Quel est votre sentiment sur l’avancement de l’Agenda de la mobilité métropolitaine ?
Jean-Yves Petit : C’est un agenda de bonne facture, tout le monde le reconnaît. Le problème, c’est sa mise en œuvre : l’ensemble des financements ne sont pas là pour qu’il y ait une réalisation assez rapide. Après il y a des choses qui avancent comme le Métro express. Mais à l’opposé, nous ne retrouvons pas de rupture dans la politique de stationnement. Il y a un besoin rapide et immense d’agir pour qu’on stoppe le stationnement sauvage, qu’on libère les aménagements cyclables, qu’on libère les trottoirs pour les piétons, qui représentent plus de 30% dans la répartition des différents modes de mobilité à Marseille par exemple. Il ne ressort pas une politique vraiment dédiée au mode actif (piétons et vélo). Il faut arrêter avec le tout voiture. On nous a dit que la présidente de la Métropole et du Département va faire des annonces sur le développement d’un réseau cyclable. Nous sommes optimistes. Nous avons demandé à disposer d’une ligne budgétaire dédiée au mode actif, notamment au vélo. Dans la contribution qu’on avait remise à la Métropole, nous proposions qu’il y ait au moins 30 millions d’euros par an. La réponse qu’on a c’est qu’il va y avoir de l’argent. A quel niveau ? Nous ne le savons pas. Un autre sujet qui ne ressort pas assez : la pollution de l’air. Nous dépassons allègrement les seuils européens en termes d’émission de particules. Sur le département, on a quand même une estimation de 1 200 décès prématurés liés à cette pollution. Et puis, il faut revoir les plans de circulation dans les différents pôles urbains de façon à ce que l’on arrive à contrer la congestion routière quotidienne. Autour de Marseille, c’est 35 000 heures perdues chaque jour dans les bouchons et 10 jours par an pour quelqu’un qui fait Aix-Marseille chaque jour, c’est énorme ! C’est un vrai sujet qui sous-entend des difficultés sociales et économiques. Cela ne ressort pas assez alors que l’agenda évoque le mot de rupture, je pense qu’il y a besoin d’affirmer cette volonté de rupture.
La Métropole prévoit également un Plan de déplacements urbains. Quel en est-il ?
J-Y. P. : Le PDU est le bras opérationnel de l’Aménagement urbain de la mobilité. L’idée est d’affirmer plus précisément les nécessités par rapport au territoire, aux enjeux climatiques et environnementaux. Ils en sont à la mise en place de la concertation avec le réseau associatif, les exploitants lignes routières, la SNCF, les élus territoires, le conseil développement de la Métropole etc. et d’un comité de pilotage élargi auquel Ramdam participera. L’objectif pour nous c’est d’essayer de faire prendre en compte un certain nombre d’enjeux qui ne ressortent pas assez aujourd’hui. L’échéance pour voter définitivement le PDU c’est courant 2019 donc cela va aller assez vite.
Hormis un meilleur partage de la voirie, la lutte contre la pollution de l’air et la révision des plans de circulation, quelles sont vos revendications ?
J-Y. P. : Lorsqu’on est intervenu à la journée sur l’Agenda mobilité et le PDU, nous avons mis en avant les inégalités territoriales. Selon où l’on habite, on va avoir une impossibilité de se déplacer en transport collectif, notamment les week-ends, tôt le matin ou tard le soir. Les gens sont obligés de prendre leur voiture, ce qui entraine des coûts de déplacement élevés. Dans la périphérie de la Métropole, grand nombres de ménages sont de ce fait confrontés à une précarité énergétique. La métropole est un grand territoire, donc il y a réseau ferré qui a son importance et qui joue un rôle. Avec la création de la Métropole nous sommes en droit d’attendre la mise en place d’une sorte de RER métropolitain. Aujourd’hui les lignes de TER sont plutôt confrontées à une régression et une dégradation de la qualité de l’offre sur différentes lignes, que ce soit la Côte bleue, Marseille-Aubagne etc. On nous explique que c’est pour faciliter une meilleure gestion des trafics. C’est incompréhensible de supprimer à partir de décembre des liaisons directes entre La Ciotat et Aubagne et l’aéroport, entre Marseille Provence et Miramas, des trains directs sans passer par St Charles mais la Blancarde, ce qui réduisait les temps de parcours et permettait des liaisons directes d’est en ouest de la métropole. Nous avons du mal à comprendre comment dans une zone internationale, Euroméditerranée, avec le port et des grandes entreprises, on supprime la connexion ferroviaire directe avec l’aéroport Marseille Provence et les zones d’habitats jusqu’à Miramas, alors qu’on est en train de voir pousser les tours, que le nombre de salariés dans le périmètre ne cesse d’augmenter tout comme les habitants. Cela nous semble aller à l’opposé du fait métropolitain. La Métropole va nous dire que c’est la Région, ce qui est vrai. Mais à un moment, il faudra que leurs liens se resserrent pour qu’il y ait une offre de transport bien complémentaire, un partenariat, comme avec pass métropolitain qui est très intéressant.
Quelle est la place du vélo dans le PDU ?
J-Y. P. : Nous demandons la mise en place d’un système global qui, a priori, est bien pris en compte par la Métropole. Il ne faut pas raisonner de façon segmentée par rapport aux aménagements liés au vélo. Si on fait des pistes cyclables, pour que ça marche, il faut des parkings à vélo sécurisés, des plans de circulation adaptés, une bonne information tant des cyclistes que des automobilistes, il faut utiliser le numérique avec des applications comme Géovélo… Nous avons fait un travail de reconnaissance sur le terrain depuis trois ans et en avons remis une première partie à la Métropole puisqu’elle nous a soutenu sur le projet la Métropole à vélo. Notre objectif c’est qu’on ait un véritable réseau métropolitain, qui s’appuie également sur ce que prévoit le Département. En 2019, nous allons organiser une cyclo-randonnée d’une semaine. On va faire le tour de la Métropole pour aller au contact des maires et entendre les différents acteurs. D’autant plus qu’on a un problème sur cette Métropole car la voirie est partagée : une grosse partie de la voirie est encore dans les communes et les maires ont un rôle à jouer. L’objectif c’est de les convaincre que le vélo est positif, qu’ils soient actifs et parties prenantes dans l’émergence du réseau cyclable métropolitain. Dans le premier trimestre 2019, nous organiserons aussi une grande rencontre publique sur « Quelle place pour le vélo et les modes actifs dans la Métropole ? ».
Le gouvernement a dévoilé un plan vélo et souhaite notamment tripler la part du vélo dans les déplacements d’ici 2024. Quel est votre sentiment vis-à-vis de ces mesures ?
J-Y. P. : C’est très intéressant. Nous avons rencontré des responsables vélo de la Dreal (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement) le 6 décembre. On a discuté de ce plan et nous avons compris qu’eux et l’État étaient très motivés pour développer des réseaux cyclables urbains, pour cofinancer et financer la suppression des points durs par exemple, de régler ce type de difficulté.
Sortons du territoire de la Métropole Aix-Marseille Provence. Comment les autres se mobilisent sur la question ? Avez-vous des modèles ?
J-Y. P. : Au niveau cyclable, la Métropole ne part pas de zéro mais presque. Si vous allez à Bordeaux, Strasbourg, Lyon, Dijon, en Allemagne ou en Suisse, vous allez voir qu’ils sont à l’heure sur les aménagements cyclables. D’ailleurs, ces beaux exemples montrent que c’est possible. Je pense que nous sommes confrontés à un problème culturel dans la Métropole, où la voiture a toujours eu une place très importante. Il faut parvenir à modifier cela. Le nombre de ménage sans voiture dans les centres urbains peut aller de 20 à plus de 50%. Sur le département on est autour de 23%. Les comptages effectués par le réseau associatif montrent qu’il y a de plus en plus de cyclistes, tant sur Aix que sur Marseille.
Liens utiles :
> La ministre des Transports soutient le Métro Express de la Métropole Aix-Marseille Provence
> La contribution de l’association RAMDAM au Plan de déplacements urbains