La Ville de Marseille est lauréate du programme européen des 100 villes neutres en carbone d’ici 2030 (notre analyse). Aux côtés de ses partenaires, la mairie va rédiger un “contrat ville climatique”, sorte de feuille de route des projets à venir. Elle doit notamment convaincre l’Europe de financer un maximum d’actions pour le territoire. Sur le plateau de Planète locale, émission diffusée sur BFM Marseille avec Gomet’ en partenaire, l’adjoint marseillais en charge des financements européens, Fabien Perez (EELV), répond aux questions de la rédaction.
Marseille, l’une des villes les plus polluées de France, est lauréate du programme européen des 100 villes neutres pour le climat.
Fabien Perez : C’est merveilleux que Marseille ait eu ce label. Nous étions outsiders. Plusieurs villes en Europe ont abandonné leur candidature au motif que ce n’était pas crédible d’atteindre la neutralité carbone en 2030. Pour Marseille, c’était audacieux, mais lorsqu’on a fait un déplacement avec le maire à Bruxelles, on a eu un accueil très favorable des commissaires européens qui nous ont dit : « vous savez, l’idée de ce projet, c’est d’atteindre la neutralité carbone en 2030, pour réussir ensuite l’objectif de neutralité carbone au niveau de l’Europe en 2050. Pour cela, on a besoin de sélectionner 100 villes qui seront des villes pilotes. Elles feront émerger des solutions qui seront réplicables à l’échelle de l’Europe ». Donc il faut qu’une ville comme Marseille, qui est un port méditerranéen, puisse être dans le lot. Si Marseille réussit sa transition, on peut imaginer que toute l’Europe pourra la réussir en 2050.
Vous avez deux chantiers prioritaires, les deux plus gros émetteurs d’émissions à Marseille : le transport (38%) et le logement (26%). Il y a un chantier pour lequel vous avez la compétence, et l’autre pas. Comment allez-vous travailler ?
F. P. : On a jusqu’à la fin de l’année pour rédiger un contrat de ville, pour déterminer la feuille de route avec 17 projets phares qu’on va mettre en avant. Des projets qu’il faudra faire valider par l’Europe, et on les portera, afin d’obtenir des financements pour chacun d’entre eux. Mais ce n’est pas limitatif, on pourra d’ailleurs en ajouter en cours de route. Effectivement, la question qui se met en place aujourd’hui, c’est celle de la gouvernance. On va établir cette feuille de route en partenariat avec la Métropole, puisqu’une grande partie des compétences relève de cette institution, mais également avec la Région, qui va nous aider pour obtenir ces financements européens. Une grande partie de ces projets ont déjà été établis dans notre candidature. Les deux point noirs du territoire marseillais concernant les émissions de gaz à effet de serre, vous l’avez souligné, ce sont le transport et le logement. Donc nos projets phares porteront sur ces deux points là.
La neutralité carbone, c’est avant tout un changement de comportement.
On sait qu’il faut changer notre mode de vie si on veut atteindre la neutralité carbone d’ici sept ans.
Fabien Perez
Vous parlez de la gouvernance. Marseille a plus de 150 partenaires pour ce programme européen (grand port, CCIAMP, AMU etc). Quelle sera l’implication de chacun dans les projets à venir ?
F.P. : Il y a plusieurs points. Le partenariat avec les collectivités, avec lesquelles on va mettre en place des politiques publiques, notamment au niveau des transports. Un deuxième point consiste à faire émerger des politiques privées, à accompagner les entreprises pour les aider à accélérer cette transition dans leur mode d’activité. Et puis le troisième point, et c’est le point essentiel qu’on oublie un peu ; la neutralité carbone, c’est avant tout un changement de comportement ; c’est-à-dire, la sobriété énergétique. La capacité à mobiliser les citoyens. C’était d’ailleurs un point clé sollicité par la Commission européenne. On sait qu’il faut changer notre mode de vie si on veut atteindre la neutralité carbone d’ici sept ans.
Comment impliquer les citoyens dans ce programme ?
F. P. : On va mettre en place une assemblée citoyenne du futur, pour que les Marseillaises et les Marseillais puissent être acteurs des décisions à prendre. Elles sont souvent douloureuses. Mais on a la chance que ça se fasse dans le cadre de ce projet. On va être accompagné par des experts, et surtout par des fonds européens conséquents. Il y a une vraie motivation. Là où on était outsider, on va essayer de devenir leader au niveau européen, en matière de transition écologique. Donc ça va créer une dynamique.
On va développer les pistes cyclables, et tout cela dans un temps très court.
Fabien Perez
Quels types de décisions douloureuses ?
F. P. : Il faut absolument développer des alternatives à la voiture, réduire son usage dans le centre-ville. La ZFE (zone à faibles émissions) ne sera pas suffisante. L’idée, en ce qui concerne les transports, c’est de faire des parkings relais à chaque entrée de Marseille. On voit bien que c’est une ville carencée en matière de transport. On va développer les pistes cyclables, et tout cela dans un temps très court. L’Europe nous accompagne sur une période de sept ans.
Rénovation des bâtiments d’Aix-Marseille Université, réhabilitation de la gare Sain-Charles… Tous ces projets vont nécessiter des dizaines de millions d’euros. Combien Marseille peut espérer obtenir de l’Europe ?
F. P. : Beaucoup des projets de notre candidature sont des projets qui étaient déjà dans les tuyaux. Ils avaient vocation à émerger sur une décennie ou deux. Grâce à cette candidature, on va essayer de les livrer avant 2030. Aujourd’hui la question que tout le monde se pose, c’est : « combien d’argent pour Marseille ? ». C’est pas ça l’esprit de la Commission. C’est plutôt : « faites émerger des projets crédibles pour atteindre une neutralité carbone. Faites en émerger le plus possible ». Ensuite, il y a une grille, au niveau de la Commission. « Ce projet on le finance, selon certains critères, à 50, 60 ou 80% ». À nous ensuite de trouver des financements croisés auprès des autres collectivités pour finaliser ces projets.
À quelle date sera signé le contrat ville climatique qui détermine votre feuille de route ?
FP : On a une réunion avec la Commission le 13 mai pour connaître le calendrier de rédaction de ce contrat ville climatique. Mais, a priori, on devra le déposer d’ici décembre, à la fin de l’année. Donc là, on dispose de quelques mois pour rédiger cette feuille de route.
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