Au cœur de l’été, à Genève, pour la fête nationale Suisse, le premier août, le groupe Rhône Énergies a confirmé l’acquisition de la raffinerie de Fos-sur-Mer auprès d’Esso branche française d’Exxon Mobil.
Le géant américain de la pétrochimie qui réalise 91 milliards de dollars de chiffre d’affaires, dégage 10 milliards de dollars de bénéfices, emploie 62 000 salariés, est coté en Bourse. Il se désengage de ses installations en France (2 400 salariés). La plus grande partie de ses activités pétrochimiques du site de Gravenchon, sur la Seine, entre Rouen et Le Havre, considérées comme non rentables est abandonnée et nous avions annoncé en avril dernier qu’il était entré en négociation exclusive avec un consortium suisse : Rhône Énergies.
« Toutes les parties, indique le communiqué officiel, ont signé un accord de vente à la suite de la clôture du processus d’information et de consultation des instances représentatives du personnel ».
Rhône Énergies, un consortium suisse très américain
Le consortium Rhône Énergies associe Entara et Trafigura. Entara est un gestionnaire américain « d’infrastructures énergétiques critiques », la société a été créée par d’anciens dirigeants de Crossbridge Energy qui ont une expertise revendiquée dans la gestion et l’optimisation d’actifs de raffinage.
Trafigura est société de négoce, enregistrée à Singapour, mais dont le siège historique est en Suisse, spécialisée dans le courtage et le transport pétroliers. Elle a été créée en 1993, par deux Français, Claude Dauphin et Éric de Turckheim ; son histoire est entachée de compromissions dans des affaires de gestion de déchets (affaire ivoirienne Probo Koala), des détournements dans les marchés « pétrole contre nourriture » en Irak, des trafics de carburant toxiques et de la corruption en Afrique…
Le groupe est un trader majeur qui a réalisé 244 milliards de dollars de chiffre d’affaires avec un bénéfice net de 7,4 milliards. Il emploie 12 000 salariés, dont 1 400 sont actionnaires donc intéressés aux résultats mirobolants du groupe dirigé par l’australien Nicholas Myerson. « Nous déployons des infrastructures, affiche le groupe, une expertise du marché et notre réseau logistique mondial pour acheminer le pétrole et les produits pétroliers, les métaux et les minéraux, le gaz et l’électricité de l’endroit où ils sont produits à l’endroit où ils sont nécessaires, en établissant des relations solides qui rendent les chaînes d’approvisionnement plus efficaces, plus sûres et plus durables. »
Accroître la flexibilité de la production de la raffinerie
Nicholas Myerson déclare dans le communiqué de Rhône Énergies : « Nous sommes ravis d’avoir finalisé l’accord de vente de la raffinerie de Fos-sur-Mer et des dépôts de Toulouse et Villette-de-Vienne. Nous nous réjouissons de pouvoir travailler avec la direction de la raffinerie et l’équipe de transition, pour assurer une transition fluide des opérations. Les discussions avec les parties prenantes aux niveaux national et local progressent de façon tout à fait constructive et nous restons déterminés à collaborer avec toutes les parties concernées sur nos engagements et ambitions concernant l’avenir de l’exploitation du site ».
Le transfert de propriété est encore soumis à des agréments publics et administratifs. Les discussions avec les autorités compétentes sont en cours et les autorisations nécessaires à l’exploitation sont attendues d’ici fin octobre 2024.
Avec cette acquisition, déclare Rhône Énergies, le consortium « compte capitaliser sur l’expérience des équipes en place et sur les solides performances industrielles de la raffinerie. L’entreprise a pour ambition d’accroître la flexibilité de production d’optimiser les procédés industriels, ainsi que de maximiser la transformation de produits à haute valeur ajoutée, tout en investissant dans la sécurité du personnel et des procédés industriels.»
La pétrochimie régionale poursuit sa mutation
Une mutation de plus dans le paysage pétrochimique de l’étang de Berre et du Golfe de Fos. Depuis les années trente, ce territoire est devenu en France , le pôle du raffinage pétrolier avec quatre sites gérés alors par les majors mondiales : British Petroleum BP sur Martigues, Total à la Mède, Shell à Berre et Esso à Fos-sur-Mer.
Ces équipements ont permis de faire face à la montée en puissance du transport automobile et au boum de la consommation des produits issus du pétrole comme les plastiques. Ils ont fait la richesse du port qui a trouvé là un trafic essentiel grâce à l’oléoduc Méditerranée Rhône du réseau SPMR (Société des pipelines Méditerranée Rhône).
Dès la fin du XXe siècle il se disait qu’il y avait une raffinerie de trop. Ce fut celle de Berre qui a fermé laissant place à une zone en reconversion avec LyondellBasell qui a repris des actifs industriels. La raffinerie de Lavéra qui date de 1933 a été reprise par Ineos. TotalEnergies est le seul groupe pétrolier historique qui a maintenu son implication à la Mède mais avec une bioraffinerie très contestée.
La nouvelle donne du mix énergétique régional, on en parle lors du 1er forum Energies
organisé par Gomet’ et ses partenaires le 2 octobre à Centrale Méditerranée.
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