Au 13 octobre, 4 000 logements étaient projetés pour la fin d’année avec de multiples et fortes probabilités de reports sur 2021. Année qui s’annonce mal, puisque les reports de permis 2020, les tergiversations des communes sur le logement social, les difficultés d’investissement des bailleurs sociaux, vont produire leurs effets bien en deçà des cibles officielles jamais réalisées. « La crise sanitaire et les élections locales, relève l’AR HLM dans son analyse, ont totalement bouleversé les conditions de l’activité. Interruption de la filière de délivrance des permis de construire, élection tardive de gouvernances locales souvent réservées sur l’urbanisation, voire la production de logements sociaux, ont considérablement ralenti le processus d’agrément des opérations. On doit aussi mentionner la situation politique marseillaise où un consensus entre la Ville et la Métropole est à trouver autour d’une politique de l’habitat ». « Il faudrait, demande Pascal Friquet au nom de l’AR HLM, apaiser les tensions sur le logement social, les bailleurs sociaux sont des alliés des territoires, il est temps de redonner aux organismes HLM leur fonction « contracyclique » en période de crise, en facilitant leur accès au foncier. »
Un marché de l’ancien dopé
Le marché de l’ancien est une valeur refuge. Les ménages qui ne peuvent accéder à des appartements neufs à 380 000 € ou des maisons individuelles à 324 000 € (souvent hors Marseille) forment une clientèle fléchée vers l’ancien. Et les néomarseillais recherchent le cachet des appartements haussmanniens. Carole Bataillard, pour la Chambre des notaires note que « le marché est resté très dynamique avec une augmentation du volume des ventes généralisée sur l’ensemble du département des Bouches du Rhône. Les notaires comptabilisent 7 944 ventes entre le 1er juillet 2019 et le 30 juin 2020 soit 1 135 transactions supplémentaires dont plus de la moitié sur Marseille. Le prix médian y est de 2 700 € (avec des grandes disparités avec 1 360 euros dans le XIVe arrondissement et plus de 3 000 euros dans le XII°). Les transactions portent majoritairement sur des appartements de type 2 et 3 d’une superficie de 40 à 60 m2. »
Cherche bailleur privé désespérément
Le marché locatif est à la peine malgré une demande plus que soutenue. À Marseille dans le département le logement social est majoritairement un logement privé. Après l’accident meurtrier de la rue d’Aubagne, est apparu en pleine lumière, un marché de la misère où des bailleurs sans scrupule et même des élus locaux ont investi dans des appartements miséreux, mais revenu garanti grâce aux APL, voire grâce aux loyers non déclarés. Mais cette partie visible et souvent scandaleuse ne doit pas oblitérer le fait chiffré et majeur : le bailleur privé est une espèce qui se raréfie. « L’offre des particuliers, calcule l’UNIS, est passée en quelques années sur Marseille de 7 000 appartements à 2 700. De 2014 à 2020, l’offre des T4 est passée d’environ 600 à 280 appartements, les T3 de 2 100 à 800, les T2 de 2 200 à 900 et les studios de 1 900 à 600.
Pour Jean Berthoz, président de l’Union des syndicats de l’immobilier Marseille Provence Corse, ces tensions ont « quatre causes :
- Le développement croissant des locations de courtes durées, qui de ce fait entraîne un appauvrissement du marché locatif de longue durée.
- Le déficit de constructions neuves qui, compte tenu des demandes croissantes de logements, ne parvient pas à satisfaire la demande locative.
- Le fait que les locataires déménagent de moins en moins souvent.
- Les familles monoparentales dont la conséquence est le besoin de deux logements pour la même famille ».
Très clairement le passage vers Airbnb de nombre d’appartements a appauvri le parc locatif. Mais le métier de bailleur lorsqu’il n’est pas « industrialisé » est devenu ingérable. Les délais pour expulser un locataire qui ne paie plus son dû dépassent les deux années, les travaux des copropriétés sont de plus en plus importants, les ressources des candidats à la location sont limitées et aléatoires, la taxation des revenus immobiliers plombe la rentabilité: l’investissement personnel dans un appartement est devenu délicat et hasardeux. « Le prix moyen de la relocation sur la Métropole Aix Marseille Provence, note Jean Berthoz, est de l’ordre de 12,50 € le m2 variant de 18 € à 11 € le m2 en fonction de la surface et du secteur. La vacance locative a diminué de moitié passant de 60 jours il y a quelques années à un petit mois en 2020. »