La Métropole Aix-Marseille Provence a voté en juin 2019 son plan vélo avec l’ambition de créer 280 kilomètres d’aménagements cyclables. Un an et demi plus tard, le collectif Ramdam a organisé une table-ronde vendredi 11 décembre, avec les responsables des différentes collectivités (Département, Métropole et Ville de Marseille), pour faire un point sur l’avancement des projets.
Dans les Bouches-du-Rhône, la pratique du vélo peine à décoller avec une part limitée à 2% dans les moyens de locomotion choisis par ses habitants qui privilégient encore beaucoup la voiture. Dans son plan vélo, la Métropole s’est fixée l’objectif d’atteindre les 5% à l’horizon 2024 et promet la réalisation de 16 grandes voies cyclables dont la moitié à Marseille pour y parvenir. « La volonté de la Métropole de développer les déplacements est réelle et ce plan vélo le prouve », assure Patrick Ghigonetto, maire de Ceyreste et vice-Président voirie et infrastructures du Conseil de Territoire Marseille Provence invité à la conférence de Ramdam.
« Il faudra bientôt le même temps pour réaliser une piste cyclable qu’une voie ferrée »
Jean-Yves Petit
Un calendrier trop long
Seulement, un an et demi après l’adoption officielle de ce plan vélo, peu d’actes concrets ont suivi. A l’occasion d’une réunion mercredi 8 décembre entre la Métropole et la Ville de Marseille sur le sujet, « la décision a été prise de lancer le concours pour les études sur la partie Nord de la ligne 1 », annonce-t-il comme dernière avancée. A ses côtés, la nouvelle adjointe en charge des mobilités à la Ville de Marseille, Audrey Gatian, s’inquiète de la lenteur du processus et pointe des « délais très longs avec cette mise en œuvre envisagée en 2024 ». Le président de Ramdam, Jean-Yves Petit, sort lui-même un instant de son rôle d’animateur pour alerter la Métropole : « Nous constatons un risque, confirmé par les dernières annonces, d’allongement de la durée de réalisation des pistes cyclables et, qui plus est, au « compte-goutte ». Il faudra bientôt le même temps pour réaliser une piste cyclable qu’une voie ferrée, ce n’est pas acceptable ! », prévient-il.
L’administration de l’Etat accusée de bloquer les projets
Face à ces critiques, le maire de Sénas, Philippe Ginoux, conseiller métropolitain délégué au schéma d’ensemble de la voirie, tente d’expliquer les raisons de cette difficile mise en œuvre : « L’Etat met souvent des bâtons dans les roues de ces projets, accuse-t-il. Quand on lance un projet de piste cyclable, on déborde souvent sur les espaces verts et on touche ainsi à la biodiversité. Il faut alors en référer au conseil national de protection de la nature et on peut attendre parfois deux ans une réponse sans pouvoir avancer », dénonce-t-il.
Pour le Département, le directeur des routes, Christophe Pauchon, met également en avant « le manque de foncier disponible ». Et Philippe Ginoux de renvoyer encore une fois la balle à l’Etat : « Ici, encore, il pourrait aider car il est propriétaire de nombreux terrains qu’il pourrait mettre à disposition », insiste-t-il. Si l’argument est entendu par les associations, Jean-Yves Petit rappelle tout de même le plan vélo de 150 millions d’euros annoncé par le gouvernement cet été (porté à 350 millions dans la loi de fonaces 2021) « qui n’est peut-être pas encore suffisamment utilisé », estime le président de Ramdam. A Marseille, qui regroupe tout de même la moitié des grandes voies cyclables prévues par le plan vélo, le problème est différent avec un tissu urbain plus adapté à la création de nouvelles pistes cyclables. « Encore faut-il que les aménagements existants soient suffisamment sécurisés pour encourager leur utilisation », rappelle Audrey Gatian.
Coronapistes à Marseille : rendez-vous en janvier avec les maires de secteur
Depuis cet été, Marseille a vu naître plusieurs pistes cyclables temporaires en centre-ville, les fameuses « coronapistes ». En attendant la concrétisation du plan vélo métropolitain, elles peuvent d’ores et déjà permettre aux cyclistes de mieux se déplacer dans la ville « mais un coup de peinture ne suffit pas », insiste Audrey Gatian. « La plupart des marquages au sol sont très rapidement effacés par le passage des voitures car elles ne sont pas séparées des voies de circulation automobile », regrette-t-elle.
L’adjointe de la maire Michèle Rubirola souhaite donc pérenniser ces coronapistes mais elle avoue ne pas avoir encore trancher certaines questions : « Dans certains cas, comme sur le boulevard Baille, la pérennisation de la coronapiste à son emplacement actuel entrainerait automatiquement la suppression des places de stationnement. On réfléchit donc à cette option ou à la déplacer pour ne pas supprimer le stationnement », explique-t-elle. Ces questions ont été soulevées lors de la réunion du 8 décembre avec la Métropole tout comme celle des pistes plus anciennes qui ne sont pas suffisamment sécurisées. « Elles ne doivent plus être sur le trottoir », rappelle Audrey Gatian qui prend en exemple la piste du Prado « où ça ne marche pas car les vélos sont en conflits avec les piétons ». Si la voie vélo du Prado datent de plusieurs années, la Métropole ne semble pas avoir appris de ses erreurs car sur la partie réhabilitée du Jarret, récemment livrée, « il y a encore des pistes sur le trottoir », regrette-t-elle. Autant de remarques qu’elle a communiqués à la Métropole lors de la dernière réunion du 8 décembre assure-t-elle.
Message reçu affirme Patrick Ghigonetto qui donne rendez-vous aux maires de secteurs et aux élus de la mairie centrale pour une nouvelle réunion en janvier : « A ce moment-là, vous nous donnerez une liste de voies à modifier pour les améliorer », répond le vice-président du conseil de territoire.