Le moulin de la Coquillade, niché dans un coin tranquille du plateau de Puyricard, quartier situé à douze kilomètres du centre d’Aix, est en passe de retrouver sa splendeur d’antan. Ce projet de restauration, porté par l’Association pour la restauration du patrimoine ancien (ARPA), basée à Aix-en-Provence, mobilise non seulement la population locale mais également des experts et des bénévoles venus de toute la région et d’au-delà. Ce moulin, autrefois témoin de l’histoire agraire de la région, pourrait bientôt revivre en tant que lieu pédagogique et culturel, selon la volonté de la communauté locale et de ses restaurateurs.
L’ARPA a été fondée en 1981 par Jean-Pierre Couelle, fontainier et maçon, avec pour mission de « défendre le patrimoine de toutes les façons possibles ». Le premier projet emblématique de l’association a été la restauration d’un oratoire à Aix-en-Provence. Par la suite, l’ARPA s’est engagée dans la préservation du petit patrimoine, en rénovant des fontaines et des portes. Aujourd’hui, la restauration du moulin de la Coquillade représente son projet le plus ambitieux.
Le moulin de la Coquillade : un héritage provençal
Le moulin de la Coquillade porte un nom issu de l’alouette huppée, appelée « coquihado » en provençal. Ce lien avec la faune locale est l’une des rares traces historiques expliquant l’origine de son appellation. Érigé en pierre vers la fin du XVIᵉ ou début du XVIIᵉ siècle, ce moulin est un exemple typique de l’architecture provençale. À l’époque, ces moulins étaient bâtis pour tirer parti des vents dominants, comme le Mistral. Bien que le moulin de la Coquillade ait perdu sa toiture, ses mécanismes et ses escaliers, ses murs en pierre épaisse ont bien résisté au passage du temps. La tour cylindrique du moulin, autrefois surmontée d’un toit conique, s’inscrivait dans un paysage parsemé de moulins qui, au XVIIᵉ siècle, animaient la Provence, notamment dans des villes comme Arles et Avignon. À son apogée, cette région comptait des centaines de moulins, piliers de la vie rurale et économique.
Un chantier au service du patrimoine, d’Aix, de la Provence et des habitants de Puyricard
Le moulin de la Coquillade appartient à l’institut « Les Parons », une institution spécialisée dans l’accompagnement des personnes autistes. Ayant reçu en donation un terrain de sept hectares, Les Parons ont signé en 2018 une convention autorisant l’ARPA à prendre en charge la restauration de ce moulin situé dans un angle non cultivé du domaine. Depuis, le projet avance avec détermination, et ce malgré l’attente d’un permis de construire qui devrait être délivré d’ici le début de l’année 2025.
« Dès son lancement, le projet a suscité un fort engouement, non seulement parmi les habitants de Puyricard, mais aussi au-delà », raconte Pierre Dussol, président de l’ARPA. « Le comité d’intérêt de quartier de Puyricard et les élus municipaux, notamment le maire Sophie Joissains, ainsi que Marie-Pierre Sicard Desnuelle, élue au patrimoine, se sont rapidement engagés dans cette initiative. L’adjointe au maire de Puyricard, Perrine Meggiatto, a également joué un rôle actif », poursuit-il.
La mobilisation s’est traduite par des actions concrètes telles que le nettoyage du terrain, le tri des pierres et même la restauration du puits situé à proximité du moulin, lequel renferme encore de l’eau ! « C’est un projet fédérateur pour le quartier de Puyricard », observe Pierre Dussol. « Il y a quantité de talents, au sein de notre association et dans notre région, qui ne demandent qu’à s’exprimer », complète-t-il, invitant les personnes intéressées à s’engager dans la restauration du moulin à vent de Puyricard.
Des entreprises locales ont soutenu l’initiative en fournissant du matériel ou en réalisant des relevés 3D détaillés du bâtiment. Architectes, ingénieurs et entrepreneurs se sont également investis, apportant leur expertise technique indispensable à la restauration. Le chantier, bien que toujours en attente de certaines autorisations, reste actif et entretenu. Michele Deltour, bénévole à l’ARPA, se souvient d’une étape cruciale : le déblayage autour du moulin, une mission presque archéologique. « Le jour où nous avons trouvé les dalles, nous avons hurlé de joie ! » raconte-t-elle avec enthousiasme. Laissé à l’abandon depuis 1830, un amas de végétation et de déchets encerclés le moulin, « on a trouvé de tout, de la ferraille, des bouteilles, des chaussures …», ajoute-elle. Le chantier mobilise une vingtaine de bénévoles, et une centaine de personnes ont manifesté leur intérêt pour le projet de restauration.
Un projet pédagogique et culturel en devenir
Au-delà de la restauration de ce patrimoine provençal unique, l’ARPA ambitionne de donner une nouvelle vocation au moulin. Le projet serait de transformer ce lieu en un espace pédagogique où seraient fabriqués farine et pain, avec des démonstrations à destination des élèves des écoles et collèges de la région. « Des recherches historiques ont mis en lumière l’existence d’une ancienne variété de blé propre à la région de Puyricard. Si elle venait à être retrouvée, ce blé permettrait de produire un pain unique, renouant ainsi avec une tradition locale oubliée », développe Serge Fontenelle, bénévole à l’ARPA. L’association souhaite engager à terme un meunier.
Sur le plan financier, le projet nécessite un investissement considérable. « À titre d’exemple, la restauration du moulin des Pennes Mirabeau a coûté environ 600 000 euros », communique Jean-Marie Ballester, bénévole à l’ARPA. Bien que le budget exact pour le moulin de la Coquillade ne soit pas encore défini, l’ARPA entend compter sur les aides de la Fondation du patrimoine, des collectivités locales, de la fondation du Crédit Agricole, ainsi que des mécènes privés. L’association note que le dépôt de dossier de demande de subventions publiques et privées est prévu pour la fin de l’année 2024.
Alors, même si le pain du moulin n’est pas prêt d’être dur, le projet de restauration de l’ARPA pétrit déjà de belles réussites.
Liens utiles : Vous pouvez contacter l’ARPA au 04 42 96 91 50 et ou par email : moulin.coquillade@gmail.com / Chaîne Youtube de l’ARPA (images, vidéos de Alain Chastenet) > L’actualité à Aix-en-Provence à suivre sur Gomet’