Les notes de conjoncture et les conférences se suivent et affichent désespérément de bons chiffres ! Sauf pour le tourisme et l’événementiel. Un seul exemple, selon la Banque de France : « Dans l’industrie, la croissance de la production évolue positivement (12,8%), et se situe à un niveau supérieur à celui attendu en début d’année (+ 6 points). Cette situation est issue d’une forte demande et des carnets de commande au plus haut qui ont induit une forte sollicitation des capacités de production. Pour répondre à la clientèle voire se prémunir des risques liés aux difficultés d’approvisionnement, certaines industries ont avancé leur calendrier d’investissements, à l’origine d’une progression importante (+ 39 %). La situation de l’emploi évoluerait légèrement (+ 0,7 %). »
La question, après une crise, se résume selon nos économistes à un choix entre trois lettres le « L, » le « U », le « V ». La reprise ou plutôt la non reprise en « L » est celle de 2008, nous avons connu un petit rebond en 2009, vite terrassé par des politiques fiscales, sociales, économiques déprimantes, tant pour l’investissement que la production. La France a alors décroché, jusqu’à ce que des mesures vigoureuses, depuis 2017 relancent la machine. La non-reprise en « L » est la hantise de nos gouvernants. Elle n’a pas eu lieu. Pas plus que le « U », avec une lente descente aux enfers et une sortie fatiguée du marasme. Les courbes de la Banque de France comme de la CCI présentées dans le cadre du RDV de la conjoncture de la CCI métropolitaine Aix-Marseille-Provence CCI AMP) mardi 28 septembre à Aix-en-Provence, affichent toutes ce « V » tant attendu.
83% des chefs d’entreprise considèrent avoir une activité normale ou être en suractivité
Entre le 12 juillet et le 17 septembre 2021, 480 chefs d’entreprise ont répondu à l’enquête de la CCI AMP sur le 2e trimestre 2021 et les perspectives pour le 2e semestre 2021. Résultat : « une entreprise sur deux a retrouvé un chiffre d’affaires supérieur ou égal à celui d’avant la crise » alors que les plus optimistes des prévisionnistes attendaient un retour à bonne fortune pour 2022.
« La reprise est indiscutable, l’État a joué son rôle, le cash est là, sauf dans les secteurs liés au tourisme ».
Maurice Wolff
Plus même « 83 % des chefs d’entreprise considèrent avoir une activité normale ou être en suractivité ; 22 % des chefs d’entreprise envisagent une progression de leur activité. » Signe encore plus positif, la reprise de l’investissement dans l’industrie est de 39%, que la Banque de France recalcule, hors effets conjoncturels dus aux matières premières, à 12,9 %. Les services continuent cependant à encaisser les contres chocs de la pandémie avec une baisse de l’investissement de 12 %, mais une progression des emplois de 1,9 %.
Pour Maurice Wolff vice-président de la CCIAMP « la reprise est indiscutable, l’État a joué son rôle, le cash est là, sauf dans les secteurs liés au tourisme ».
La mariée serait-elle trop belle ?
Il reste que cette reprise peut en inquiéter certains. D’abord avec le risque d’inflation, avec les tensions sur les matières premières et les semi-conducteurs : « Il y aura un ajustement des marchés » prévoit Jean-Christophe Ehrhardt, directeur régional de la Banque de France. La crainte est aussi que le marché de l’emploi ne change avec des demandes salariales croissantes. On a dépassé le million d’offres d’emplois disponibles à Pôle emploi. Maurice Wolff note que dans son entreprise (GIE LAE 13, logistique et la gestion administrative des entreprises de transport sanitaire, de personnes et de produits sanguins, NDLR), il n’y a pas une semaine sans qu’un salarié n’évoque la question salariale. « Le recrutement, affirme-t-il, exige un changement comportemental ; nous étions dans un recrutement passif, en piochant dans la pile des CV, il faut faire autrement, aller dans les écoles, donner du sens, promouvoir l’alternance dans les PME ».
Jean-Christophe Ehrhardt refroidit les ardeurs des optimistes ou simplement réalistes. Le représentant régional de la Banque de France, en gardien du temple de l’orthodoxie, redoute que la baisse des dépôts de bilan ne soit qu’un report. « Nous avons une moyenne régionale de 5 000 défaillances par an, calcule-t-il. Nous sommes à 3200, il y aura un effet rattrapage de 1 800 entreprises ». Heureusement la gestion n’est pas qu’une calculette et l’on peut espérer que, ayant résolu leur problème de trésorerie, grâce au PGE, une grande part des entreprises fragiles passeront le cap et retrouveront, avec la croissance, une exploitation saine.
Le mur de la dette est devant nous
Jean-Christophe Ehrhardt
La vraie question reste de celle du remboursement des PGE. Nous l’avons énoncé ici, les entreprises se sont endettées, non pour générer de la valeur, mais simplement pour perdurer. Or un crédit, fut-il participatif, ne se justifie et ne se rembourse que par une hausse de la production de biens et services donc de valeur. « Le PGE était un anesthésiant, assène Jean-Christophe Ehrhardt, le mur de la dette est devant nous » . « Les mesures de renforcement de fonds propres pour transformer les PGE comme le crédit participatif sont une usine à gaz », dénonce Maurice Wolff. Les outils existent concède Jean Christophe Ehrhardt « mais il manque des instruments pour les PME, comme les fonds de retournement adaptés et des financements du cycle d’exploitation. »
Si l’on faisait une pause dans le scepticisme français, chacun devrait se réjouir de ce rebond inespéré. Chacun doit y apporter sa pierre : pour encourager l’investissement, favoriser le recrutement, désendetter en douceur les PME.
Documents source: la conjoncture métropolitaine (CCI AMP) et régionale (Banque de France)
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