Avenir Télécom est une entreprise mutante : du garage fondateur comme dans une histoire californienne à l’opérateur internet, du réseau de 800 boutiques implantées dans 10 pays aux 36 millions d’euros en obligations convertibles levés à Dubaï en passant par la case tribunal de commerce, l’entreprise est toujours là, insubmersible, ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre.
Aux manettes, à l’origine, Jean Daniel Beurnier, un entrepreneur qui a la double appétence de la technologie et de la vente, autrement dit qui détecte dans l’innovation ce qui va changer les habitudes, les comportements, donc les marchés. Un homme ? Non un binôme, car dans l’ombre de Jean Daniel Beurnier, délibérément discret, intervient son associé de la première heure : Robert Schiano-Lamoriello. Pas une photo de cet alter ego sur internet. Autant Jean Daniel Beurnier prend la lumière, autant celui qui partage à égalité les investissements, les choix, les revenus et les galères reste en retrait. Ce binôme tient depuis 1989, une exception dans le monde de l’entreprise, où les alliances fondatrices ont souvent du mal à passer le cap. On se souvient que les managers d’Accor Dubrule et Pélisson avaient dû embaucher un psychologue pour pouvoir se parler.
L’entreprise naît dans un garage
Le binôme d’Avenir Télécom a tenu le choc avec le concours précise Jean Daniel Beurnier, de la DAF la directrice administrative et financière Véronique Hernandez-Beaume. L’entreprise naît donc dans un garage où les pionniers installent des téléphones qui ne sont pas encore portables mais transportables dans les voitures et où ils vendent des téléphones fixes et des répondeurs.
L’arrivée du mobile et d’Internet est l’opportunité pour le décollage. Avenir Télécom ouvre des call-center pour répondre aux inquiétudes des nouveaux usagers, un centre de réparation pour produits électroniques mobiles et devient opérateur internet. En 2001, l’éclatement de la bulle internet a failli les emporter. Du clic, les fondateurs passent au mortar. Les opérateurs télécom n’ont qu’une volonté prendre des parts de marchés partout dans le monde, face à leurs concurrents et faire bouger les lignes. Des milliers de boutiques s’ouvrent pour vendre, expliquer, maintenir ces millions de portables qui équipent les familles en nombre. Des réseaux se constituent. Avenir Télécom devient, face à Phone House, un des premiers réseaux par croissance interne et par rachat d’enseignes comme Interdiscount. L’entreprise est entrée en Bourse, elle a les moyens de se développer. 4 000 salariés, 800 boutiques dans une dizaine pays, : les dirigeants d’Avenir Télécom sont alors souvent dans les avions et le siège des Rizeries boulevard de Plombières est une ruche internationale.
Jusqu’à la crise de 2008, crise financière qui rebat les cartes de la téléphonie. Les opérateurs structurent leurs propres réseaux, réduisent les marges des distributeurs et Free bouscule les prix à la baisse. Internity la marque d’Avenir Télécom sera une des dernières à fermer.
Le groupe se replie, mais les engagements sont trop élevés et les coûts de la restructuration sont impossibles à supporter. Avenir Télécom se met sous la protection du Tribunal commerce, qui ouvre, le 4 janvier 2016, une procédure de redressement judiciaire, assortie d’une période d’observation de 6 mois, prolongée jusqu’au 4 juillet 2017.