A circonstances exceptionnelles, mise en œuvre de moyens inhabituels. Ce mardi 7 avril, c’est par téléphone que Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, organisait une conférence de presse dans la foulée du « tour de France virtuel des Régions » qui faisait escale en Région Sud ce même jour, réunissant les principaux opérateurs et acteurs régionaux du secteur touristique. Sans esquiver la gravité de la situation, il se fait le porte-voix des dispositifs gouvernementaux à destination du secteur touristique.
Crise sans précédent pour le tourisme régional
Présent pour l’occasion, Renaud Muselier, président de la Région Sud, ne manque pas de souligner l’importance du tourisme dans l’économie de la Région Sud : « 20 milliards d’euros » de recettes par an, « 13 % du PIB régional », « 31 millions de séjours » vendus chaque année, « 150 000 emplois » directs, tels sont les chiffres qui en temps normal en fait la deuxième région de France en matière d’économie du tourisme, derrière l’Île-de-France. Un deuxième rang que la Région Sud occupe également au niveau national pour ce qui concerne le tourisme d’affaires.
C’est dire la gravité de la crise du coronavirus sur ce secteur, qui subit « un taux d’occupation tombé à 1% » comme le rappelle Renaud Muselier. Pour Jean-Baptiste Lemoyne, ce sont les recettes d’un trimestre entier qui sont d’ores et déjà perdues, soit « un impact à 4 ou 5 milliards d’euros ». Et lorsqu’on lui demande les perspectives à attendre de la saison estivale, il coupe court à tout faux espoir. « Ce qui compte, c’est vaincre l’épidémie. La priorité est sanitaire, on s’interdit de faire de la prospective. Je ne peux pas me hasarder à faire des pronostics » explique-t-il, ajoutant : « il est trop tôt pour se prononcer ». En l’absence de certitude de calendrier, Renaud Muselier abonde dans le sens du secrétaire d’Etat : « il faut être prêt au redémarrage » dit-il, combatif.
35 millions d’euros de prêts garantis par l’Etat pour la Région Sud
Naturellement, devant les acteurs régionaux du tourisme, Jean-Baptiste Lemoyne se fait le relais des mesures prises par le gouvernement à destination des acteurs économiques. « Tous les outils financiers sont pleinement appropriés » se félicite-t-il, indiquant que « 95 % des dirigeants d’entreprises du monde touristique ont mis en place le chômage partiel », tandis que « deux tiers d’entre eux sont en train de constituer des dossiers pour les prêts garantis par l’Etat ». Sur ce dernier dispositif, géré par la Banque publique d’investissement (BPI France), il précise : « il y a environ 11,5 % des dossiers déposés qui concernent le secteur du tourisme ».
Il poursuit : « si on regarde les montants déjà accordés dans le secteur du tourisme, 145 millions d’euros ont été attribués à des entreprises du tourisme d’Île-de-France, 69 millions pour la région Nouvelle-Aquitaine, 52 millions pour la région Occitanie, 48 millions pour la région Grand Est et 35 millions pour la Région Sud ». Comment expliquer ce faible montant accordé aux entreprises de la Région Sud, pourtant deuxième région touristique en terme de PIB ? Par le fait que toutes les entreprises n’ont pas forcément encore toutes déposé leur dossier, mais également par une possible méconnaissance du dispositif en région.
Une reprise qui prendra du temps
Si Jean-Baptiste Lemoyne ne souhaite pas se prononcer sur la saison estivale, « Les professionnels estiment que la reprise se fera progressivement sur un an et demi à deux ans. D’après leurs analyses, ce n’est qu’en 2022 qu’on retrouvera le niveau de 2019 », expose-t-il, dans un bilan sans concession sur la réalité de la situation. Néanmoins, il se félicite de voir que « la mesure sur les avoirs rencontre un franc succès », avec selon lui seulement 2% de clients insatisfaits. Cette mesure permet aux opérateurs touristiques de proposer un report dans le temps des séjours et prestations déjà payés par les clients, sans avoir à procéder à des remboursements qui aggraveraient encore plus l’état de la trésorerie des professionnels.
Puis, en tentant d’ébaucher un scénario de sortie de crise, il affirme que « les entreprises sont en train d’imaginer le tourisme de demain, dont on sait qu’il va recommencer en priorité par un tourisme de proximité, et puis progressivement par cercles concentriques, va s’adresser aux clientèles, sachant que nous devons considérer l’Europe comme un débouché prioritaire pour la reprise ». Toutefois, son constat ne s’arrête pas là : « J’ai été frappé par l’anticipation des acteurs touristiques quant au changement de comportement des consommateurs. Tous réfléchissent à de nouveaux services, de nouvelles pratiques ».
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