C’était un avis attendu. Saisie le 19 décembre 2024 par les préfets coordonnateurs de la façade Méditerranée, l’Autorité environnementale (AE) s’est réunie le 13 mars, à la Défense, à Paris, pour rendre son avis sur la mise à jour du volet stratégique du Document stratégique de façade (DSF) Méditerranée.
Pour rappel, le document stratégique de la façade (DSF) Méditerranée, signé le 4 octobre 2019 par les préfets coordonnateurs de façade, Pierre Dartout, préfet de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, et le vice-amiral d’escadre Laurent Isnard, préfet maritime de la Méditerranée, a pour objectif de coordonner le développement des activités pour réguler les pressions exercées par l’homme sur les milieux marins et littoraux, de façon à atteindre le bon état écologique et de prévenir les conflits d’usage.
DSF : l’avenir de la façade méditerranéenne à horizon 2030-2050
Cette stratégie, qui précise les enjeux pour la façade méditerranéenne et définit une vision de son avenir souhaité à l’horizon 2030-2050, a fait l’objet de compléments qui ont été adoptés par arrêté signé par les préfets coordonnateurs, Christophe Mirmand, préfet de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, et le vice-amiral d’escadre Gilles Boidevezi, préfet maritime de la Méditerranée, le 28 avril 2022.
Parmi ces objectifs, on peut citer :
– des objectifs concrets et quantifiables de préservation de l’environnement marin comme par exemple une régulation de l’impact de l’artificialisation du littoral ;
– des objectifs d’accroissement de l’attractivité économique, comme le développement de l’éolien flottant en mer, à échelle commerciale, sur des zones identifiées
– des objectifs conciliant développement économique et protection de l’environnement marin, comme le soutien à la mise en place de zones de mouillages organisés et la mise en place de services auprès des plaisanciers.
La DSF Méditerranée en chiffres
La façade Méditerranée correspond au littoral des régions Occitanie, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Corse et aux espaces maritimes sous souveraineté ou sous juridiction française bordant ces régions. Elle longe 2 057 km de côte et couvre 111 185 km² dont 24 973 km² d’eaux territoriales et intérieures.
La Méditerranée est une mer quasi fermée, ses eaux se renouvellent lentement. Il s’agit d’un des 34 points chauds de biodiversité mondiale. Bien qu’elle ne couvre que 1% de la surface maritime mondiale, elle abrite 10% des espèces. Il s’agit également d’un espace économique majeur qui regroupe 25% du fret maritime et dont les rives sont peuplées de 200 millions d’habitants.
Conformément au Code de l’Environnement et comme cela est la cas pour chaque plan ou programme soumis à évaluation environnementale, une Autorité environnementale doit donner son avis et le mettre à disposition de la personne publique responsable et du public. Cet avis porte sur la qualité de l’évaluation environnementale présentée, sur la prise en compte de l’environnement par le plan ou le programme et vise à permettre d’améliorer sa conception, ainsi que l’information du public et sa participation à l’élaboration des décisions qui s’y rapportent. L’avis n’est ni favorable, ni défavorable et ne porte pas sur son opportunité.
Le développement de l’éolien en question
Le document stratégique de façade (DSF) de la façade maritime méditerranéenne bénéficie en 2025 d’une révision de sa stratégie avant une mise à jour, prévue au plus tard en 2028, de son volet opérationnel. Le volet stratégique, objet de l’avis, comporte des objectifs environnementaux, encadrés par la directive cadre « stratégie pour le milieu marin » (DCSMM) et des objectifs socioéconomiques en ligne avec la directive cadre sur la planification de l’espace maritime (DCPM). Il vise à atteindre le bon état écologique (BEE) prescrit par la DCSMM. Parmi les objectifs importants figurent notamment l’extension des zones de protection forte à 5 % de la façade, le développement de l’éolien en mer sur trois zones prioritaires pour 4 à 7,5 GW en 2050, et le développement de l’aquaculture.
Dans son avis, l’Autorité environnementale juge l’évaluation environnementale stratégique (EES) « de qualité ». Mais l’assortit de plusieurs réserves. « Néanmoins, tant l’appréciation du bon état écologique que la connaissance précise des pressions souffre de nombreuses incertitudes », souligne-t-elle.
Le « Oui, mais… » de l’Autorité environnementale
L’AE recommande ainsi de renforcer la surface de zones de protection forte à l’est de la façade, de mettre en place des mesures fortes de prévention des collisions entre les navires et la faune dans les zones de protection forte au large, de tenir compte des résultats des recherches pour la mise en place des mesures ERC (« Eviter, Réduire, Compenser ») sur les incidences des parcs éoliens, en proscrivant toute décision irréversible avant de bien connaître les incidences, de dimensionner le développement de l’aquaculture au regard de ses incidences.
Un dossier établi fin avril pour être soumis à la consultation du public
Elle recommande également de développer une stratégie portuaire à l’échelle de la façade ; d’accroître le niveau d’exigence vis-à-vis du tourisme et de la plaisance, en adoptant des prescriptions vis-à-vis des ports, des activités motorisées, de la présence de véhicules sur les rivages et du traitement des eaux usées ; enfin de construire un volet dédié à la diminution des émissions de gaz à effet de serre des activités de la façade.
L’analyse de cet avis est en cours par les services de l’État, afin de le prendre en compte et d’y apporter des éléments de réponse. Ces documents seront versés au dossier qui sera établi fin avril pour être soumis à la consultation du public.
Procédure
Conformément au Code de l’Environnement, l’Autorité environnementale a consulté par courriers en date du 16 janvier 2025 :
• la ministre chargée de la Santé, qui a envoyé une réponse le 6 mars 2025
• les préfets des Alpes-Maritimes, de l’Aude, des Bouches-du-Rhône, de Corse-du-Sud, de Haute-Corse, du Gard, de l’Hérault, des Pyrénées Orientales, du Var
• le préfet de la région Corse, de la région Occitanie, de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur
• le préfet maritime de la Méditerranée
• le directeur général des affaires maritimes, de la pêche et de l’aquaculture
• le directeur général de l’aménagement, du logement et de la nature
Document source : l’avis délibéré de l’AE sur le DSF Méditerranée
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