A l’image des cheminées blanches et rouges de la centrale EDF du Ponteau, les grandes usines des années 60 font partie du paysage martégal. Les usines ont nourri la population pendant plusieurs décennies mais les nouveaux enjeux écologiques poussent les entreprises à revoir leur copie. Elles s’adaptent mais ne créent plus autant d’emplois qu’auparavant. La transformation de la raffinerie de Total à la Mède en est un parfait exemple. L’usine va produire un biocarburant plus propre mais perd en contrepartie 180 postes. De plus, l’utilisation massive d’huile de palme comme matière première pour la fabrication de son carburant « vert » reste très contestée dans l’opinion publique. « Les temps ont changé. Avant, tout le monde travaillait à l’usine. Personne ne pensait alors à se plaindre de la pollution. Maintenant qu’ils pèsent moins lourds dans l’économie, ils sont la cible de toutes les attaques », note Florian Salazar-Martin, vice-président en charge de l’économie du Pays de Martigues. Aujourd’hui, l’industrie sur le Pays de Martigues, c’est 3 000 salariés, soit un quart de l’emploi privé. Un poids réduit mais non négligeable pour ce territoire qui cherche de nouvelles pistes de développement économique.
Pour réfléchir à son avenir, le Pays de Martigues mobilisent toutes les forces vives. Les collectivités, les industriels et les associations se sont réunis mardi 27 novembre pour une journée de brainstorming autour de l’activité économique du territoire. Baptisée « Intersections », cet événement vise à créer des synergies entre les différents secteurs. La transition énergétique et l’environnement ont notamment été au cœur des échanges. « Face à l’accumulation des normes, tout le monde doit s’adapter et les investissements sont réels sur les sites autour de l’Etang de Berre », affirme, Luc Frison, vice-président CCIMP délégué au territoire de Martigues/Istres. Il cite notamment les efforts d’Ineos à Lavera. Le troisième groupe mondial de produits chimiques a lancé un plan de plusieurs centaines de millions d’euros pour réduire ses rejets. L’usine s’équipe par exemple de nouvelles chaudières plus efficaces pour un montant de 77 millions d’euros. D’ici deux à trois ans, une unité de désulfuration d’essence sera également construite pour un budget de 100 millions d’euros. Ces investissements lourds doivent lui permettre de pérenniser son activité mais avec peu de créations d’emplois à la clé, une dizaine tout au plus. A noter l’absence du géant français Total qui a décliné l’invitation pour cette première édition : « On peut le comprendre compte-tenu de la situation compliquée qu’ils traversent avec le projet de la Mède », tente d’excuser Florian Salazar-Martin.
En route vers une industrie plus durable
Le projet des éoliennes marines d’EDF au large de Fos semble plus prometteur en terme d’emplois. Sur la phase chantier du projet, une centaine d’emplois seront déjà créés. La société va même ouvrir son centre de maintenance sur l’ancienne jetée qui servait de stockage au fioul lourd sur sa centrale électrique du Ponteau. Dix personnes y seront installées à plein temps. « Au départ, ce sera trois éoliennes qui seront installées pour tester la technologie mais on pense que demain, ce seront des fermes de plusieurs dizaines de machines », avance Philippe Veyan, le directeur du projet Provence Grand Large. En cas de succès de l’expérimentation, des centaines d’emplois découleraient de ce projet 100 % énergies renouvelables. EDF attend maintenant le prochain appel à projet de l’Etat sur les fermes commerciales qui doit intervenir en 2022 pour le littoral méditerranéen.
Sans jamais trop s’éloigner de ses origines, Martigues soutient également le développement d’une activité de déconstruction navale sur le canal de Caronte. « C’est de l’économie circulaire qui crée de l’emploi », encourage Florian Salazar-Martin. En 2013, le projet Green’Med annonçait l’installation d’un véritable chantier de démantèlement des navires de 80 mètres qui n’a jamais vu le jour. « Mais cela reste une piste sérieuse qui est inscrite à l’agenda économique de la Métropole », assure l’élu. « D’ailleurs, il y a déjà de l’activité sur le site », ajoute-t-il. En effet, la société Genier Desforges, filiale du groupe Colas, s’est installée sur le chenal pour déconstruire et dépolluer cinquante navires de la marine nationale venus de Toulon. Mais cette implantation ne dispose que d’une autorisation temporaire initialement prévue pour s’arrêter au printemps prochain. La zone de Caronte s’étend au total sur 172 hectares et pour l’utiliser au mieux, le Pays de Martigues et le grand port maritime de Marseille-Fos (GPMM) travaille sur un schéma directeur pour déterminer les axes de développement possible. Le document sera dévoilé au printemps prochain. En attendant de nouvelles pistes, la filière cinéma a commencé à prendre son essor sur les anciens terrains industriels.
Le cinéma investit les friches industrielles
En moins de dix ans, Martigues est devenue une véritable capitale régionale du cinéma attirant de grosses productions comme Overdrive, Taxi 5 ou Gaston Lagaffe… L’an dernier, le territoire a accueilli 68 tournages, un score qui sera certainement battu en 2018. Avec ses 22 hectares de terrains et ses 26 000 mètres carrés de bâtiments, la société d’Olivier Marchetti, Provence Studios, a offert une seconde vie aux friches industrielles installées au bord du chenal. « C’est un énorme levier pour l’emploi car 90 % des personnes qui travaillent sur un tournage sont du coin », explique Olivier Marchetti. Si son entreprise tourne avec une vingtaine de salariés, les chiffres peuvent rapidement grimper à plus d’une centaine pour le territoire pour les projets les plus importants. L’idée est de fournir aux productions l’ensemble des compétences dont elles ont besoin.
Le Pays de Martigues a donc développé une plateforme qui réunit près de 300 acteurs : régisseurs, hôteliers, entreprises de levage… « Maintenant, on doit développer sur place de nouvelles formations pour répondre à des besoins précis et récurrents », avance Florian Salazar-Martin. Le territoire continue d’attirer de nouvelles activités sous-traitantes autour du cinéma comme l’académie des cascades ou encore le canadien Mont-Mars cette année. Le Pays de Martigues travaille désormais sur le renforcement du fonds régional d’aide à la production pour soutenir la filière. L’an dernier, il a reçu un supplément de 2 millions d’euros passant à plus de 5 millions par an mais les professionnels attendent plus quand d’autres territoires comme les Hauts-de-France sont passés à plus de 10 millions d’euros.
Lien utile :
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