Le verdict de l’audience du 10 février est tombé. Le Tribunal de commerce de Marseille a définitivementprononcé la liquidation judiciaire de l’enseigne San Marinalundi 20 février. Fondée à Gémenosen 1981, l’entreprise doit licencier653 salariés, fermer 160 magasins dont son siège à Gémenos, et laisse derrière elle un passif de 55 millions d’euros. Les liquidateurs judiciaires disposent de douze mois pour déposer la liste des créances de l’entreprise au Tribunal de commerce.
Cet épilogue n’est pas surprenant. Les dirigeants,Stéphane Collabert et Laurent Portella, avaient déposé le bilan de l’entreprise le 20 septembre dernier au Tribunal de Commerce de Marseille. Placée en redressement judiciaire pendant cinq mois, une audience s’était déroulée le 10 février pour évaluer neuf offres de candidats repreneurs. Après le jugement, Maître Avazeri,le co-administrateur judiciaire, nous indiquait déjà la très probable liquidation du chausseur.
Les trois dernières offres de repreneurs rejetées
Les neuf offres déposées ont toutes été rejetées par la Justice. Dans la décision du Tribunal, que nous nous sommes procurés, six candidats repreneurs ne se sont pas présentés le jour de l’audience, caractérisant « une absence de réelle volonté de maintenir une activité », peut-on lire.
Trois autres offres de repreneurs étaient toujours en lice jusqu’au 20 février. Mais aucun des trois candidats –une enseigne de lingerie (Valège Distribution) une entreprise de destockage (Chloé Developpement) et un commerçant de gros (Sas Alix textiles) – n’a proposé de reprendre ni le modèle économique de San Marina ni la totalité des 653 salariés.
Ces derniers se sont eux-mêmes opposés aux trois projets qu’ils estimaient « trop peu voire pas du tout conforme à l’intérêt social ». Ces trois offres ont ainsi été jugées« largement insuffisantes au vu des exigences légales. »
Rappelons également qu’une offre de réserve avait été déposée par les deux dirigeants, Stéphane Collabert et Laurent Portella, qui ont racheté l’enseigne début 2020 au groupe Vivarte. Mais ils se sont désistés, justifiant à la barre :« ne pas pouvoir maintenir leur offre de réserve faute d’actionnaire majoritaire. »
Un passif de 55,8 millions d’euros
Toutes ces propositions ne permettaient pas de relever l’enseigne qui accuse de grandes difficultés économiques. La décision révèle que San Marina avait« une consommation de trésorerie de nature à alerter depuis environ 10 ans et son exploitation était déjà déficitaire». Les salariés ont également pointé un« vrai manque de communication», un« niveau de prix qui s’est envolé avant l’inflation» et des« listes de loyers impayés.»
Le passif de l’enseigne est évalué à 55,8 millions d’euros avec 1200 créanciers à rembourser. Maître Louis, co-mandataire judiciaire, informe des principaux postes de ventilation de ce passif : 9,7 millions d’euros pour les bailleurs, 10,6 millionspour les fournisseurs, le volet fiscal représente 7,9 millions et le volet social 8,1 millions. Restent également les 3,8 millions d’euros du prêt garanti par l’Etat (PGE). Le Tribunal pointe que ce passif avait été sous-estimé par les dirigeants qui l’évaluaient à 40 millions d’euros.
Un contexte difficile pour le textile en France
De même, la valorisation de l’entreprise estimée à 30 millions d’euros par les dirigeants, « ne correspond pas à la valeur du marché», explique Maître de Carrière, co-mandataire judiciaire. L’avocat fait le rapprochement avec la vente aux enchères de la marque de vêtements Camaïeu deux mois après sa liquidation judiciaire en décembre 2022. L’enseigne nordiste a été achetée par Celio pour 1,8 million d’euros.
La chute de San Marina n’est pas un cas isolé en France. Maître Avazeri explique la nécessité« de mettre un terme à cette procédure le plus rapidement possible» soulignant le contexte« difficile pour le milieu du textile» couplé par un« contexte général de crise où le budget des ménages est considérablement réduit ». Après Camaïeu et San Marina, les marques Kookaï, André, Go Sport et Pimkie sont actuellement placées en redressement judiciaire.