Provence Avenir est un think tank local, présidé par Camille Andrieu. Il vise à penser l’avenir de la France depuis les territoires, en suscitant l’engagement public et en réfléchissant aux politiques publiques territoriales. Gomet’, attaché à la vitalité du débat local, est heureux d’accueillir une série de chroniques de Provence Avenir consacrées aux grands défis du territoire.
Comment remédier au non-respect de l’obligation en matière de bilan carbone par les organismes publics et privés en Provence ?
Depuis les années 1960, la Provence se réchauffe à hauteur de 0,3°C par décennie, principalement en raison des activités humaines exercées sur son territoire. Afin d’y faire face, la transparence et la mesure de l’impact humain sont des facteurs-clef. Pour cette raison, la Région Sud a adopté son premier budget intégralement “vert” en 2023. Les dépenses de la Région sont ainsi évaluées et classifiées en fonction de leur impact plus ou moins favorable à l’environnement. C’est un choix politique fort dans un contexte de dérèglement climatique important où la Provence est particulièrement impactée.
65% des organisations soumises à la réalisation d’un “bilan gaz à effet de serre” ne respectent pas cette obligation
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Face à la gravité de la situation, l’ensemble des acteurs publics et privés ne démontrent pas la même volonté d’agir en faveur de l’environnement. Le nombre d’organisations respectant leurs obligations en matière de bilan des émissions de Gaz à effet de serre (GES) s’est dégradé depuis 2013, passant selon l’Ademe – chargée de recueillir et de publier les bilans – de 60 % à 35 % en 2021. “65% des organisations soumises à la réalisation d’un “bilan gaz à effet de serre” ne respectent pas cette obligation.
Le bilan GES est l’évaluation de la quantité de gaz à effet de serre relâchée dans l’atmosphère par l’activité d’une personne morale sur une année. Il s’agit d’un outil fondamental dans la lutte contre le dérèglement climatique : il permet aux organisations de connaître leurs principales sources de pollution et d’y apporter des réponses concrètes. Encadré par le Code de l’environnement, le bilan est obligatoire pour les entreprises de plus de 500 personnes, les services d’État employant plus de 250 personnes et les collectivités de plus de 50 000 habitants. Or, seule une faible proportion de structures met en place une telle démarche. Selon l’Ademe, 57 % des entreprises, 77 % des établissements publics et 82 % des collectivités concernés n’ont pas réalisé leur bilan GES en 2021.
À titre d’exemple, plusieurs collectivités de Provence Alpes Côte d’Azur n’ont pas publié leur bilan GES sur le site de l’Ademe. Les organisations sont souvent réticentes à l’idée de réaliser une telle démarche. Incompréhension des raisons de l’obligation, manque de moyens financiers ou humains – différents arguments sont apportés par les collectivités pour justifier l’absence de réalisation du bilan. À juste titre : un bilan peut coûter entre 5 000 € et 100 000 € à réaliser, selon la taille de la structure.
Améliorer l’effectivité et la clarté du bilan des collectivités en le faisant obligatoirement figurer en annexe du compte administratif
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Afin de remédier à ce constat, Provence Avenir propose des solutions concrètes pour inciter les organisations à réaliser leur bilan GES. Le think tank préconise d’améliorer l’effectivité et la clarté du bilan des collectivités en le faisant obligatoirement figurer en annexe du compte administratif (c’est le bilan financier en fin d’exercice). Ainsi, l’absence de bilan GES pourra être un motif de rejet des comptes des collectivités, et, si besoin, de substitution par le préfet.
Les bilans GES doivent également être systématiquement centralisés et publiés sur le site de l’Ademe. Provence Avenir propose également de renforcer les contrôles relatifs à la publication des bilans GES et d’en renforcer les sanctions, qui sont aujourd’hui à la fois trop faibles (20 000 € en cas de récidive) et peu appliquées. L’exclusion des entreprises qui ne respectent pas leurs obligations de la commande publique figure au projet de loi “Industrie verte” examiné au Parlement cet été. Il est ensuite nécessaire, une fois effectués, de tirer les conséquences de ces bilans GES.
Les différents organes publics se doivent d’être exemplaires
En accord avec les lignes de la réforme initiée par la loi Nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) de 2015, nous proposons de définir une collectivité cheffe de file, par exemple la Région (déjà compétente en matière de biodiversité notamment), de la trajectoire de réduction des émissions GES. Face aux enjeux environnementaux liés au dérèglement climatique qui sont désormais connus et reconnus, il est nécessaire que les organisations, en particulier du secteur public, prennent leurs responsabilités.
Les différents organes publics – administrations centrales, services déconcentrés, établissements publics, collectivités territoriales, entreprises publiques – se doivent d’être exemplaires en la matière.
Auteure de la tribune
Camille Andrieu
camille.andrieu@provenceavenir.org
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