Ils avaient anticipé la crise. Dès le 13 mars, soit quatre jours avant le début du confinement, le président d’Aix-Marseille Université, Eric Berton, et ses équipes se réunissent pour organiser le plan de continuité pédagogique, face à l’imminence de mesures drastiques pour éviter la propagation du covid-19. Télétravail pour les agents administratifs, cours à distance pour les étudiants, via la plateforme Ametice, déjà familière des étudiants, sur laquelle ils accèdent aux documents qui les concernent ou leur planning.
Après deux semaines d’enseignements à distance, les étudiants et professeurs sont cependant toujours en rodage. Pour Juliette, étudiante en master 1 de droit à Aix-en-Provence, plutôt adepte des cours en présentiel, qui permettent un lien plus direct avec l’enseignant, des détails restent à régler : « certains professeurs savent s’organiser, d’autres non : ils nous balancent des notes de 200 pages de jurisprudence, en guise de cours ». En outre, pour les matières dispensées en groupe restreint, comme les travaux dirigés, l’étudiante ne comprend pas pourquoi la solution de la visioconférence, pourtant largement plébiscitée pour le télétravail, n’a pas été envisagée : « cela aurait mieux, pour pouvoir échanger avec l’enseignant ». Pour autant, « il faut reconnaître qu’il aurait été difficile de faire autrement, vu la situation. L’université a plutôt été réactive, dans l’urgence », reconnaît Juliette. Ce n’est pas le même son de cloche du côté de certains syndicats étudiants, qui relaient les inquiétudes transmises par les étudiants : « globalement, les étudiants sont très anxieux […]. On constate une absence totale d’harmonisation sur la façon dont sont dispensés les cours à distance : certains professeurs font des Facebook live, d’autres transmettent des PDF indigestes, ou demandent aux étudiants d’acheter des livres pour compléter le cours », résume Lyes Belhadj, trésorier de l’Unef Aix-Marseille.
Pas tous égaux dans l’enseignement à distance
Mais quid des étudiants qui n’ont pas accès à la plateforme, ceux concernés par une fracture numérique qui reste une réalité pour beaucoup de jeunes ? Lisa étudie en troisième année, une année charnière pour valider sa licence. Or, le contexte n’est pas le plus épanouissant pour accomplir cet objectif : « nous sommes sans nouvelles de certains profs, alors que nous sommes au courant de la situation depuis plus de deux semaines », s’inquiète l’étudiante, qui peine déjà à récupérer les cours : « j’habite dans un petit village de 500 personnes, nous n’avons pas encore la fibre et internet saute toutes les deux heures ». Une situation qui n’est pas sans conséquences sur le moral : « il est extrêmement difficile de se concentrer et de travailler à distance, que ce soit en raison du contexte familial ou du fait d’être enfermé toute la journée dans une même pièce », témoigne la jeune fille.
Du côté de l’université, aucune solution n’a pour l’heure été trouvée pour les étudiants dans ce cas de figure, même si des pistes sont explorées : « Nous allons mettre en place d’un fonds de solidarité, avec nos partenaires, comme la Région, afin de venir en aide financièrement aux étudiants les plus démunis, et leur permettre d’acheter du matériel informatique ; nous négocions également des abonnements internet avec les opérateurs», expose le président Eric Berton. Une mesure déjà prévue dans le programme de la présidence, dont la mise en œuvre a largement été accélérée par la crise sanitaire et la nécessité de s’organiser. Malgré tout, « nous n’avons pas de solution miracle pour qu’à l’instant T tous les étudiants aient un ordinateur et une solution », souligne Lionel Nicod, vice-président à la formation, mais «à l’échelle des formations, un grand nombre de responsables essayent d’entrer en contact avec chaque étudiant individuellement par téléphone ». Aix Marseille Université tente actuellement de recenser les étudiants qui nécessiteraient un prêt de matériel durant leurs enseignements à distance. Un sondage a également été lancé à l’échelle de l’Université pour répondre aux divers besoins des étudiants en cette période de crise. A ce jour, ce questionnaire aurait suscité 25 000 réponses d’étudiants, dont près de 3000 souhaitant être mis en contact avec des psychologues, médecins ou assistantes-sociales.
Aix Marseille Université : quel impact sur les modalités d’examen ?
Autre sujet de préoccupation pour l’université : l’organisation des examens et concours, étape indispensable du cursus étudiant, qui se déroule généralement vers avril-mai. Là encore « le maître mot est de garantir l’équité entre tous les étudiants », assure le vice-président à la formation. Or, face à l’inconnue de la fin du confinement, difficile de s’organiser. Pour l’heure, plusieurs solutions sont à envisager : «nous préférerions tenir les examens en présentiel avec une période de révision conséquente, ce qui nous permettrait d’accompagner les étudiants en fracture numérique spécifiquement, mais rien ne nous garantit que le calendrier le permettra ». Enfin, le contexte exceptionnel devrait être pris en compte dans les modalités d’évaluation : « Cela ne signifie pas néanmoins que la crise du covid 19 justifiera à elle seule la validation du semestre pour tous les étudiants et l’obtention du diplôme », prévient Lionel Nicod. Une réponse insuffisante pour l’Unef qui réclame « la mise en place d’un 10 améliorable (une notation comprise entre 10 et 20) pour le second semestre, car pour l’instant, les chances de réussite à cette session d’examen sont sérieusement remises en question ».
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