Élémentaire, le premier des gestes barrières demande de l’eau et de l’eau potable ! Le président de l’Institut méditerranéen de l’eau, Alain Meyssonnier, rappelle, dans cette tribune (*) pour Gomet’, que 20% de l’humanité n’a pas accès à l’eau potable et plaide pour que le monde développé ne se focalise pas uniquement sur la pandémie qui le frappe, mais prenne aussi en compte les pandémies mortelles qui tuent des centaines de milliers de personnes, et surtout des enfants, au Sud.
Originaire de Marseille et de ses quartiers populaires, comme La Belle de mai, Alain Meyssonnier est passé par le lycée Jean Perrin, puis il a fait l’Essec. Son service réalisé dans la coopération à Saint-Domingue fera de lui un globe-trotter. Il rejoint le SEM, la Société des eaux de Marseille, développe le business phocéen en Amérique latine pendant 20 ans. Commercial dans un monde d’ingénieur, d’hydrauliciens, il se voit confier l’exploitation de Marseille au moment, en 2003, où naît la communauté urbaine Marseille Provence Métropole et donc, où change le contrat de délégation de service public du Groupe des eaux, filiale maintenant de Veolia. En 2014, il reprend sa casquette internationale et depuis 2017 est en charge de l’international et des nouveaux partenariats du groupe. Conseiller du commerce extérieur de la France, fondateur du réseau Africalink, il est président de l’Institut méditerranéen de l’eau, un réseau professionnel d’influence et d’action en Méditerranée.

Le premier geste barrière rappelé à chaque instant par les responsables de santé et les médias dans le monde entier, c’est : « Lavez-vous les mains régulièrement » ! Sauf qu’aujourd’hui 20 % de la population mondiale n’a toujours pas accès à une eau potable et plus de 30 % à un système d’assainissement digne de ce nom.
Comme le Covid-19, les maladies hydriques tuent aussi tous les jours
Le Covid-19 tue chaque jour des milliers de personnes dans le Monde et c’est un grand malheur pour les familles atteintes par la pandémie, mais les maladies hydriques tuent également tous les jours, par milliers et principalement des enfants. La grande différence avec le Covid-19, c’est qu’il tue en Chine et en Asie d’où il est parti, mais également et surtout en Europe et en Amérique principalement des personnes âgées et nous sommes tous touchés, riches ou pauvres, de près ou de loin par cette nouvelle pandémie.
Au niveau mondial, le nombre de décès dus au paludisme a été estimé par l’OMS à 405 000 en 2018 dont 272 000 enfants de moins de 5 ans
Alain Meyssonnier
Certains parlent d’un avant et d’un après Covid-19 alors que personne ne parle d’un avant et d’un après paludisme qui continue chaque jour de tuer par milliers en Afrique, Asie et Amérique latine avec les autres maladies hydriques. Au niveau mondial, le nombre de décès dus au paludisme a été estimé par l’OMS à 405 000 en 2018. 272 000 enfants de moins de 5 ans, les plus vulnérables en sont morts cette année-là dans le monde. La région Afrique de l’OMS a enregistré 94 % des décès liés au paludisme dans le monde. Selon le Rapport sur le paludisme dans le monde 2019, « près de 85 % des décès dus au paludisme dans le monde en 2018 ont été concentrés dans 20 pays de la région Afrique de l’OMS et en Inde. Le Nigéria a représenté à lui seul près de 24 % de ces décès, suivi par la République démocratique du Congo (11 %), la République Unie de Tanzanie (5 %), ainsi que l’Angola, le Mozambique et le Niger (4 % chacun) ».
À quand l’accès à l’eau potable et l’assainissement pour tous ? Nous ne connaissons pas encore toutes les retombées de cette nouvelle pandémie, en termes de santé publique, mais aussi sur le plan du développement économique des pays de l’OCDE et bien entendu des pays en voie de développement avec ses conséquences en termes de survie. Mais espérons qu’elle mobilisera au-delà des experts, les sociétés civiles du monde entier sur l’urgence de donner accès à l’eau potable et à l’assainissement à tous et qu’enfin les dirigeants de la planète considèrent cet enjeu comme leur premier devoir.
Pour nous recentrer sur la Méditerranée « Hot Spot mondial », s’il en est en termes de stress hydrique, la disponibilité d’eau douce pourrait encore diminuer de 10 à 15 % au cours des 20 prochaines années alors que la population continue de croître et que le développement économique et du tourisme sur toute la région connaissent également une perspective de croissance continue en dehors de la parenthèse Covid-19. Cela ne manquera pas d’imposer également de nouvelles contraintes pour l’agriculture qui représente sur la région entre 70 et 80 % des usages. Cette année, en juin prochain les pays du Maghreb s’attendent à une baisse de l’ordre de 50 % de leur production de céréales.