Quelques semaines après le scandale de la distribution de la propagande électorale qui avait marqué les élections départementales et régionales de juin dernier le Ministère de l’intérieur a annoncé le 13 août la résiliation du marché qui le lie à Adrexo. La société aixoise avait remporté l’appel d’offres pour l’acheminement des plis électoraux dans 51 départements français. Un juteux contrat d’environ 200 millions d’euros pour quatre ans. Finalement, il n’aura duré que quelques mois. Dans un communiqué, la Place Beauvau évoque « des dysfonctionnements inacceptables » pour justifier la rupture du contrat.
« Un véritable fiasco » pour les sénateurs
Cette décision va dans le sens du rapport rendu fin juillet par la commission des lois du Sénat. Les élus du Palais du Luxembourg y dénoncent « un véritable fiasco, sans commune mesure avec les quelques difficultés récurrentes qui peuvent se rencontrer dans la plupart des scrutins ». Si les investigations peinent à établir un chiffre exact sur la proportion de plis non distribués, les sénateurs dénoncent une sous-estimation de la part d’Adrexo. L’entreprise avance une part de seulement 5,3% de non distribution pour les départementales et de 7,2% aux régionales tandis que la Poste, deuxième opérateur pour le reste du pays, parle de 9,5%. Ce dernier conserve pour l’instant le marché confié par le ministère de l’Intérieur.
« Au total, selon un récent sondage, un quart des Français n’auraient reçu aucun document de propagande électorale avant ce premier tour », oppose le Sénat. Pire, au second tour, de l’aveu même des opérateurs, 26,6 % des électeurs n’ont reçu aucune propagande pour les élections départementales et 40,3 % pour les élections régionales, cette proportion s’élevant même à plus de 90% dans plusieurs départements comme le Cher, la Drôme ou encore l’Ardèche. « Encore ces statistiques sont-elles vraisemblablement sous-évaluées, comme en témoignent les nombreuses discordances relevées par les élus et les préfectures », poursuit le rapport des sénateurs. Pour ces derniers, nul doute qu’une « assez nette corrélation peut être établie entre la non-réception de la propagande électorale et la hausse de l’abstention entre les élections de 2015 et 2021 ».
A moins d’un an des élections présidentielles, le ministre de l’Intérieur souhaite rectifier rapidement le tir. Lors de son audition au Sénat le 23 juillet dernier, Gérald Darmanin avoue qu’Adrexo n’est « manifestement pas à la hauteur du marché qui lui est proposé ». L’Etat reprend donc la main sur sur le dispositif. Dans son communiqué, le Ministère de l’Intérieur indique que « les mises sous pli seront dorénavant effectuées par les services des préfectures et non plus par des sociétés privées ».