En juillet dernier, Renaud Muselier, le président de la Région Sud, annonçait la création d’un nouvel outil visant à financer des projets environnementaux en Méditerranée. Nom de code : « Pliff » (PAMEx locally investment facility). Un fonds d’investissement lancé officiellement quelques mois plus tard, le 7 novembre, lors de la Cop 27 en Egypte, le rendez-vous mondial pour la planète, et confirmé à l’occasion du 5e forum Méditerranée du futur organisé par la Région Sud ces 5 et 6 décembre.
Le Pliff se présente sous la forme d’un consortium coordonné par le R20, une ONG spécialisée dans l’accompagnement des collectivités internationales pour le développement d’infrastructures durables. Cette plateforme sera en quelque sorte le bras financier du « plan d’actions pour une Méditerranée exemplaire en 2030 » (Pamex 2030), officialisé à Marseille par Emmanuel Macron, en septembre 2021, lors du congrès mondial de l’UICN, et ratifié par cinq ONG ainsi que huit États riverains de la Grande Bleue, dont la France.
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Le Pamex engage ses signataires à développer la protection de la biodiversité, à promouvoir une pêche durable, à développer les transports maritimes zéro émission, ou encore à réduire la pollution en Méditerranée. Au moins 19 actions sont prévues. Elles sont pour le moment chiffrées entre 5 et 75 millions d’euros. Parmi les projets prioritaires, on retrouve notamment l’électrification des ports, la gestion des déchets et l’assainissement des villes côtières, ainsi que la préservation et la restauration des écosystèmes fragiles.
Quelles entités composent le Pliff ?
Le Pliff est mis en place par un consortium composé d’une vingtaine d’acteurs. Des organisations internationales (Programme des Nations Unies pour l’Environnement, l’Union pour la Méditerranée, l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature), de gouvernements nationaux avec leurs agences de développement (France : AFD et Espagne : AECID, pour démarrer), des collectivités territoriales avec des réseaux de villes et des régions leaders (Région Sud et Junta de Andalucia), des gestionnaires de fonds (Poséidon Earth Capital et Edifice Capital), des ONG, des Universités et des entreprises privées. Le Pliff sera co-présidé par Renaud Muselier et le secrétariat du fonds sera implanté à Marseille au tout début de l’année prochaine.
« Nous passons notre temps à parler, signer des conventions parfois très théoriques. Là, c’est du concret. Cet outil qu’est le Pliff a vocation à être plus souple dans son application », souligne pour sa part Karim Amellal, ambassadeur de France pour la Méditerranée, à l’occasion du forum Méditerranée du futur. Si certaines grandes thématiques prioritaires ont été identifiées, le R20 a tout de même prévu de lancer des ateliers de concertation impliquant les habitants et entités concernées pour cibler des besoins précis qui guideront le choix des projets financés par le Pliff.
Un mix de financements publics et privés
Le Pliff se présente donc comme une « facilité financière » destinée à subventionner tous ces chantiers. Le fonds a récemment mis en place un guichet unique offrant des solutions de financement aux territoires et à leurs entreprises. « Les autorités locales représentent 70% des réponses à l’adaptation et à l’atténuation du changement climatique », affirme Christophe Nuttall, directeur exécutif du R20. Le Pliff compte à la fois sur des investisseurs publics (Nations unies, banques de développement, agences de développement, fonds souverains), et privés (fondations, banques commerciales, fonds de pension, assurances, family offices). L’enjeu est de lever, d’ici 2024, un milliard de capitaux, d’assistance technique, de fonds propres et d’emprunts d’ici 2030.
Car si les fonds publics abondent généralement, c’est plus rarement le cas des investisseurs privés. « Il faudra s’assurer de la rentabilité des projets retenus, sans pour autant tomber dans le greenwashing », insiste Christophe Nuttall. Concrètement, pour l’heure, les membres du Pliff mise sur une répartition 30% de public et 70% de privé sur les projets d’atténuation de la pollution, et 40% de fonds publics pour 60% de fonds privé pour les projets en lien avec l’adaptation au changement climatique. « Il faut trouver des business models qui attirent les investisseurs privés. Quoi qu’il en soit, les banques françaises soutiennent Méditerranée du futur », abonde Rémy Rioux, directeur général de l’Agence française pour le développement (AFD).
Parmi les business models inspirant, Renaud Muselier cite l’exemple du Grand Port maritime de Marseille, qui a mis en place depuis 2017 l’électrification à quai et compte la généraliser à tous ses terminaux d’ici 2025. « Nous voulons nous en inspirer pour dupliquer ce modèle sur les autres ports de Méditerranée », affirme-t-il. En effet, le port s’appuie sur un modèle fondé à 60% sur les subventions, ce qui lui permet de réclamer une taxe pollueur-payeur aux armateurs, et les inciter au maximum à utiliser le dispositif d’électrification à quai mis en place par le port.
L’union pour la Méditerranée tire la sonnette d’alarme
En guise d’ouverture de la cinquième édition du forum annuel Méditerranée du futur, lundi 5 décembre, Renaud Muselier est revenu sur la feuille de route que doit tenir le Pliff. Aux côtés du prince Albert II de Monaco, invité d’honneur, et de Nasser Kamel, le secrétaire général de l’Union pour la Méditerranée (UPM), l’ancien député européen et secrétaire d’Etat aux affaires étrangères justifie la création d’un tel outil financier. « L’avenir de l’Europe se joue en Méditerranée, cette mer d’où vient sa richesse, et d’où viendra demain sa jeunesse et son élan », déclare Renaud Muselier dans l’hémicycle régional. De son côté, Nasser Kamel imagine une Grande Bleue « à l’avant garde » de la lutte face au réchauffement planétaire, et rappelle l’urgence d’agir. D’ici 2040, dans le bassin méditerranéen, la température devrait augmenter selon lui de 2,2 degrés. Et pour cause, après l’Arctique, la Méditerranée est la région qui souffre le plus du dérèglement climatique.
🌊 @MaRegionSud et ses partenaires procèdent officiellement à la signature de la charte d’initiative du Pliff ✍️ pic.twitter.com/sr5xrdxk8H
— Gomet’ (@Gometmedia) December 6, 2022
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