En accord avec Jean-Marc Jancovici, associé de Carbone 4 et président de The Shift Project, actif dans les domaines du changement climatique et de l’énergie, nous relayons volontiers ici ses propos sur la COP29 sur le changement climatique qui s’est ouverte à Bakou en Azerbaïdjan ce 11 novembre, que nous avons repris à leur parution sur Linkedin le jour de l’ouverture de la conférence.
Aujourd’hui démarre, à Bakou, la 29e “réunion des parties” de la Convention Cadre des Nations sur le Changement Climatique, appelée plus sobrement COP 29.
Chaque année, cette réunion donne lieu à quelques malentendus, souvent les mêmes :). Le premier est que ce lieu permettrait de “forcer la main” aux pays fortement émetteurs, en leur tapant sur la tête pour qu’ils se décident à faire autrement.
Malheureusement, cette enceinte onusienne n’est pas du tout faite pour cela : tout s’y décide par consensus, et les textes finaux se calent donc sur les moins-disants. On peut donc juste attendre de cette réunion des déclarations d’intention, qui seront ou non suivies d’effets en fonction des intérêts domestiques des pays présents (on ne compte plus les engagements qui sont restés lettre morte).
La seule année où la COP a permis de franchir une étape a été Copenhague, en 2009, où une espèce d’OPA des chefs d’Etat présents a décidé en 24h, par-dessus la tête des négociateurs et des textes en cours de discussion, que l’objectif politique de limitation du réchauffement serait désormais de 2°C.
Cette édition a pourtant été cataloguée comme un “échec” par la presse (et ça continue), parce que les ONG (les premières à pouvoir s’exprimer sur le résultat) ont été dépitées de ne pas être associées aux discussions entre chefs d’Etat, alors que d’habitude elles peuvent entrer partout ou presque. Le problème était de pure forme.
Cette année, comme à Dubaï, c’est un autre sujet qui agite certains esprits : est-il légitime de tenir cette réunion dans un pays qui produit du pétrole, à savoir l’Azerbaïdjan ?
Le graphique ci-dessous (source Energy Institute) donne la liste des pays producteurs d’or noir en 2023 (l’Azerbaïdjan est en bleu pour être plus visible).
Si organiser une COP chez un producteur de pétrole est illégitime (argument aussi utilisé pour Dubaï l’année dernière), alors il devrait être tout aussi répréhensible de le faire en Egypte (2022), en Grande Bretagne (2021), au Pérou (2014), au Qatar (2012), au Mexique (2010), au Danemark (en 2009, le pays était exportateur de pétrole et de gaz !), au Canada (2005), en Argentine (2004, 1998), ou encore en Inde (2002), et il sera évidemment hors de question d’organiser une COP au Brésil, en Norvège, ou en Colombie…
Si les producteurs de charbon sont aussi hors jeu, alors on devrait tout autant protester quand cet événement est en Allemagne (1999, 2001, 2017), en Pologne (2008, 2013, 2018), en Afrique du Sud (2011)…
En fait, l’argument inverse existe aussi : si le but n’est pas la mort du pécheur mais sa rédemption, rien de tel que l’organisation d’une COP dans un pays fortement émetteur ou producteur de fossiles pour que, ensuite, les forces domestiques “pro-climat” ne rappellent en permanence au pouvoir l’importance du sujet.
A ce titre, c’est en Chine, en Russie ou en Inde qu’il serait le plus intéressant d’organiser la prochaine édition ! (on va oublier les USA pour le moment…).
Jean-Marc Jancovici
Source : post linkedin du 11 novembre 2024
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