l’Etat car nous étions déficitaires les deux années précédentes. Nous avons mis une partie de notre personnel en chômage technique, mais cela n’a pas suffi. Nous avons des charges qui courent… De plus nous avons des difficultés à recouvrir les créances. En 2018 nous avions 2018 perdu 1,5 M€ sur un chiffre d’affaires de 165 M€ et 500 000 € 2019 sur un chiffre d’affaires de 150 M€ avec 410 salariés en France.
Nous avons donc décidé de nous recentrer sur notre métier originel de distributeur. Le coronavirus a fait fermer une grosse partie de nos nouveaux clients ce qui a plombé notre activité : voyez le scolaire, les universités, les crèches, les restaurants d’entreprise et les restaurants privés ! Nous avons perdu 55 % de notre chiffre d’affaires au premier trimestre !
Vous avez cédé des sociétés en Afrique ?
Gérard Canavese : Oui, au Maroc, nous avons vendu les 51 % de l’exploitation d’oranges du nord du Maroc à notre partenaire marocain historique qui en détenait 49 %. En Côte d’Ivoire, la mûrisserie a été cédée au groupe antillais Fruidor et la production à un de nos collaborateurs associé à un fonds d’investissement.
Et en France vous faites évoluer votre activité ?
Gérard Canavese : Nous avons réussi à ouvrir de nouveaux segments de clientèle avec la restauration hors domicile, avec les cuisines centrales des maisons de retraite, des écoles et collèges, soit directement, soit avec les entreprises de restauration collective, vers l’activité de restauration commerciale qui était en progression de plus de 38 % avant la crise.
Nous avons fait évoluer aussi nos produits. Nous étions historiquement sur les fruits et légumes, nous avons ajouté des produits à valeur ajoutée : la marée, les produits carnés et le « beurre œuf et fromage ».
Nous sommes dans une activité rentable, nous avons opéré un retournement positif
Gérard Canavese
Quel est votre agenda avec le Tribunal de commerce ?
Gérard Canavese : Nous sommes en période d’observation de deux mois qui pourra être prolongée à 6 mois, voire renouvelable. Nous allons présenter un plan de redressement. Nous sommes dans une activité rentable, nous avons opéré un retournement positif, il faut simplement que nos clients puissent rouvrir. Nous n’avons pas besoin de nous réajuster, il faut que nos clients redeviennent clients, ce que nous souhaitons tous.