Mais tu n’es pas là…
Après avoir soumis à la question Jean-Claude Gaudin, Laurent Joffrin, directeur de la rédaction de Libération, a récidivé, en toute logique, avec Jean-Luc Mélenchon. Un entretien où il est confirmé que l’attachement du leader des Insoumis à la ville dont il est un des députés, est limité à quelques jours par semaine, le parlementaire étant logé du reste chez un ami « absent ». Cela n’empêche pas notre oiseau de passage de s’intéresser à l’avenir électoral et municipal. On notera sans surprise qu’il est favorable à un collectif de bonnes volontés plutôt qu’à un homme (ou une femme) providentiel. Il souhaite voir « fédérer le peuple » dit-il, sans dire par qui. L’hypothèse de sa candidature n’est pas envisagée, malgré la situation de la ville qu’il juge désastreuse et en partie aggravée par les agissements ou l’inaction de l’Etat. Pour sa relation jugée par beaucoup à gauche urticante avec le maire sortant, Mélenchon se justifie, en dressant en creux, des lauriers à son hôte marseillais qui achève sa carrière : « J’ai déjà observé cela avec de grands personnages et je sais que la souffrance est accrue dans ces circonstances. Je l’ai revu, il m’offre beaucoup de livres, je suis toujours bien reçu. » Et ce qui ne manque pas de sel cette affirmation : « J’ai passé l’âge de sauter à la gorge des gens qui ne sont pas de mon avis. » Il ajoute malgré tout, pour garder son rang de révolutionnaire en chef, une philippique : « Le défi, c’est d’empêcher cette vieille caste locale de perdurer moyennant des arrangements plus ou moins douteux. » On respire, on le croyait définitivement perdu pour sa cause.
Lagarde et la dérive des Républicains
François Mitterrand qui avait la dent dure, même après avoir fait raboter ses incisives, estimait que « le centre est une variété molle de la droite ». Dans un pays où on est avec, ou sans culotte, la saillie n’étonnera pas. Jean-Christophe Lagarde, de passage à Marseille a mis le doigt sur une autre forme de mollesse ; celle de Renaud Muselier président de la région à s’engager dans la bataille des Européennes. En sortant du bureau du Marseillais, le président de l’UDI a expliqué que Muselier « soutient les Républicains » mais en ajoutant « qu’il y a une forme de dérive chez LR qui ne correspond certainement pas à ce que pense Renaud Muselier ». Il faudra sans doute attendre un peu, avant de savoir si le président de la Région Sud pense que sa formation politique a perdu le nord. Au nom d’un sage adage, il n’insultera pas l’avenir, et attendra la fin mai pour dire qui sera chargé à Marseille, de remettre la balle au centre pour poursuivre le match.
H comme humour ou comme haine
Il faut avoir lu la défense de Stéphane Ravier sénateur du rassemblement national pour y croire. Citant son ennemie intime et néanmoins collègue au Palais du Luxembourg, l’élu d’extrême droite a cru faire un trait d’humour impérissable : « la sénatrice Samia Ghali, c’est le point G de Marseille » a ricané celui qui s’est déjà distingué par une misogynie crasse à propos du viol. Mme Ghali a légitimement porté plainte pour l’outrage, qui a suscité une vague de protestations. « Je n’accepte pas que Mme Ghali et son amie Mme Schiappa viennent me faire la leçon (…). Cette phrase sur le point G ce n’était rien du tout » s’est maladroitement défendu Ravier. Et pour ajouter à la confusion, de porter plainte à son tour pour diffamation. Celui qui est candidat à la mairie de Marseille devrait relire quelques anecdotes sur l’effet boomerang de l’humour douteux. On rapporte que Sacha Guitry s’en prenant à sa maîtresse osa lui lancer « sur votre tombe on écrira, « enfin froide ». Yvonne Printemps lui rétorqua aussitôt « sur la vôtre on écrira, « enfin raide ». L’humour n’est pas à la portée du premier Ravier venu.
Là c’est nulle part
C’est une brasserie plutôt à la mode proche de la place de Castellane. Mais comme souvent à Marseille, c’est côté service que ça pêche. Malheur à celui qui s’installe à la place où il ne faut pas être, qui est l’inverse de ce qu’on appelle en anglais « the place to be ». Il y a de fortes chances, si vous vous calez là avec, circonstance aggravante, un journal à la main, qu’on vous oublie ou qu’on vous raye tout simplement du monde des vivants. C’est à Aix, aux Deux Garçons, qu’un jour de grande solitude, un serveur m’a expliqué le pourquoi de la chose. « On divise, avant de prendre notre service la salle en carrés, mais là cette table, elle n’est nulle part, donc on ne la sert pas ». Dans la ville du Roy René, les deux G ont été construits en 1660, ce qui en fait une institution. Raimu, Jouvet, André Maurois, Churchill, Piaf, Cendrars, Trenet, Delon, Belmondo, Tino Rossi, Jean Cocteau, Darius Milhaud, y ont siroté quelques liqueurs. Cézanne y a partagé quelques secrets avec son ami Emile Zola. Cela n’excuse pas pour autant qu’on oublie un client, même au nom d’un usage. A Marseille on n’a même pas d’alibi historique. Misère.
Les bêtes et la bêtise
Cette fois-là il s’agissait d’un requin bleu que des imbéciles ont filmé et diffusé pour faire les malins sur les réseaux sociaux. Son agonie a dû réjouir quelques sombres abrutis, les yeux rivés sur leurs petits écrans. A l’Estaque des scientifiques sont venus dans le même temps au secours d’une femelle de la même espèce. La Métropole vient de signer un partenariat avec la ligue de protection des oiseaux et le conservatoire d’espaces naturels Paca, pour récolter les données sur la faune et la flore de la Côte Bleue, avant de l’étendre au département. Il faut s’en féliciter, comme il est plus que temps de sensibiliser les jeunes générations sur ce patrimoine qui sera demain dilapidé, si on n’en prend pas soin. Et un désert terrestre ou aquatique sur un iphone, «ça le fait pas », comme on dit dans les cours d’école.
Trois vérités plutôt qu’une
On dit que la vérité sort de la bouche des enfants. Au collège Sylvain Menu dans le 9e arrondissement de Marseille la pédagogie tient compte des problématiques contemporaines. Ainsi dans ce secteur plutôt privilégié de la ville, des sixièmes ont planché sur un quartier éloigné et si différent du leur. Ils ont imaginé Belsunce en 2030, avec un souhait exprimé dans leurs schémas et commentaires : ne pas chasser les populations qui y vivent.
On dit que toute vérité est bonne à dire. Dialogue capté sur une terrasse du centre entre deux copains. « Ce pizzaïolo, je ne sais pas comment il vit, il est presque tous les jours fermé ? » Réponse de l’autre qui sait, lui: « Non mais il travaille à la mairie, alors il ouvre quand il peut. » Et Hamon, Besancenot et Mélenchon qui veulent réduire le temps de travail !
On dit beaucoup de contre-vérités. Chez un coiffeur du centre commercial de La Valentine. Un client : « C’est pas Macron qui dirige, il fait que porter la parole des francs-maçons et des sionistes ». Un ange est passé et ce n’était pas Saint Valentin.