Astrophysicien, citoyen engagé à gauche, ancien président du conseil de développement de Marseille Provence Métropole, Jacques Boulesteix est notamment l’auteur de « Entre peur et raison, La métropole Aix-Marseille-Provence » (éditions de l’Aube, 2015). Il a publié de nombreuses tribunes (*) sur Gomet’. Il réagit ici aux annonces du président Emmanuel Macron. Le président de la République vient d’effectuer un déplacement à Marseille de trois jours (1er au 3 septembre) et a présenté plusieurs initiatives dans le cadre d’un plan d’actions intitulé “Marseille en grand”.
Le Président de la République est donc venu à Marseille pour réaffirmer que l’Etat apportera toute son aide à la seconde ville de France et à son aire métropolitaine. C’est un élément majeur. En leur temps les premiers ministres Jean-Marc Ayrault (2013), puis Manuel Valls (2015 et 2016) avaient déjà promis quelques milliards qui se font toujours attendre. Cette fois-ci, c’est le Chef de l’Etat en personne qui a annoncé des investissements « massifs » de l’Etat pour un territoire qu’il considère en situation d’urgence « sécuritaire, sociale et sanitaire ».
Des urgences trop longtemps occultées
Ces trois urgences sont évidentes. Le scandale de la catastrophe de la rue d’Aubagne, la mise au grand jour du délabrement inouï des écoles et la ghettoïsation insécuritaire d’un tiers toujours plus appauvri de la ville, ont visiblement changé la donne. Pendant 20 ans, les responsables politiques locaux avaient préféré « mettre la poussière sous le tapis » et repousser les problèmes. Et pas que les responsables municipaux !
Moins de Métropole, c’est aussi moins d’activité économique, moins d’emplois et plus de pauvreté
Car, à l’incurie de la gestion municipale des deux dernières décennies, s’ajoutent les incohérences des financements des autres collectivités, soit pour des raisons politiques soit pour des raisons structurelles. L’Etat a également joué à l’autruche, alors qu’il aurait pu, depuis longtemps, initier une stratégie à l’échelle de l’aire métropolitaine. Toutes ces années, chacun a voulu, en quelque sorte, tirer profit de la faiblesse des autres. Durant 50 ans, nous n’avons élaboré aucun projet à l’échelle métropolitaine. Et pour cause ! Si certaines communautés urbaines ont été constituées dès la fin des années 1960, Marseille a été la dernière grande ville française à voir son aire métropolitaine politiquement structurée, en 2016. Et encore, largement avec l’opposition d’une majorité de communes… Cela nous a coûté cher. Lyon a 50 ans d’expérience métropolitaine. Sa métropole a fusionné avec une partie du département du Rhône dès 2015. Corrigée du nombre d’habitant, la région lyonnaise affiche une activité économique 20 % plus importante et presque 100 000 emplois de plus que dans la métropole marseillaise. Le taux de pauvreté est de 18,6 % pour la métropole marseillaise, contre 16,1 % pour celle de Lyon.
La nécessité d’une réforme législative
Reconnaissons au Président de la République d’avoir analysé que, sans l’effort de l’Etat, et sans doute sans son autorité, il n’y aura pas de rétablissement. Il a été également clair sur un point : la Métropole est inefficace et « a du mal à porter des projets d’intérêt commun ». C’est le point central. Dans un style très direct, il a insisté sur la nécessité de régler « les problèmes d’organisation et de gouvernance ». « Sinon, je ne mets plus d’essence dans un système qui continue à garder les mêmes freins. C’est non. » … « Il faudra peut-être modifier la loi et moderniser à un rythme forcé. Sinon ça ne marchera pas. »