À quelques jours de premier tour des présidentielles 2022, alors que se multiplient les sondages, jetons un regard en arrière sur ce qui fut la seule expression souveraine des citoyens, les élections de 2017. Cinq années se sont écoulées effectivement, qui ont certainement bousculé des certitudes et fait bouger les lignes. Il y eut des élections, le raz-de-marée des législatives pour les candidats inconnus macroniens, les européennes avec un résultat honorable dans les Bouches-du-Rhône pour la majorité présidentielle, puis l’improbable vote des municipales et enfin les alliances détonantes des régionales et des élections départementales. Ces scrutins montrent que l’électorat est fondamentalement volatil, que les ancrages que l’on croyait indéboulonnables ne font plus les scores électoraux, que le moindre vent contraire peut faire vaciller les bases des partis.
Revenir au vote de 2017, c’est regarder simplement comment la population des Bouches-du-Rhône, à ce moment-là, avant les gilets jaunes, avant la pandémie, se positionne sur les candidats nationaux.
Un second tour Mélenchon Le Pen…
Flash-back : selon vous, si les présidentielles n’avaient eu lieu que dans les Bouches-du-Rhône quels auraient été tes les deux candidats en lice au second tour ? Le prisme bucco-rhodanien fait que chacun aurait été tenu de choisir, ici, entre Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon ! En effet au premier tour, Marine Le Pen réunit 286 397 électeurs, elle atteint 27,28 % des exprimés, elle est suivie par Jean-Luc Mélenchon, à 22 %, puis par François Fillon qui frôle les 20 % et Emmanuel Macron ne fait en Provence que 19,4 %. Dans les grandes villes du département, le résultat est tout aussi contrasté : à Aix-en-Provence, le second tour, s’il ne s’était déroulé qu’à Aix-en-Provence aurait opposé François Fillon qui a rassemblé 27,4% des voix et Emmanuel Macron qui fait un de ses meilleurs scores de la région à 26 %.
Mais dans le reste du département, dans une ville socialiste comme Vitrolles Marine Le Pen est en tête avec près de 34%, suivie par Jean-Luc Mélenchon. Même podium dans la ville communiste de Martigues, où le même duo se retrouve en tête avec un Emmanuel Macron qui atteint tout juste les 17% en troisième position. À Aubagne, passée à droite lors des dernières municipales, après des décennies de gestion communiste, on trouve toujours le même binôme Le Pen – Mélenchon en tête du scrutin, François Fillon y dépasse Macron d’un point a près de 18 %.
Ralliements d’élus et bulletins de vote
On l’a compris. Il ne sert à rien d’analyser les votes du territoire métropolitain pour se projeter au plan national. On retrouve parfois ces fondamentaux aux scrutins suivants. Jean-Luc Mélenchon a compris qu’il y avait à Marseille une terre d’élections et il s’y est fait élire brillamment dans le 1/7, les supporters de François Fillon vont retrouver leur stock électoral aux départementales.
La carte de Marseille intra-muros avait révélé déjà la même fracture à l’œuvre depuis des décennies : au sud la droite, au nord et au centre la gauche et l’abstention. À l’est, le Rassemblement national. Qu’en sera-t-il dans quelques jours dimanche soir ?
Le scrutin devra répondre à trois questions
- Le bloc Rassemblement national hyper représenté dans le département sera-t-il fissuré parle par la dérive zémourienne, ou malgré les rodomontades de Stéphane Ravier, retournera-t-il au vote utile pour Marine Le Pen ?
- La gauche réconciliée à Marseille grâce au Printemps marseillais se retrouvera-t-elle dans les urnes, sur les candidats éclatés Yannick Jadot, Philippe Poutou, Anne Hidalgo ou Jean-Luc Mélenchon ?
- Enfin la droite marseillaise, dont une grande partie des leaders vient de rallier la majorité présidentielle, emportera-t-elle avec ses personnalités des bulletins pour le président sortant dans des arrondissements qui en 2017 l’avaient boudé : le 8e donnait 35% à Fillon, le 9e, 26% et le 6e, 25% ?
Telles sont les trois questions de dimanche soir, sachant que les réponses conditionnent les législatives sans qu’il y ait d’automatisme. La relecture des scores de premier tour et la carte des députés macroniens de 2017 ont surpris nombre de sortants. Un raz de marée qui n’a rien d’automatique. Il y a une seule constante dans l’électorat marseillais et régional, c’est une envie irréfragable de transgresser, et un goût certain pour sortir les sortants.
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