Après la victoire du Printemps Marseillais aux élections municipales, la Fondation Jean Jaurès revient dans deux notes sur ces élections pour tenter de comprendre les raisons de la défaite de la droite sortante. La première s’intéresse à l’électorat de la coalition de partis de gauche et de citoyens. Tandis que la seconde en décrypte la campagne à travers le récit de l’une des candidates, Olivia Fortin.
Le 1er août dernier, un mois après l’arrivée à la mairie de Marseille, la Fondation Jean Jaurès publiait son analyse des résultats des élections municipales pour tenter d’expliquer ce « basculement historique ».
Intitulé « Comment la gauche néo-marseillaise a éjecté la bourgeoisie locale », le rapport observe l’évolution de l’électorat à Marseille marquée par la forte mobilisation d’une « gauche culturelle » en phase avec le « renouvellement de casting » que proposaient les listes hétéroclites du Printemps Marseillais.
Au sein de cette gauche culturelle, regroupant « professions culturelles et intellectuelles des secteurs public et associatif » et « les jeunes diplômés », se distingueraient les « néo-marseillais ». Un électorat fraichement installé, symbole du renouvellement de la population et de la gentrification que Marseille a connus ces quinze dernières années. Un phénomène que décrit également l’anthropologue Michel Péraldi (lire notre interview) avec ceux qu’il qualifie de « classe créative précaire. » Un phénomène qui se concentre principalement au centre de la ville, dans les 1er, 6e et 2e arrondissement (*) où les « scores du PM y ont étés supérieurs à 30% au premier tour soit plus de six points au-dessus de sa moyenne (23,44 %) » précise la note fruit d’une enquête de terrain du géographe Sylvain Manternach et du journaliste et essayiste Jean-Laurent Cassely.
Cartographie et chiffres à l’appui, les auteurs remettent en contexte le rôle « symbolique » sinon « statistique » de ce nouvel électorat qui ne peut à lui seul expliquer la victoire du Printemps marseillais:
- L’abstention, déjà pointée du doigt lors des précédentes élections dans un rapport précédent, a « décuplé le poids de cet électorat surmotivé ».
- Marseille n’est pas un cas isolé. Cette opposition entre un électorat « rajeuni » et « culturellement favorisé » à une population « vieillissante » plus « aisée » a touché d’autres villes comme Lyon et Bordeaux avec la victoire d’une union d’écologiste, de la gauche et de la société civile.
- Le traditionnel clivage gauche/droite ne permet pas de rendre compte des élections municipales. Un nouveau morcellement géographique est mis en avant et propose une nouvelle lecture de la sociologie de la ville. L’étude parle d’un affrontement entre « deux styles de vie ».
Nouvelle fracture territoriale autour de deux styles de vie
Déjà mise en avant aux lendemains des élections présidentielles de 2017**, Marseille connait une scission entre l’est et l’ouest de la ville soit entre le « centre et la périphérie » qui vient dépasser le clivage nord/sud maintes fois médiatisé. Marseille serait désormais divisée entre une « gauche de centre-ville » et une « droite périphérique ».