Gomet’ a présenté vendredi 7 février son baromètre annuel régional des levées de fonds, en partenariat avec Région Sud Investissement et Crowe Ficorec. En préambule, Christian Apothéloz, journaliste pour Gomet’, rappelle la méthode : le baromètre prend exclusivement en compte les entreprises locales, dont les données sont publiques.
L’année 2024 affiche un paradoxe : marquée par une hausse de 6% du nombre d’opérations, soit 46 au cours de l’année, elles ont néanmoins généré moins d’investissements que les années précédentes : 310 millions d’euros, ce qui constitue une baisse de 43% par rapport à 2023.
Hausse des levées de fonds mais baisse des investissements en région Sud
« La région Sud est en retrait. On peut s’interroger : est-ce simplement un phénomène conjoncturel ou une tendance sur le long terme ? L’an dernier, nous étions en troisième position derrière l’Île-de-France et Auvergne-Rhône Alpes. Cette année, d’autres classements nous situent davantage entre la 5e et la 6e place » analyse Matthieu Capuono (Crowe Ficorec). Cette baisse s’explique par plusieurs facteurs : elle s’inscrit dans un premier temps dans une conjoncture nationale de baisse beaucoup plus marquée. Ensuite, la région a manqué de levées de fonds dans certains secteurs stratégiques, à l’instar de la santé, les biotech levant généralement des sommes très importantes. Mais Matthieu Capuono relève la bonne fin d’année 2024 qui augure des perspectives positives pour 2025.
Sur le plan géographique, les résultats sont disparates : on note une forte attraction du Pays d’Aix, boosté notamment par la présence du technopôle de l’Arbois, et qui concentre 134,8 millions d’euros d’investissement soit 35% des levées de fonds. De son côté, la cité phocéenne perd du terrain : on y recense “seulement” 46,7 millions d’euros d’investissements, ce qui s’explique par un nombre important de levées de fonds, mais des montants réduits.
Retrouvez tous les tableaux et les analyses du baromètre 2024 des levées de fonds en région Sud
dans Gomet’ L’Hebdo lundi 17 février 2025
Le spécialiste de la 3D Cintoo (Nice) en haut du podium des levées de fonds
La Côté d’Azur tire, quant à elle, son épingle du jeu et se caractérise par une belle attractivité. « Ce qui est très intéressant, c’est que nous avons un groupement de scale-up, dû à la création d’un collège dédié au sein de la French Tech, qui réunit une soixantaine d’entreprises qui peuvent aspirer à devenir des ETI », souligne Jean-Pierre Largillet, fondateur et rédacteur en chef de Webtime Média, partenaire du baromètre. De fait, c’est Cintoo, basée à Nice spécialiste de la transcription 3D, qui enregistre la plus grosse levée de fonds de l’année, de 37 millions d’euros.
Tout de suite derrière Cintoo, ce sont deux entreprises buccorhodaniennes qui se distinguent ex aequo avec chacune une levée de fonds de 25 millions d’euros : la société Stid (Gréasque) qui développe des solutions d’identification sans contact ; et Hexana (Aix-en-Provence) qui conçoit de petits réacteurs nucléaires modulaires – les fameux “SMR”. « Nous avons levé auprès d’investisseurs industriels comme RN industrie mais nous avons également bénéficié du Blast Club, composé d’investisseurs citoyens. Ainsi 1400 personnes physiques ont investi dans notre entreprise » retrace Paul Gauthé, co-fondateur et directeur de la technologie d’Hexana. Il rappelle l’importance de soutenir l’industrie dans la région marseillaise : « Marseille est une ville industrielle. Certes, ça ne fait pas rêver mais ce sont les produits du quotidien. »
Les entreprises plus « mâtures » plébiscitées
« Nous avons été accompagnés très tôt par les institutions publiques et avons opéré notre première levée de fonds en 2017 », relate Léonardo Hidd Fonteles, cofondateur et directeur de la technologie de Cintoo, qui cible notamment le secteur de la construction en proposant de concevoir des jumeaux numériques 3D de bâtiments, pour éviter les erreurs de conception. Pour la directrice financière Linda Ataoui, un autre élément a pesé dans la balance : celui de l’expérience des entrepreneurs : « Cintoo est une start-up constituée d’experts dans leur domaine. »
Une remarque approuvée par Pierre Joubert, directeur général de RSI : « la séniorité de l’équipe est un élément fondamental pour les investisseurs », confirme-t-il. Il estime par ailleurs quelle baromètre 2024 démontre la résilience de la région Sud et prévoit un bon début d’année 2025, avec un deal-flow dynamique, alimenté notamment par un effet de rattrapage.
Les toutes jeunes pousses ne sont pas en reste et, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ne dissuadent pas les investisseurs. Pour preuve, les dix plus jeunes entreprises du classement, dont la dernière née est Bitstack, représentent 60 millions d’euros d’investissements. Et ce malgré les difficultés qui peuvent se dresser devant elles. « 2023 a été une année très difficile pour les jeunes entreprises. Il y a eu beaucoup de casse. Mais les politiques publiques de financement de l’innovation portent leurs fruits » se réjouit Stéphanie Schohn d’Aktantis, le Pôle de compétitivité mondial dédié aux technologies deeptech. Elle note aussi que, sur l’ensemble des entreprises ayant levé des fonds, 75% proviennent d’entreprises issues d’un pôle de compétitivité.
Parmi les jeunes entreprises, Trust Place, fondée en 2020 à Marseille, a levé en septembre 2024, à l’issue d’un an de processus, quatre millions d’euros auprès d’un investisseur américain. « Nous voulions tout de suite attaquer à un marché d’ampleur internationale », explique Gaëlle Delore, co-fondatrice de Trust Place. Avec sa plateforme de certification digitale, Trust Place permet aux entreprises commerçantes comme aux clients d’avoir une traçabilité de leur produit, y compris lorsqu’il est vendu en seconde main. Le concept marseillais a déjà séduit plusieurs grandes maisons parisiennes, à l’instar d’Isabelle Marant, Chloé ou encore Ligne Rosée. La preuve que le territoire ne manque ni de créativité, ni de savoir-faire…
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