À l’occasion du World Nuclear Exhibition du 28 au 30 novembre à Villepinte, la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher a dévoilé les six nouveaux lauréats de l’appel à projets « Réacteurs nucléaires innovants ». Trois sont en Provence.
Cette action vise à soutenir le projet français de petit réacteur modulaire (SMR) intitulé “Nuward”, avec l’objectif d’une tête de série en France à l’horizon 2030. Ce nouveau concept compact, à puissance réduite et innovant en matière de sûreté, devrait permettre à de nombreux pays de remplacer leurs centrales électriques thermiques (charbon et gaz) de puissance comparable dans une logique de décarbonation.
Le projet Nuward travaille avec ses partenaires historiques, à savoir EDF, le CEA, TechnicAtome et Naval Group, ainsi que les nouveaux partenaires qui ont rejoint le projet en 2022, Framatome et Tractebel. Le gouvernement a lancé de plus un programme qui permet de soutenir de nouveaux concepts complets de réacteurs nucléaires innovants, dans les domaines de la fission et de la fusion nucléaire et de créer un nouvel écosystème de start-up nucléaires.
Ces nouveaux concepts de réacteurs doivent ainsi permettre d’introduire des innovations de rupture dans la recherche et développement de la filière nucléaire française, qu’il s’agisse de développer la production combinée d’électricité, de chaleur et/ou d’hydrogène, de favoriser la fermeture du cycle du combustible nucléaire, d’améliorer la gestion des déchets radioactifs, en permettant la réduction de leurs volumes ou activités, ou d’améliorer la compétitivité de l’énergie produite, la sûreté ou la sécurité nucléaires.
Trois nouveaux lauréats du dispositif « Réacteurs nucléaires innovants » de France 2030 en Provence
Hexana à Aix-en-Provence
La société aixoise Hexana née du CEA, fondée le 16 juin 2023, a pour objectif de mettre en œuvre un petit réacteur nucléaire modulaire dit AMR (Advanced Modular Reactors) de type réacteur à neutrons rapides et à caloporteur sodium, intégrant un dispositif de stockage à haute température. La start-up résulte de la rencontre entre deux visions, l’une visant la décarbonation des principaux secteurs industriels émetteurs de CO2, l’autre proposant une technologie de système nucléaire de quatrième génération crédible.
Hexana développe un système énergétique de fabrication modulaire associant deux petits réacteurs modulaires à neutrons rapides refroidis au sodium et un stockage thermique couplé aux besoins industriels. Cette technologie s’appuie sur le patrimoine technologique industriel développé par le CEA, EDF et Framatome.
Ce système nucléaire d’une puissance de 800 MWth (ou 300 MWe) vise à fournir de la chaleur à haute température aux industries énergivores (électricité, eau douce, vapeur, hydrogène, capture du CO2, carburants de synthèse, e-ammoniac, e-méthane, e-méthanol, etc.). Une production d’électricité flexible à destination des réseaux locaux et nationaux en substitution des centrales thermiques fossiles. C’est une brique essentielle pour viser une économie circulaire du combustible nucléaire, offrant des prix garantis et une indépendance énergétique durable.
Otrera Nuclear Energy à Peynier
Otrera Nuclear Energy implantée à Peynier (13), créée par Frédéric Varaine un ancien du CEA, et Nicole Fortunet, issue du CEA et de Technicatome développe un concept de petit réacteur innovant de 4e génération, de type « Sodium Fast Reactor » (SFR). Ce réacteur à neutrons rapides à caloporteur sodium (RNR-Na) est une filière expérimentale de réacteur à neutrons rapides qui utilise du sodium liquide pour son refroidissement.
Otrera recycle les assemblages combustibles usés actuellement stockés en piscines et recycle ses propres déchets. Tout pays ayant exploité ou exploitant des réacteurs nucléaires possède cette ressource sur son sol. La grande autonomie de fonctionnement du réacteur – de l’ordre de 10 ans – et sa maniabilité d’utilisation lui permettent, selon Otrera, de s’ajuster en permanence au besoin en préservant la continuité de service, sécurisant ainsi une production électrique stable et fiable (110 MW). Cette production ainsi que la production de chaleur (185 MW) en cogénération devrait permettre aux villes de se chauffer, de produire de l’hydrogène pour les transports de marchandises et les transports en commun, de capter son surplus de CO2, de dessaler de l’eau pour les villes en bord de mer et de revaloriser les friches industrielles en y intégrant des industries décarbonées, redonnant ainsi de l’interaction entre l’industrie et la cité.
Dans son manifeste l’entreprise affiche une « vision ancrée dans l’histoire des amazones (« otrere »), des femmes fortes et indépendantes qui ont su défier les conventions pour construire un avenir qui leur était propre. De la même manière, nous défions les normes énergétiques établies en concevant un réacteur nucléaire de quatrième génération innovant et sûr. »
Blue Capsule Aix-en-Provence
Blue Capsule est un projet nucléaire compact et modulaire d’unités de maximum 150 MWth fournissant de la chaleur industrielle à plus de 700 °C. Il utilise l’air ambiant comme seule source froide.
Blue Capsule créé en 2022 par Édouard Hourcade et Alexey Lokhov utilise une technologie de petit réacteur modulaire nucléaire à haute température (PRM). Blue Capsule veut décarboniser les secteurs industriels et chimiques qui dépendent actuellement des combustibles fossiles, pour lesquels il existe peu de solutions de rechange économiquement viables à faibles émissions de carbone, en produisant de la chaleur et de l’énergie nucléaire à faible teneur en carbone sûre, évolutive et fiable.
Blue capsule est à la croisée de deux technologies matures : les réacteurs à hautes températures (HTR) et les réacteurs refroidis au sodium. Les composants sont selon Blue Capsule « des piliers de la chaîne d’approvisionnement de l’industrie nucléaire dans les pays de l’OCDE et sont parfaitement connus des autorités nationales de sûreté. »
Son design lui confère une puissance suffisante pour l’alimentation d’un site chimique industriel tout en présentant un encombrement limité permettant de l’installer sous terre. Ce positionnement souterrain protège l’unité nucléaire des agressions extérieures. Les analyses préliminaires sur les dangers externes ont confirmé sa résistance à des circonstances extrêmes.
Vidéo : le Webinaire de la Société française d’énergie nucléaire (18/04/2023)
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