Montres, smartphones, bâtiments, véhicules… Sunpartner veut imposer sa technologie partout où l’on trouve des surfaces vitrées. La start-up de Rousset a inventé un film photovoltaïque souple et transparent permettant aux objets du quotidien de produire de l’énergie. Déficitaire depuis sa création en 2008, la société a dû lever plus de 50 millions d’euros pour financer le développement de ses produits. Aujourd’hui, elle enregistre ses premiers succès commerciaux d’envergure et prévoit d’atteindre l’équilibre à la fin de l’année 2018.
Le smartphone, premier débouché prometteur
« Depuis le départ, nous avons cherché des moyens d’intégrer le photovoltaïque dans les usages du quotidien en miniaturisant les composants et en utilisant un film optique lenticulaire », raconte le dirigeant-fondateur de l’entreprise, Ludovic Deblois. Pour ce faire, il s’est entourant des meilleurs spécialistes en recrutant des ingénieurs et des doctorants de chez ST Microelectronics, de chez Gemalto ou encore Texas Instrument… Son implantation à Rousset, en voisin de ces grands groupes de l’électronique, a grandement facilité ses recherches. Sunpartner a également multiplié les partenariats avec les laboratoires du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), très en pointe sur le photovoltaïque. Ses travaux ont débouché sur de nouvelles technologies prometteuses et la société s’est en premier tourné vers le marché de la téléphonie avec le boom des smartphones. En 2014, elle a présenté au Mobile World Congress de Barcelone un premier appareil Alcatel équipé de son écran Wysips Crystal. Grâce à une dalle truffée de cellules photovoltaïques, ce dernier pouvait se recharger en quelques heures d’exposition au soleil. Un an plus tard, Sunpartner dévoilait un deuxième smartphone, cette fois-ci, avec le fabricant spécialisé dans les appareils durcis Kyocera. Il ne s’agit plus alors de recharger la batterie entièrement mais de prolonger l’autonomie de l’appareil grâce une exposition prolongée et de permettre une charge minimum pour passer les appels d’urgence. Si la technologie impressionne, le succès commercial reste timide. Sunpartner n’abandonne pas pour autant ce segment, surtout que la PME peut compter sur le soutien de NTT Docomo, premier groupe de télécommunications japonais, qui est entré à son capital en 2014. Elle serait d’ailleurs en négociation avec d’autres partenaires pour le lancement de nouveaux produits. En attendant, l’entreprise pourrait bien connaître la gloire avec un autre marché en explosion : le bâtiment durable.
Une joint-venture avec Vinci pour la fenêtre intelligente
En décembre dernier, Sunpartner a annoncé la création d’une joint-venture avec Vinci pour le développement d’une nouvelle fenêtre autonome et intelligente baptisée Horizon. Ce système s’apparente à une fenêtre à double vitrage où dans l’interstice entre les deux vitres vient se loger une surface qui combine un panneau photovoltaïque Wysisps et le verre opacifiant Sageglass de Saint-Gobain. Ce dernier incorpore un matériau qui change de teinte lorsqu’il est parcouru par de l’électricité. En jouant sur le courant, la vitre peut ainsi foncer ou s’éclaircir à la demande. « L’opacification apporte le confort d’un store et permet un gain de 30% de la consommation des systèmes de climatisation », affirme Ludovic Deblois. L’utilisateur peut directement lui envoyer une commande via son smartphone pour régler la luminosité à sa convenance. En outre, la fenêtre Horizon peut communiquer avec la gestion technique du bâtiment. Sunpartner a développé une plateforme technologique permettant d’envoyer des données précise comme la température, la teneur de l’air en dioxyde de carbone ou la présence de personnes dans la salle…
Une levée de fonds ou une entrée en bourse dans l’année
Les premières commandes sont attendues dans quelques semaines et les premières livraisons interviendront dès cet été. Grâce à la puissance commerciale de Vinci, l’entreprise va pour la première fois passer à la phase d’industrialisation sur Rousset. L’entreprise a investi 8 millions d’euros sur son siège avec notamment une ligne de production sur une surface d’atelier de 1 200 m2. La production visée est d’abord de 30 000 m2, opérationnelle avant septembre, puis de 150 000 m2 par an à l’horizon 2019. « Et nous allons rapidement devoir monter en puissance jusqu’à 300 000 m2 par an rien que pour le marché européen », avance le patron. Pour soutenir cet effort, il va devoir une nouvelle fois faire appel aux investisseurs. Une grosse levée de fonds de plusieurs millions d’euros est en cours. Il n’écarte pas non plus l’hypothèse d’une introduction en bourse dans le courant de l’année. Pour les fenêtres, ses ambitions sont mondiales car il envisage à terme de réaliser 30% du chiffre d’affaires hors-Europe : « Mais pour la production et la commercialisation sur les autres continents, nous créeront d’autres joint-venture avec des partenaires étrangers », précise Ludovic Deblois.
Conquérir les transports dans les deux ans
Après le bâtiment, son activité la plus forte est le marché des montres connectées. Au dernier CES, il a présenté LunaR, une montre hybride alimentée grâce au solaire développée en partenariat avec le Hong-kongais MED. Wysips permet d’augmenter de 50% son autonomie. La technologie de Sunpartner lui ouvre de belles opportunités dans bien d’autres secteurs comme le transport, certainement la prochaine priorité de l’entreprise. Elle travaille sur un hublot d’avion connecté avec Vision System et sur un système de vitres opacifiantes pour les TGV. Pour l’automobile, l’entreprise entrevoit également de beaux débouchés notamment grâce aux fonctions connectées de plus en plus présents dans les véhicules et qui ont besoin de fonctionner sans le démarrage du moteur. « Nous devons rapidement nous positionner pour pénétrer le marché dans deux ans au plus tard », prévient Ludovic Deblois. En attendant, il table sur un bond du chiffre d’affaires de 2,4 millions d’euros en 2015 à 10 millions d’euros cette année. L’équipe doit également passer de 70 à plus de 110 salariés dans les 18 mois.