Antoine Cadi est président de la Station d’observation et de protection des tortues et de leurs milieux (Soptom) basée à Carnoules, dans le Var, dans les Maures et du véhicule financier Restore – biodiversity together. Il nous relate la 16e Cop sur la biodiversité organisée par l’Organisation des Nations-Unies fin octobre 2024 à Cali en Colombie, à laquelle il a participé.
La Conférence des Parties (COP) est l’organe directeur de la Convention sur la diversité biologique (CBD), le traité international adopté lors du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992. Son objectif est d’établir des programmes, des engagements et des cadres d’action pour conserver la diversité biologique et la mettre à profit de manière durable, ainsi que d’assurer le partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques.
La COP a lieu tous les deux ans. En 2024, pour la première fois de l’histoire, la Colombie a accueilli la 16e édition à Cali, capitale du département de Valle del Cauca, du 21 octobre et au 1er novembre 2024. Le slogan « Paix avec la nature » est un appel à la réflexion pour améliorer la relation que nous entretenons avec l’environnement, pour repenser un modèle économique qui ne donne pas la priorité à l’extraction, à la surexploitation et à la pollution de la nature.
COP16 : Un manque de consensus et de dynamique collective
La COP16 s’est terminée avec le report de l’adoption de plusieurs décisions importantes portant sur le cadre de suivi et d’évaluation du cadre mondial de la biodiversité, ainsi que sur la stratégie sur les ressources financières pour générer 200 milliards de dollars d’ici à 2030 (cible 19) pour la biodiversité. Les délégués des pays ont pris beaucoup de temps pour négocier les différents sujets à l’ordre du jour durant ces deux semaines, et la dernière séance plénière qui a duré toute la nuit du 1er au 2 novembre n’aura pas été suffisante pour lever les oppositions. Le quorum des pays représentés n’était plus atteint pour prendre les décisions et l’esprit de consensus et la dynamique collective présents à la COP 15 pour l’adoption du cadre mondial n’étaient plus vraiment présents.
Pour les ressources financières, de nombreux pays du Sud défendaient la création d’un nouveau fonds international pour la biodiversité, critiquant le fonctionnement et l’accès au Fonds pour l’environnement mondial, pour mobiliser les financements attendus. Plusieurs pays du Nord, dont la France, étaient eux défavorables à la création d’un nouveau fonds, considérant qu’il en existe déjà, que sa création prendrait du temps et qu’il faudrait assurer les coûts de son fonctionnement. En dépit de ce blocage, le fonds du cadre mondial pour la biodiversité (Global Biodiversity Framework Fund – GBFF) a été abondé.
Des décisions importantes ont été prises, dont les plus importantes à mes yeux sont les suivantes :
. Au dernier décompte, 44 Etats avaient soumis leur stratégie nationale et 119 pays des objectifs nationaux alignés sur les objectifs internationaux (dont 41 Etats en Afrique), ce qui dépasse les attentes prévues quelques semaines avant la COP ;
. La COP 16 a adopté la création d’un organe subsidiaire pour les peuples autochtones et les communautés locales, leur donnant ainsi une reconnaissance officielle et permanente au sein de la Convention sur la Diversité Biologique ;
. La validation de la création d’un nouveau fonds mondial, le “Fonds Cali”, qui pourra être alimenté par des contributions financières d’entreprises utilisant les informations numériques sur les ressources génétiques, principalement dans les domaines pharmaceutiques et cosmétiques.
Des outils financiers en construction
La journée du 28 octobre a mobilisé un groupe représentatif au niveau mondial de participants du secteur financier (public et privé), pour soutenir la réalisation d’objectifs en accord avec les priorités de la stratégie biodiversité des pays. Les intervenants ont souligné qu’un engagement actif du secteur financier dans la mise en œuvre du GBF était nécessaire et qu’il est finalement une source d’opportunités. Les secteurs financiers publics et privés doivent ainsi collaborer ensemble pour atteindre des résultats positifs pour la nature. L’outil de crédit ou certificat pour la biodiversité a accaparé un certain nombre de discussions, tables-rondes et side-events, montrant un fort potentiel de développement.
Restore, un véhicule dédié aux crédits biodiversité
Parmi les initiatives innovantes et regardées, Restore a été mise en avant, dans le cadre des engagements de la Commission européenne en faveur de la certification des actions envers la biodiversité et des certificats biodiversité, et de l’International Advisory Panel on Biodiversity Credits (IAPB). Restore est un véhicule dédié aux crédits biodiversité, qui offre la possibilité aux acteurs économiques d’investir en faveur de la biodiversité et de s’engager aux côtés de projets en France, en Europe et dans le monde.
Antoine Cadi
Liens utiles :
Biodiversité et finance, on en parle lors des 2e Rencontres de la finance verte et solidaire organisées par Gomet’ le 22 novembre à Marseille.
Le site de la Station d’observation et de protection des tortues et de leurs milieux